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L'association MEMORIAL98, qui combat contre le racisme, l'antisémitisme et le négationnisme a été créée en janvier 1998, lors du centenaire de l'affaire Dreyfus.  

Son nom fait référence aux premières manifestations organisées en janvier 1898, pendant l'affaire Dreyfus, par des ouvriers socialistes et révolutionnaires parisiens s'opposant à la propagande nationaliste et antisémite.

Ce site en est l'expression dans le combat contre tous les négationnismes

(Arménie, Rwanda, Shoah ...)

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Retrouvez aussi le quotidien de l'info antiraciste sur notre blog d'actus :

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Sur les réseaux sociaux : 

    

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Pour correspondre avec nous, nous proposer des articles ou des informations,

pour toute question : 

contact@memorial98.org

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31 janvier 2010 7 31 /01 /janvier /2010 21:54

Georges Frêche savait parfaitement ce qu’il disait quand il a mis en cause Fabius sur sa  «tronche pas catholique » 

 

L’extrême droite et  le journal « Minute » ont en effet  très souvent caricaturé et attaqué la « tronche » de Fabius sur un mode antisémite, notamment dans l’affaire du sang contaminé.

 

Cette dimension de notoriété publique n’est certes pas inconnue de l’imprécateur raciste de Montpellier, mais il pense que tout lui est permis, particulièrement à l’égard de « communautés » qui lui seraient redevables d’actes en leur faveur.

 

C’est le sens de sa lettre à Fabius dans laquelle il redouble son propos initial.

Il y prétend que son insulte "n'a pas de connotation religieuse" et poursuit :"... tu connais depuis longtemps mon amitié pour Israël. L'action que j'ai conduite en faveur de la communauté juive en porte le témoignage", On notera au passage l’amalgame entre la communauté juive et Israël.

 

Il réagit exactement, au terme près, comme en son temps Jacques Médecin, maire ultra-droitier de Nice quand celui-ci avait, en 1990, réagi violemment au refus des membres de la communauté juive de cautionner son rapprochement avec Le Pen. Il avait attaqué les  «Israélites qui ne refusaient jamais un cadeau»; interrogé plus tard sur cette réaction, il se justifie ainsi, sur le mode clientéliste: « J'étais de toutes les fêtes de la communauté, de tous leurs défilés, de toutes leurs manifestations. Mes propos ont été déformés, délibérément. En parlant, j'évoquais un problème de politesse. Et on m'a lynché dans le monde entier. »

 

Malgré ses propos abjects et redoublés contre les Harkis « sous-hommes », puis contre les Noirs trop nombreux en équipe de France, récemment contre  les militants de la Cimade (au passé glorieux de sauvetage de Juifs pendant la guerre) traités carrément de nazis il y a 15 jours parce qu’ils manifestaient contre l’entreprise israélienne Agrexco, Frêche avait malheureusement bénéficié de la complaisance d’une partie de la direction nationale du PS et des dirigeants locaux corrompus de ce parti.

 

Qui sont, encore aujourd’hui, les défenseurs de Frêche ?

 

Jean-Louis Nicolin, affairiste, président de club de foot local,  grand pourfendeur homophobe et misogyne de « tarlouzes et de gonzesses ».

 

Le président du CRIF Prasquier lui délivre un certificat de bonne conduite, tout en légitimant le "grandébat" sur l’Identité nationale.

Frêche utilise évidemment cette aubaine venue de la direction du CRIF. Au même moment, le CRIF exclut le PC et les Verts de sa réception annuelle et invite Eric Besson à son dîner annuel en Rhône-Alpes. C’est la marque de la dérive que nous avons déjà évoquée et qui semble s'aggraver (voir notre article  Stéphane Guillon: bravo! )

Notons que pour la LICRA au contraire et fort pertinemment cette fois-ci «il s’agit d’une stratégie délibérée afin de glaner les votes des électeurs du Front National dans la région qu’il convoite.»

La LDJ, porte-parole de l’extrême-droite juive, soutient aussi Frêche.

Jean Claude Gayssot, ancien ministre communiste, se range aux côtés de Frêche avec les élus locaux corrompus du PS.

Des responsables nationaux du PS tels Vincent Peillon, Moscovici ainsi que Ségolène Royal lui trouvent encore des excuses 

 
L’attitude du PS à l’égard de Frêche a représenté une véritable tragédie :  malgré les alertes répétées, malgré les cris d’alarme des militants antiracistes depuis de nombreuses années, sa direction a attendu ce  dernier éclat  pour enfin se séparer électoralement de celui qu’elle avait pourtant exclu dès 2007
Cette pusillanimité peut entretenir l’idée que le PS s’émeut seulement quand l’insulte est antisémite.
 

Néanmoins, on peut espérer que de ce mal sorte un bien.

Il est temps que toute la gauche, au-delà de ses divergences tout à fait réelles, s’unisse véritablement, sans calcul de préséance afin de débarrasser la région de l’imprécateur qui la dirige.

Le pire serait que les calculs des uns et des autres permettent à Frêche de prétendre encore une fois, comme en 2008 devant des étudiants : "Moi j’ai toujours été élu par une majorité de cons et ça continue."

 

 MEMORIAL 98

 

 

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18 janvier 2010 1 18 /01 /janvier /2010 22:26
Rassemblement de protestation

MARDI 19 JANVIER 17H30 - 19H30
Fontaine des Innocents
Métro Les Halles

Un  an  après  l'assassinat de  Stanislav Markelov  et d'Anastassia Babourova  en  Russie,

Justice et  solidarité.

Alors que va s'ouvrir l'année de la Russie en France, nous, militants de la solidarité internationale, syndicalistes, militants associatifs, défenseurs des droits de l'Homme ou amis de ceux et celles qui défendent leurs droits dans la Fédération de Russie, dans le Caucase, appelons à un rassemblement à Paris contre les assassinats politiques, à l'instar des initiatives prises en Russie au même moment. 

 Il s'agit pour nous de protester à cette occasion contre les  répressions, assassinats, agressions, qui ont  fait de trop nombreuses victimes pendant l'année qui vient de se dérouler.

 Entre autres : Stanislav Markelov, avocat défendant les militants des mouvements sociaux, des syndicats et plus généralement des droits de l'Homme en Fédération de Russie, Anastassia Babourova, journaliste à Novaïa Gazeta assassinés le 19 janvier 2009, ainsi qu'au cours des derniers mois : Feodor Filatov, Ivan Khoutorskoi, militants antifascistes, Natalia Estemirova, membre du bureau de Mémorial à Grozny, Zarema Sadoulaeva de l'ONG tchétchène « Sauvons notre génération » et son mari, Makcharip Aouchev, membre de l'opposition et défenseur des Droits de l’Homme en Ingouchie.

 A cette liste de militants, il faut ajouter les dizaines de meurtres et les centaines d’agressions racistes qui se sont déroulés sur le territoire russe, parmi eux, Serguei Nikolaev, Bair Sambuev…

 Nous voulons rappeler à cette occasion que des bandes armées, des milices paramilitaires, des

agresseurs racistes continuent d'agir en toute impunité. Que l'Etat est responsable  de plusieurs de ces faits, et quand ce n'est pas le cas, que la justice, la police par leur inaction et leurs mensonges, sont les complices de ces agissements. Aucune "année de la Russie" ne saurait faire l'impasse sur une telle situation.

 o Nous apportons notre soutien à ceux qui luttent pour que

les criminels soient poursuivis et les instigateurs des crimes

jugés;

o Nous nous opposons avec eux aux atteintes portées aux

droits syndicaux et aux libertés fondamentales;

o Nous dénonçons la répression et la criminalisation des

résistances et de la société civile qui s'étend dans la

Fédération de Russie, le Caucase du Nord, ceci alors que le

gouvernement français va célébrer « l'année de la Russie »

signataires :  Convoi syndical pour la Tchétchénie , Comité Tchétchénie, Assemblée Européenne des Citoyens, Cedetim, comité Sokolov, Scalp Reflex No Pasaran, Comité tchétchénie, FIDH, LDH, Maison de l'Europe et d'Orient, Marches Européennes, NPA , les Verts, Parti de Gauche, Association Mémorial 98... 

MEMORIAL 98

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17 janvier 2010 7 17 /01 /janvier /2010 22:07

Le maire de Marseille a dénoncé les démonstrations de joie des supporters de l'équipe d'Algérie après sa victoire contre l’Égypte, mi-novembre, dans des termes qui, tout à fait hors de propos, mettent en avant la question de l’Islam : « Nous nous réjouissons que les musulmans soient heureux du match, sauf que quand après ils déferlent à 15.000 ou à 20.000 sur la Canebière, il n'y a que le drapeau algérien et il n'y a pas le drapeau français, cela ne nous plaît pas".

Quel rapport avec les « musulmans » ? Gaudin reprend en fait le vocabulaire qui avait cours au temps de la colonisation en Afrique du Nord et singulièrement en Algérie, alors qu’il occulte totalement le fait colonial. Ce nouveau dérapage verbal d’un dirigeant de la droite (voir nos articles précédents Morano : récidive d’une collaboratrice du Front NationalHortefeux : le retour du refoulé ) est lié à un double contexte. D’une part il s’inscrit dans le « grandébat » sur l’Identité nationale, voulu par Sarkozy et Besson( Identité nationale : comment l’idée vint à Eric Besson ).

Au delà il renvoie à l’ambiguïté des dirigeants de la droite à l’égard du Front National, particulièrement dans les régions du Midi à forte implantation de pieds-noirs ( Sarkozy, Gaudin, Estrosi: l'ombre du Front National// Des "collègues" du FN à la tête de l'UMP .)

 Dès 1986, Jean-Claude Gaudin, aujourd'hui vice-président du Sénat et de l’UMP, a constitué une alliance politique avec le Front National afin d’être élu à la tête de la région PACA. Il a géré de concert la région avec le parti d’extrême-droite jusqu'en 1992, à coup de nominations et de désistements réciproques lors des échéances électorales.

Cette gestion commune a servi de laboratoire et de "modèle" à d’autres  dirigeants régionaux de la droite qui ont finalisé leurs accords avec le FN lors des élections régionales d’avril 1998

Gaudin a ensuite  récupéré de nombreux cadres et élus FN locaux de sa région, rebaptisés par lui « droite républicaine » sans qu’ils aient rien changé de leurs idées et de leurs pratiques.

 

Un des fleurons de ce recyclage est Daniel Simonpieri, maire de la ville de Marignane qu'il a conquise en 1995 sous l'étiquette du FN, puis intégré par Gaudin à l'UMP en 2004, et dont il a imposé l’investiture au nom de l’UMP pour les municipales de 2008.

Le député UMP de la circonscription, Eric Diard, a protesté et rappelé que Simonpieri avait inauguré dans sa ville une stèle en hommage aux généraux putschistes d'Algérie et aux membres de l’OAS.

Ses protestations n’ont pas pesé face au choix de Gaudin qui préside aussi la commission nationale d’investiture de l’UMP. Diard a refusé cette investiture et présenté une liste qui a largement devancé celle de Simonpieri

Ce dernier avait déclaré au lendemain du premier tour de la présidentielle de 2007:

«Beaucoup d'électeurs FN ont constaté que Nicolas Sarkozy disait les mêmes choses que Le Pen, mais que lui avait une chance de les mettre un jour en application. Ils ont donc voté utile. Parce qu'ils ont cessé de croire à l'accession de Le Pen au pouvoir» (cité dans Le Canard enchaîné du 25 Avril 2007).

Dans la période récente, Gaudin s’est illustré en prenant la défense de Philippe de Villiers lors du ralliement de celui-ci à Sarkozy (voir notre article De Villiers et son faux témoin ).

Le profil patelin de Gaudin et les dénonciations dont il est maintenant  l’objet de la part de l’extrême-droite ne peuvent pas dissimuler qu’il utilise sans réticence des thématiques xénophobes.

 

MEMORIAL 98

 

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14 janvier 2010 4 14 /01 /janvier /2010 22:27


Chronique de  Stéphane Guillon sur France Inter le 12 Janvier :

 "Hier, en faisant une recherche sur Internet, je suis tombé sur une info qui m'avait totalement échappé en décembre dernier - sans doute la frénésie des fêtes - : Brice Hortefeux remporte le prix de la lutte contre le racisme et l'antisémitisme. Prix décerné par l'Union des patrons juifs de France (...). À mon avis, c'est du second degré, un canular, nous sommes dans la grande tradition de l'humour juif, mélange de noirceur et d'auto-dérision.

A priori, on pense en effet à un gag, mais il s’agit  bien d’une réalité : le groupe dénommé Union des Patrons et Professionnels Juifs de France (UPJF) a vraiment, remis à Hortefeux un prix 2009 de la lutte contre l’antisémitisme et le racisme.

Hortefeux a ainsi pu déclarer lors de sa « décoration », que « le racisme, la xénophobie et l’antisémitisme n’ont pas leur place en France » .

C’est  pourtant  le même qui deux mois auparavant déclenché un scandale avec le fameux propos  : "Quand il y en a un [Arabe] ça va. C'est quand il y en a beaucoup qu'il y a des problèmes".

Guillon rappelle d’ailleurs que les autres  propos tenus ce jour là par les amis de Hortefeux sur le signe distinctif des bons français qui mangent du cochon, excluent à la fois  les musulmans et les juifs.(voir notre article Hortefeux : le retour du refoulé )

C’est pourtant le même le même qui expulse à tour de bras, y compris vers l’Afghanistan ou en séparant des enfants de leurs parents.

Qu’une union de patrons décore Hortefeux est plutôt dans l’ordre des choses; qu’elle y  mêle la  lutte contre l’antisémitisme est particulièrement écoeurant.

L’UPJF est connue pour ses positions très réactionnaires et se proclame évidemment «  apolitique » ; elle franchit ici un pas dans la flagornerie et le mensonge.

Dans  cette affaire, Hortefeux avait déjà bénéficié de la complaisance des chefs de la LICRA (Ligue contre le racisme et l’antisémitisme), au grand dam des adhérents et militants de cette association. Après l’avoir rencontré, ce quarteron de dirigeants avaient tenté de légitimer la fable d’un propos faisant allusion à des « Auvergnats ».

D’autres associations telle la vénérable Alliance Israélite Universelle  choisissent de mettre en valeur des intervenants de la droite radicale. (voir notre article Alliance Israélite : débattre avec une alliée du Font National ? )

Cette dérive est appuyée sur la vision « stratégique » d’une alliance avec la droite qui soutient la politique des gouvernements israéliens et se pose en barrage contre le « danger islamiste ». Nous y reviendrons.

Notons l’attitude de la communauté juive de Suisse lors la campagne électorale de 2007 dominée par la propagande xénophobe de l’UDC (voir notre article Blocher: un xénophobe triomphe en Suisse) .

Elle avait publié  la déclaration suivante : « Outrée par la campagne d’affiches de l’UDC (dans laquelle des moutons blancs repoussent un mouton noir hors du drapeau et du territoire helvétique), la Fédération suisse des communautés israélites s’élève avec véhémence contre ces débordements indignes des valeurs qui caractérisent notre pays. Pour nous juifs, l’étranger a toujours joui d’un statut respectant sa dignité humaine. Le quatrième des 10 commandements nous demande de lui permettre de bénéficier des mêmes droits que tout citoyen et de profiter des mêmes avantages sans la moindre discrimination. Que de fois la Torah ne répète-t-elle pas: «souviens-toi que tu as été étranger en Égypte …Les juifs de Suisse considèrent que l’attitude de l’UDC représente une atteinte de nos valeurs démocratiques et rejette cette campagne avec dégoût. Nous demandons le retrait de ces affiches. L’étranger a droit à notre respect et nous devons l’aider à s’intégrer de manière harmonieuse. »

Notons aussi que les juifs américains, objets de tant de fantasmes conspirationnistes, ont voté massivement pour Al Gore contre Bush en 2004 et à plus de 75% pour Obama, malgré la propagande le dépeignant en dangereux gauchiste dissimulant son identité musulmane.

 

MEMORIAL 98

 

 

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11 janvier 2010 1 11 /01 /janvier /2010 21:34
 
Nous avons alerté à plusieurs reprises et dès sa création, contre l'existence de ce ministère, qui par son nom même est un appel à la xénophobie ( voir nos articles précédents et notamment Identité nationale : comment l’idée vint à Eric Besson  Hortefeux : le retour du refoulé   Balladur et Sarkozy: de la préférence nationale à l'Identité nationale  Contre le ministère de la xénophobie  Guy Moquet et l'"identité nationale": contre la manipulation )
Le Pen ne cesse de se féliciter du lancement du "grandébat national" par Eric Besson qui ouvre un boulevard à ses idées.
C'est pourquoi nous apportons notre soutien à l'initiative de ceux qui déclarent (ci-dessous):
"Nous exigeons la suppression du ministère de l'Identité nationale et de l'Immigration"

Nous signons cet appel et vous demandons de le signer ici link
MEMORIAL 98
 

Télécharger l'appel au format PDF 

Promesse électorale de Nicolas Sarkozy, la création d’un ministère chargé de l'Immigration et de "l'Identité nationale" a introduit dans notre pays un risque d'enfermement identitaire et d'exclusion dont on mesure, chaque jour depuis deux ans et demi, la profonde gravité. Très officiellement, des mots ont été introduits sur la scène publique, qui désignent et stigmatisent l'étranger – et par ricochet, quiconque a l'air étranger. Réfugiés et migrants, notamment originaires de Méditerranée et d'Afrique, et leurs descendants, sont séparés d'un «nous» national pas seulement imaginaire puisque ses frontières se redessinent sur les plans matériel, administratif et idéologique.

Qu'a fait naître ce ministère ? De nouveaux objectifs d'expulsion d'étrangers (27 000 par an), des rafles de sans-papiers, l'enfermement d'enfants dans des centres de rétention, le délit de solidarité, l'expulsion des exilés vers certains pays en guerre au mépris du droit d'asile, la multiplication des contrôles d'identité au faciès, enfin la naturalisation à la carte, préfecture par préfecture, qui rompt avec le principe d'égalité...

Dans cette fissure de la République se sont engouffrés nos dirigeants. Par des propos inadmissibles dans une démocratie, banalisés et désormais quotidiens, ils légitiment tous les comportements et les paroles de rejet, de violence, et de repli sur soi. Nous ne sommes pas ici face à des "dérapages" individuels. En réalité, ces propos sont la conséquence logique d'une politique que le gouvernement souhaite encore amplifier sous le couvert d'un "débat" sur l'identité nationale. Nous sommes ainsi appelés à devenir coauteurs et coresponsables du contrôle identitaire sur la France.

La circulaire ministérielle adressée aux préfectures pour encadrer le débat lance une interrogation : "Pourquoi la question de l'identité nationale génère-t-elle un malaise chez certains intellectuels, sociologues ou historiens ?" La réponse est simple. Nous ne pouvons pas accepter que le regard inquisiteur d'un pouvoir identitaire puisse planer, en s'autorisant de nous, sur la vie et les gestes de chacun.

C'est pourquoi il est temps aujourd'hui de réaffirmer publiquement, contre ce rapt nationaliste de l'idée de nation, les idéaux universalistes qui sont au fondement de notre République.

Nous appelons donc les habitants, les associations, les partis et les candidats aux futures élections à exiger avec nous la suppression de ce "Ministère de l'Identité nationale et de l'Immigration", car il met en danger la démocratie.

Premiers signataires : Michel Agier (anthropologue, EHESS et IRD), Etienne Balibar (philosophe, université Paris-X et university of California), Marie-Claude Blanc-Chaléard (historienne, université Paris-X), Luc Boltanski (sociologue, EHESS), Marcel Detienne (historien, EPHE et université Johns Hopkins), Eric Fassin (sociologue, ENS), Michel Feher (philosophe, Paris), Françoise Héritier (anthropologue, Collège de France), Daniel Kunth (astrophysicien, CNRS), Laurent Mucchielli (sociologue, CNRS), Pap Ndiaye (historien, EHESS), Gérard Noiriel (historien, EHESS), Mathieu Potte-Bonneville (philosophe, Collège international de philosophie), Richard Rechtman (psychiatre, Institut Marcel Rivière, CHS la Verrière), Serge Slama (juriste, université d’Evry), Emmanuel Terray (anthropologue, EHESS), Tzvetan Todorov (historien, CNRS), Paul Virilio (urbaniste, Ecole spéciale d’architecture de Paris), Sophie Wahnich (historienne, CNRS) et Patrick Weil (historien, CNRS)

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1 janvier 2010 5 01 /01 /janvier /2010 21:52

L’article ci-dessous de Luiza Toscane illustre à quel point les états bafouent allègrement les garanties élémentaires dont disposent les citoyens.
La situation des Droits de l’Homme a connu en 2009 une aggravation dramatique  :

Gaza( voir nos articles Gaza: appel aux consciences La Paix Maintenant manifeste. Israël: le triomphe de Poutine? , Sri-Lanka (voir nos articles Sri Lanka: Tamouls en danger Sri Lanka : ONU silencieuse, régime impuni.) ,  Chine (voir nos articles Chine: la défaite, 20 ans après  Ouïgours : révolte et massacre) Caucase (voir notre article Russie: contre les assassinats Beaubourg 1er Février 15h ), Iran, Guinée, Bosnie( voir nos articles L'étrange procès de Florence Hartmann Bosnie:les parias de la solidarité )

Les grandes puissances pérorent et laissent faire, quand elles n’appuyent pas directement les massacreurs.

La France singulièrement présente un bilan terrible: à l’intérieur avec la xénophobie érigée en arme par le gouvernement( Morano : récidive d’une collaboratrice du Front National Hortefeux : le retour du refoulé , ) les expulsions d’Afghans vers leur pays en guerre ( Allez voir « Welcome » , "Welcome": Besson enrage et calomnie.) le “grandébat” sur l’Identité nationale( Identité nationale : comment l’idée vint à Eric Besson ,) la remise en cause de la presence de la CIMADE dans les centres de retention(voir nos articles Europe: contre l'enfermement des étrangers Sans papiers: le soutien criminalisé ;) à l’extérieur, la cooperation avec les dictatures revêt des aspects inattendus quand l’UMP signe un accord de cooperation avec le Parti communiste chinois, machine à réprimer et outil principal de la dictature. En Afrique , la France a fait élire le fils Bongo et P. Balkany, ami et conseiller de Sarkozy, defend D. Camara,  chef des massacreurs guinéens.

En 2010 nous poursuivrons notre combat contre l’impunité( notre premier article de 2009 relatait justement ce combat Tunisie: femmes victorieuses contre l’impunité)et le négationnisme, contre le racisme et l’antisémitisme.

Mémorial 98

 

 

 

Yassine Ferchichi, de nationalité tunisienne, terminait une peine de six ans et six mois, assortie d’une interdiction définitive du territoire français, dans une affaire de financement du terrorisme. Incarcéré à la prison de Fresnes, il avait appris récemment, peu de temps avant sa libération,  qu’il faisait l’objet de deux condamnations par contumace en Tunisie, prononcées en vertu des dispositions de la loi antiterroriste promulguée en 2003, totalisant trente-deux ans et six mois d’emprisonnement et quinze ans de contrôle administratif.

 Ayant déjà été soumis à de graves tortures, notamment à l’électricité, avant de quitter son pays, il a saisi l’Office Français pour la Protection des Réfugiés et Apatrides (OFPRA) d’une demande d’asile. L’OFPRA n’avait toujours pas répondu à la veille de sa libération, prévue le 24 décembre dernier.


Le 22 décembre, son conseil, le cabinet W.Bourdon, saisissait la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH), qui enjoignait aux autorités françaises de surseoir au renvoi de Yassine Ferchichi en Tunisie, en raison des risques graves de torture encourus.

Le 24 décembre, Yassine Ferchichi se voyait notifier le rejet de sa demande d’asile et était conduit dans la foulée de la prison de Fresnes à l’aéroport de Roissy-CDG afin d’être mis à bord d’un avion en partance le jour même pour le Sénégal.

Cette destination inattendue contournait et bafouait la décision de la CEDH notifiée la veille.

Son conseil saisissait immédiatement de nouveau cette cour, qui enjoignait cette fois-ci à la France de surseoir au renvoi de Yassine Ferchichi vers le Sénégal tant que des garanties n’auraient pas été fournies à la Cour quant au non renvoi de Yassine Ferchichi du Sénégal vers la Tunisie.

Passant outre à cette injonction, les autorités françaises n’ont pas fait descendre le requérant de l’avion, pourtant retardé en raison de la requête déposée.
Yassine Ferchichi a donc été renvoyé le 24 décembre au soir au à Dakar où il a été immédiatement gardé à vue, pour des raisons inexplicables, jusqu’au mardi 28 décembre.

Ce renvoi a, au passage, provoqué l’ire des autorités tunisiennes qui ont nié, une fois de plus, l’existence de la torture en Tunisie !

Le 28 décembre, il a été remis « en liberté » sur le territoire sénégalais, sans papiers d’identité, sans statut, sans ressources, mais sous surveillance policière, dans un pays où il n’a aucune attache.

De prisonnier, il est devenu un paria.

Depuis sa prison française, il avait rêvé de sa réinsertion et l’avait activement préparée. Seul son rapatriement en France mettra un terme à cette situation sans issue et dangereuse.

 

Luiza Toscane

 

 

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30 décembre 2009 3 30 /12 /décembre /2009 00:21

 

 

La réaction publique de Serge Klarsfeld face au processus de béatification du pape Pie XII qui demeura silencieux face à la Shoah (voir ici ) est choquante et inquiétante.

Pour ne pas risquer de travestir sa pensée, nous reproduisons intégralement ci-dessous son interview au Point, parue le 24 décembre 2009 :

 Lepoint.fr : Que pensez-vous de la prochaine béatification de Pie XII ?

S. Klarsfeld : C’est une affaire interne à l’Église ! Je pourrais presque dire que cette décision me laisse assez indifférent. Il n’y a aucune raison pour que Pie XII ne devienne pas saint ! En revanche, une chose me heurte davantage : la publication des lettres antisémites de Céline dans La Pléiade, chez Gallimard. Même si Céline est considéré comme un génie littéraire, je trouve cela choquant.

Et puis, si l’on parle beaucoup de Pie XII, pourquoi ne regarde-t-on pas aussi le général de Gaulle ? Il est considéré comme un saint en France ! Eh bien, lors de l’été 1942, après la rafle du Vel’ d’hiv, le général de Gaulle n’a pas élevé la voix. Pourtant, par la suite, de nombreuses autres rafles ont suivi, menées uniquement par des uniformes français et organisées par l’administration préfectorale ! Le général de Gaulle n’a pas élevé la voix pour avertir par exemple : ’Fonctionnaires, si vous arrêtez les juifs, vous serez arrêtés et traduits en justice !’

 

Quel est votre jugement sur la position de Pie XII pendant la Seconde Guerre mondiale ?

 

Pie XII a joué un rôle déterminant contre Hitler, mais aussi dans la lutte contre le communisme en Europe de l’Est. Le Polonais Karol Wojtyla, futur Jean-Paul II, est né de la volonté de Pie XII de lancer ce mouvement de résistance. Le rôle de Pie XII a aussi été diplomatique et idéologique : il a été le rédacteur de l’encyclique de 1937 condamnant le nazisme et publiée par son prédécesseur.

 Pourtant, on reproche à Pie XII son silence pendant la Shoah...

Tout cela est très difficile à apprécier. N’occultons pas que Pie XII a eu des gestes discrets et efficaces pour aider les juifs. Citons par exemple ce qui s’est passé à Rome. Un millier de juifs ont été arrêtés lors d’une rafle-surprise. Pie XII n’a pas protesté à voix haute, mais il a demandé aux établissements religieux d’ouvrir leurs portes. Résultat : des milliers de juifs ont pu être sauvés. Alors que si Pie XII avait élevé la voix, quelles auraient été les conséquences ? Est-ce que cela aurait changé les choses pour les juifs ? Probablement pas. Déjà, ses déclarations pour défendre les catholiques n’ont pas été entendues puisqu’en Pologne deux millions de catholiques ont été tués. Néanmoins, une prise de parole publique aurait sûrement amélioré la propre réputation de Pie XII aujourd’hui.

 Au sein du monde juif, certains sont plus virulents que vous...

Quelques-uns, comme moi, essaient de regarder quels étaient la réalité historique et le contexte de l’époque. En revanche, d’autres ne pensent pas une seconde aux milliers de catholiques tués, mais en priorité aux rabbins et aux juifs massacrés pendant la Shoah. Mais le pape, c’est avant tout le pape des catholiques. La priorité de Pie XII était de protéger les catholiques des régimes nazi et communiste.

 Alors que pensez-vous de cette polémique ?

Cette controverse ne me surprend pas. Elle me paraît assez normale dans la mesure où les archives du Vatican n’ont pas été ouvertes malgré des promesses. Il s’est quand même passé plus de 60 ans depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Les archives devraient être libres d’accès pour que l’on constate, par nous-mêmes, quels ont été les gestes et la réaction de Pie XII.

 En dehors des éléments concernant Céline (voir notre article précédent Sarkozy: une année dure et exigeante ) et De Gaulle, l’argumentation de Klarsfeld porte sur 3 points essentiels :

Un engagement de Pie XII contre le nazisme.

SK déclare que « Pie XII a joué un rôle déterminant contre Hitler » sans apporter aucun début de preuve dans ce sens. Si c’était vrai, cela constituerait pourtant une révélation historique bouleversante.

Au contraire, tous les historiens estiment que Pie XII, attaché à l’Allemagne et à la lutte contre le « bolchevisme », ne s’est absolument pas engagé contre les nazisme et à même cherché à  préserver l’Allemagne nazie de la défaite qui s’annonçait à partir de la fin de 1942 et de la capitulation de l’armée allemande à Stalingrad le 31 janvier 1943.

Dès  1964,  Saul Friedlander publie le livre  « Pie XII et le IIIe Reich, Documents » (éditions du Seuil) qui démontre amplement ce que fut l’attitude réelle de ce pape.

Notons ainsi que lors de son accession à la papauté en mars 1939, le premier ambassadeur qu’il reçut, de sa propre initiative, fut celui de l’Allemagne nazie. Puis il expédia immédiatement un courrier à Hitler lui-même en faisant assaut d’amabilités et de références à son attachement renouvelé à son séjour allemand prolongé en tant que nonce dans ce pays et négociateur du Concordat de 1933 avec le régime nazi.

 

SK développe une autre idée selon laquelle Pie XII n’avait au fond pas  à se préoccuper des Juifs, mais uniquement de l’avenir du catholicisme.

Ainsi le chef d’une Église qui se proclame universelle, qui commande à des millions de catholiques, de prêtres, d’évêques, n’aurait eu aucun devoir de sauvegarde à l’égard d’êtres humains ne faisant pas partie de sa chapelle. Cette position est d’autant plus monstrueuse que pendant des centaines d’années, l’Église et les papes ont diffusé la haine et le mépris des Juifs. 

Il ne s’agit pas ici d’un gourou local ou du chef d’un petite secte spirituelle mais d’un homme qui détient un pouvoir immense. Les nazis sont sensibles à ce pouvoir.

Quand l’Église d’Allemagne s’engagea contre l'euthanasie des malades, elle obtint rapidement gain de cause. L’évêque de Munster, Mgr Von Galen, explique en détail dans un sermon prononcé à l'église Saint Lambert de Münster, le 3 août 1941, comment on tue les malades innocents et comment on trompe les familles par des avis de décès falsifiés. Des copies du sermon furent distribuées dans toutes l'Allemagne et sur le front, parmi les soldats. Peu après le sermon du 3 août, Hitler donna l'ordre d'arrêter le programme d'euthanasie. L’évêque ne subit pas de répression.

Dans son ouvrage plus récent « L'Allemagne nazie et les Juifs » (Editions du Seuil) Saul Friedlander examine une nouvelle fois l'attitude de Pie XII face au IIIe Reich. Se demandant pourquoi Hitler n'a pas reculé dans ses plans d'extermination du peuple juif, comme il l'avait fait pour l'élimination des « aliénés », Friedlander trouve « une seule réponse vraisemblable : Hitler et ses acolytes devaient être convaincus que le pape ne protesterait pas ». Ainsi comme le proclame le panneau du musée Yad Vashem à Jérusalem accompagnant le portrait de Pie XII (voir ci-dessous le texte intégral de ce panneau) : « … son silence et l’absence de directives mit les gens d’Église de toute l’Europe dans l’obligation de réagir de leur propre initiative… »

La vraie  explication de la position de S. Klarsfeld réside peut être dans le troisième thème qu’il évoque et qui magnifie le combat de Pie XII contre le « communisme » en Europe. Klarsfeld paraît reprendre à son compte la principale motivation de Pie XII, qui choisit de ne pas condamner la barbarie nazie afin de ne pas affaiblir l’Allemagne, seul rempart contre le « bolchevisme ». Est-il nécessaire de rappeler que de très nombreux nazis ont pu s’échapper puis se recycler au nom de cette « lutte contre le communisme » ? C’est le cas notamment de Klaus Barbie, récupéré et protégé par l’armée américaine dès 1947 pour cette raison même.

Quand, à  partir de 1948, la France réclame l'extradition de Barbie, le Counter Intelligence Corps qui l’emploie refuse puis l’exfiltre vers l’Argentine avec le concours des réseaux d’évasion de l’Église. On connaît la suite et le combat victorieux de Serge et Beate Klarsfeld pour son extradition de Bolivie et son jugement.

Face à cette déclaration du fondateur de l’association des Fils et Filles des déportés juifs de France, on ne peut pas rester silencieux.

Nous avions déjà noté la complaisance de Serge Klarsfeld au moment de la controverse sur la repentance (voir notre article précédent Sarkozy: service minimum sur la Shoah et insultes pour les Africains)

Mais il s’agit ici d’une toute autre dimension qui nous fait craindre de nouvelles  dérives.

 

Albert Herszkowicz pour Memorial 98

 

Voici le texte qui figure sous le portrait de Pie XII au musée Yad Vashem à Jérusalem (Musée de la Shoah) :

 “La réaction de Pie XII au massacre des Juifs est objet de controverse. En 1933, alors qu’il était secrétaire d’État du Vatican, il prit une part active dans l’établissement d’un concordat avec le régime allemand pour garantir les droits de l’Église en Allemagne, même si cela signifiait la reconnaissance du régime nazi raciste.

Élu pape en 1939, il fit disparaître une lettre contre le racisme et l’antisémitisme préparée par son prédécesseur.

Même lorsque des rapports sur le massacre des Juifs parvinrent au Vatican, le pape ne protesta, ni verbalement, ni par écrit.

En décembre 1942, il s’abstint de signer une déclaration des Alliés condamnant l’extermination des Juifs.

Quand les Juifs furent déportés de Rome vers Auschwitz, le pape n’intervint pas.

Le pape conserva sa position de neutralité tout au long de la guerre, à l’exception, vers la fin, d’appels aux gouvernants de Hongrie et de Slovaquie.

Son silence et l’absence de directives mit les gens d’Église de toute l’Europe dans l’obligation de réagir de leur propre initiative”.

À propos du sauvetage des Juifs de Rome,  les responsables juifs d’Italie ont rappelé, suite à l’annonce de Benoît XVI, que « le train de 1021 déportés du 16 octobre 1943 est parti de Rome vers Auschwitz dans le silence de Pie XII ».

 

 

 

 

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21 décembre 2009 1 21 /12 /décembre /2009 00:23

Benoît XVI rend hommage à Pie XII

 

Mise à jour du 4 mars 2019 ( voir d'autres mises à jour à la suite de l'article, dont une réponse à Serge Klarsfeld )

Le pape François a annoncé, lundi 4 mars, que les archives secrètes du Vatican sur le pontificat de Pie XII (1939-1958) seraient ouvertes le 2 mars 2020, ce qui pourrait permettre de faire la lumière sur son (in)action pendant la Seconde Guerre mondiale.

De nombreux chercheurs réclament depuis des années de pouvoir examiner pourquoi Pie XII n'est pas plus intervenu contre la Shoah, "L'Eglise n'a pas peur de l'histoire", a affirmé François, en rappelant que Pie XII s'était retrouvé à la tête de l'Eglise "en un moment parmi les plus tristes et sombres du XXe siècle""J'assume cette décision (...), sûr que la recherche historique sérieuse et objective saura évaluer sous sa juste lumière, avec les critiques appropriées, les moments d'exaltation de ce pape et, sans doute aussi, les moments de graves difficultés, de décisions tourmentées, de prudence humaine et chrétienne", a-t-il ajouté. Alors que ses successeurs Jean XXIII (1958-1963), Paul VI (1963-1978) et Jean-Paul II (1978-2005) ont été canonisés, le procès en béatification de Pie XII, relancé en 2009 par Benoît XVI, est depuis au point mort en raison des controverses sur son rôle pendant la guerre.

Notons que la précédente déclaration d'ouverture de ces archives, en 1999, a constitué une tromperie avec de nombreux documents dissimulés par le Vatican, ce qui a conduit à une protestation des experts juifs et à leur départ en juillet 2001( voir récit ci-dessous). Face à ce précédent, une question se pose donc: pourquoi François fixe-t-il un délai d'un an avant l'ouverture de ces archives? S'agit-il de procéder à un toilettage des textes?

MEMORIAL 98

La décision de Benoît XVI de canoniser (déclarer comme saint) le pape Pie XII constitue une gifle non seulement pour les victimes juives de la Shoah, mais aussi pour toutes les victimes de violences racistes et de génocides.

Contrairement à la présentation médiatique influencée par les propagandistes de la papauté, il ne s’agit pas d’une obscure querelle entre le Vatican et les organisations juives, mais d’une question qui interpelle toute l’humanité : peut-on béatifier, ou même absoudre, une personne d’autorité, qui par son attitude permet que soient commis des génocides ou des crimes de masse ?

En effet, selon Benoît XVI, le pape Pie XII serait donc un saint. Or ce dernier était parfaitement averti du génocide nazi et a choisi de ne pas le dénoncer, Pour parfaire l’ignominie, Benoît XVI a fait annoncer sa décision un samedi, jour sacré de shabbat pour les Juifs. il s’agissait sans doute pour lui de retarder de vingt-quatre heures les protestations attendues de la part de ceux qui respectent le shabbat, mais on notera une fois de plus l’absence du plus élémentaire respect chez ce prélat réactionnaire.

Il l’avait déjà démontré abondamment, notamment par ses propos contre le préservatif lors de sa visite en Afrique, lors de son discours anti-islam à Ratisbonne, ou lors de la réintégration dans l’Eglise officielle de l’évêque négationniste Williamson il y a moins d’un an (voir nos articles précédents dont Benoît XVI et son évêque négationniste )

 

Le contexte d’émotion internationale après le vol récent  du panneau "Arbeit Macht Frei" à l'entrée du camp d'Auschwitz n’a pas davantage freiné la décision papale, mais sans doute le pape prétendra-t-il ne pas en avoir été informé, comme lors de l’affaire Williamson

Benoît XVI vient aussi de bafouer les promesses qu’il avait fait de retarder la décision concernant Pie XII jusqu’à l’ouverture des archives encore fermées du Vatican.

Il est en effet nécessaire de rappeler qu’une Commission internationale d’historiens juifs et catholiques, avait été instituée par les instances du Vatican, en octobre 1999. Ces experts devaient passer en revue les dix-huit volumes des « Actes et documents du Saint-Siège relatifs à la seconde guerre mondiale ». L'Eglise espérait ainsi lever la majorité des soupçons déshonorants qui pesaient sur Pie XII. Pourtant, un an, plus tard, les membres de cette Commission remettaient un rapport « accablant » sur l’attitude de l’Église pendant la Shoah. Les désaccords s’amplifièrent entre les experts juifs et ceux du Vatican, particulièrement le jésuite Peter Gumpel, qui prétendaient que les experts n’avaient pas étudié sérieusement les volumes en question. De leur côté ces historiens exigeaient des documents dont leur lecture des Actes en question leur avait révélé qu’ils n’avaient pas été mis à leur disposition.

En juillet 2001, lassés et irrités des difficultés, voire de l’obstruction auxquelles se heurtaient leurs demandes, les historiens juifs décidèrent de suspendre leurs travaux.

 

Pie XII et l'Allemagne

 

Pie XII a débuté sa carrière internationale à partir d’Avril 1917, en tant que nonce à Munich, alors que s’y déroulaient de violents affrontements entre la gauche et l’extrême-droite militaire et pré-nazie.

Sa correspondance d’alors avec le Vatican fourmille de références hostiles aux «juifs révolutionnaires ».

Plus tard il s’associe aussi à la campagne de dénigrement orchestrée par les nazis et reprise dans le "Mein Kampf " de Hitler, contre les soldats noirs de l’armée française, stationnés en Allemagne et qu’ils accusent de répandre la syphilis.

Le futur Pie XII appuie la protestation raciste et l’adresse au Vatican pour "supplier" Pie XI, le pape d’alors, d’agir au plus vite, afin de sensibiliser le monde à cette « honte noire », et d’obtenir des autorités françaises« le retrait des troupes françaises de couleur ».

Il revient sur ce thème durant la 2e guerre mondiale, le 26 janvier 1944, deux mois après le début de la campagne d’Italie. Alors que les armées alliées font route vers Rome, le pape Pie XII dépêche son Secrétaire d’Etat, le cardinal Maglione, auprès de l’ambassadeur de Grande-Bretagne, sir Osborne, pour lui présenter la requête suivante :

« Le pape espère qu’il n’y aura pas de soldats de couleur au sein des troupes alliées qui seront déployées à Rome après la libération ».

La demande du pape vise, non seulement les soldats afro-antillais et noirs américains, mais aussi algériens et marocains, soit une grande partie des troupes engagées dans la reconquête de Rome, alors aux mains des nazis. (In« Et si Dieu n’aimait pas les Noirs : Enquête sur le racisme aujourd’hui au Vatican  » Serge Bilé et A. Ignace, éd. Pascal Galodé).

 

 

Pie XII et la Shoah

 

Concernant la Shoah, le silence assourdissant de  Pie XII a eu des conséquences pratiques catastrophiques dans toute l’Europe: en Slovaquie et Croatie ce sont des dictatures catholiques dirigées qui ont mis en oeuvre la Solution Finale (voir notre article Danger négationniste à l'Est de l'Europe )

En France, la hiérarchie de l'Eglise catholique, qui en 1940 est au courant du statut des Juifs en préparation ne dit pas un mot. Pire, l’assemblée des cardinaux et des évêques se félicite en août 1940 des limites imposées aux Juifs du pays, et aucun membre de la hiérarchie n’exerça la moindre protestation concernant les statuts imposés aux Juifs d’octobre 1940 et de juin 1941.

C'est plus tard que des mouvements chrétiens et des prêtres s'engagèrent dans le sauvetage des Juifs, contrastant avec le silence et l'inaction de leur pape.

En Allemagne même, lorsque l’archevêque catholique de Berlin, Preysing, demanda à deux ou trois de ses collègues de préparer un texte de protestation, le chef de l’Eglise allemande, le cardinal archevêque de Breslau, Bertram, s’opposa au projet. Le même ordonnera en mai 1945 de dire des messes de requiem en l'honneur d'Hitler, qui venait de se suicider.

Pie XII n’était sans doute pas un antisémite forcené mais il se désintéressait totalement du destin de cette population. Bien qu’informé très précisément du sort des Juifs d’Europe, il s’abstint de protester pour ne pas embarrasser l’Allemagne nazie, en qui il voyait le seul rempart possible contre le "bolchevisme". Ce calcul diplomatique et politique le conduisit à garder le silence, alors qu’il prit ouvertement la parole pour évoquer le sort tragique des Polonais catholiques.

 Durant toute la guerre, il se tut. Il se contenta de balbutier quelques mots dans son message de Noël le 24 Décembre 1942, sans pour autant mentionner explicitement le sort des Juifs exterminés; il évoquait

« des centaines de milliers de personnes, qui, sans aucune faute de leur part, et parfois pour le seul fait de leur nationalité ou de leur race, ont été vouées à la mort ou à une extermination progressive»

 

Quatre mois auparavant, le 23 août 1942 l'Archevêque de Toulouse, Monseigneur Saliège, avait quant à lui condamné explicitement la persécution dans sa fameuse lettre pastorale de protestation, déclarant notamment " ... Dans notre diocèse, des scènes d’épouvante ont eu lieu dans les camps de Noé et de Récébédou. Les Juifs sont des hommes, les Juives sont des femmes. Tout n’est pas permis contre eux, contre ces hommes, contre ces femmes, contre ces pères et mères de famille. Ils font partie du genre humain. Ils sont nos Frères comme tant d’autres. Un chrétien ne peut l’oublier..."

Ainsi lorsque les Juifs de Rome furent massivement déportés en octobre 1943, l'ambassadeur du Troisième Reich auprès du Vatican, Von Weiszäcker, expédia une note à sa chancellerie, dans laquelle l'ambassadeur se félicitait que « bien que pressé de toutes parts, le Pape ne s'est laissé entraîner à aucune réprobation démonstrative de la déportation des Juifs de Rome [...] Il a également tout fait dans cette question délicate pour ne pas mettre à l'épreuve les relations avec le gouvernement allemand » (in Le Bréviaire de la haine  L. Poliakov. Livre de Poche réédité chez Presses Pocket en 1993)

 

À la fin de la guerre Pie XII couvrira les filières organisées par la haute hiérarchie romaine pour aider et évacuer les dignitaires nazis. Grâce à ces réseaux, dirigés par l’évêque Hudal, le curé croate Draganovic et le cardinal Montini, futur pape Paul VI, de très nombreux criminels tels que Eichman, Mengele, Aloïs Bruner, Stangl… et  le milicien Paul Touvier purent s’enfuir et échapper aux poursuites.

Pie XII a aussi ordonné à l’Église de France de ne pas rendre à leurs parents les enfants juifs cachés pendant la guerre, comme le prouve une lettre datée du 20 novembre 1946. Ces enfants avaient été confiés aux institutions catholiques pour les sauver des nazis, mais après la guerre, elles ont reçu pour consigne de ne les rendre sauf s’ils n’avaient pas encore été baptisés catholiques.

Cet ordre explicite figure dans le courrier adressé au nonce Roncalli, le futur pape Jean XXIII, qui représentait alors le Vatican à Paris et dont voici un extrait:

« Veuillez noter que cette décision a été approuvée par le Saint-père » souligne la lettre, faisant référence à Pie XII. Elle ordonne, entre autres choses, que les enfants baptisés « ne soient pas confiés à des institutions qui ne leur garantissent pas une éducation chrétienne. » Quant aux orphelins non baptisés, l’Église ne devait en aucun cas les confier « à des personnes qui n’ont pas de droits sur eux. »

 

Benoît XVI: un pape ultra-réactionnaire

 

En désignant Benoît XVI  la haute hiérarchie de l'Eglise  a fait le choix d'un pape déterminé à mener le combat du retour vers la tradition autoritaire du catholicisme. Il ne cesse de confirmer l'orientation « restaurationniste » et réactionnaire  qu'il entend donner à son pontificat.

Quand il n'était encore que le cardinal Ratzinger, Benoît XVI estimait déjà que le concile « rénovateur » Vatican II n'était qu'une parenthèse.

Il a ouvert la porte de l'Église à des intégristes membres de la Légion du Christ, de l'Opus Dei et à des traditionalistes.

Benoît XVI a, pendant l'été 2007, reçu à sa résidence de Castel Gandolfo le directeur de la radio antisémite polonaise Radio Marya (voir nos articles précédents dont Pologne: le gouvernement et les évêques pour la radio antisémite ) et l'a publiquement félicité pour "l'ensemble de son activité".
 Il a ainsi apporte un soutien marqué  au père  Rydzyk qui s'illustre par ses diatribes antisémites, homophobes, anti-IVG et xénophobes.

Le pape ne néglige pas la dénonciation de l'Islam. Ainsi lors de son fameux discours de Ratisbonne en 2006 il avait cité un auteur byzantin: « Montre-moi donc ce que Mahomet a apporté de nouveau, et tu y trouveras seulement des choses mauvaises et inhumaines... »

Sans doute avait-il préparé ce discours en recevant en septembre 2005, Oriana Fallaci, propagandiste de la dénonciation des musulmans. À la mort de cette dernière, le cardinal Ruini, bras droit du pape en Italie, en tant que président de la conférence épiscopale, avait rendu hommage à son "courage", sa "force morale" et son "engagement".

Son insensibilité à l’égard de la Shoah remonte à loin.

Alors que le futur pape est ordonné prêtre en Allemagne en 1951, six ans après la fin de la guerre et de la Shoah, il ne fait aucune allusion à cet événement dans sa réflexion religieuse et ses écrits en vue de la prêtrise. Sa proximité avec les courants catholiques intégristes le pousse à exiger lors de son déplacement à Paris en Septembre 2008 de porter des vêtements et objets liturgiques provenant de l'abbaye provençale du Barroux, dirigée par des prêtres d'extrême-droite.

Le processus de béatification de Pie XII est une infamie. On ne peut pas se contenter de déclarations.

Les organisations qui se réclament de la lutte contre le négationnisme et l’antisémitisme ont la responsabilité d’organiser une réelle campagne publique contre la décision du pape.

Memorial 98

 

Mise à jour du 30 décembre 2009:

Serge Klarsfeld prend position et relativise la responsabilité de Pie XII. Nous lui répondons.

http://www.memorial98.org/article-serge-klarsfeld-au-dela-du-respect-42017129.html

Actualisation du 25 juin 2016:

 

Dans la capitale arménienne Erevan, le pape François a dénoncé, vendredi 24 juin, le génocide des Arméniens en 1915/1916  sous l’Empire Ottoman, prononçant pour la deuxième fois ce mot jugé inacceptable par la Turquie.
 

« Cette tragédie, ce génocide a marqué malheureusement le début de la triste série des catastrophes immenses du siècle dernier », s’est exclamé au palais présidentiel le pape.

Le mot « génocide » ne figurait pas dans son texte distribué à l’avance. Le pape l’avait déjà prononcé une première fois au Vatican en avril 2015, déclenchant la colère du pouvoir turc.

Cette déclaration suit de quelques semaines le vote du Parlement allemand reconnaissant le génocide des Arméniens et le rôle négatif de l'Allemagne de l'époque. 

Cet engagement est positif. Il doit logiquement être suivi d'une démarche similaire à l'égard de la Shoah, car, comme le dit François, le génocide arménien a inauguré la série des "catastrophes". Depuis des dizaines d'années, le Vatican refuse d'ouvrir les archives et multiplie les obstacles à la recherche historique. Ces blocages doivent cesser.

Toute la lumière doit  être faite sur ce qu'a été réellement l'attitude du Vatican et de Pie XII face à ce génocide ( voir ci-dessus)

 

Voir nos articles précédents:

Benoît XVI appuie les intégristes antisémites en France

Les intégristes encouragés par le pape.

Négationnisme: révolte catholique contre Benoît XVI Benoît XVI et son évêque négationniste

Brochure antisémite polonaise au Parlement européen

Pologne: le gouvernement et les évêques pour la radio antisémite

Pologne: protestation catholique contre l’antisémitisme. Pologne: l'antisémitisme sévit au gouvernement 

Antisémitisme en Pologne: le scandale éclate! 

 

 

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16 décembre 2009 3 16 /12 /décembre /2009 23:07

 

Nadine Morano est une sarkozyste fervente. Ses propos sur « le jeune musulman » qui porte la casquette à l’envers et parle le verlan ne constituent pas un dérapage et encore moins un lapsus ; ils représentent en fait l’essence même de son discours politique (voir notre article précédent Hortefeux : le retour du refoulé )

Elle a d’ailleurs choisi de s’exprimer dans le cadre du débat sur l’Identité Nationale à Charmes, dans le département des Vosges. Cette commune  a été sélectionnée par l’organisateur de la soirée, le député (UMP) Jean-Jacques Gaultier, parce qu’elle est la ville natale de l’écrivain Maurice Barrès, symbole du nationalisme d’extrême-droite, antisémite et antidreyfusard enragé.

Lors de ce débat, le président de l’association locale Mémoire de Barrès avait d’ailleurs été invité à s’exprimer comme “grand témoin”. Il a défendu le “nationalisme de Barrès” par opposition au “cosmopolitisme “. Barrès affirma notamment en 1902, après que la justice ait reconnu que les « preuves » contre Dreyfus étaient fausses : "Je n'ai pas besoin qu'on me dise pourquoi Dreyfus a trahi. En psychologie, il me suffit de savoir qu'il est capable de trahir et il me suffit de savoir qu'il a trahi. L'intervalle est rempli. Que Dreyfus est capable de trahir, je le conclus de sa race…Quant à ceux qui disent que Dreyfus n'est pas un traître, le tout, c'est de s'entendre. Soit ! Ils ont raison : Dreyfus n'appartient pas à notre nation et, dès lors, comment la trahirait-il ? Les Juifs sont de la patrie où ils trouvent leur plus grand intérêt. Et par là on peut dire qu'un Juif n'est jamais un traître » In Maurice Barrès "Ce que j'ai vu à Rennes", Scènes et doctrines du nationalisme.

 Lors de sa campagne électorale de 2007 Sarkozy a plusieurs fois fait référence à Barrès. Ainsi dans son discours de Metz le 17 Avril 2007, il commence par invoquer sa mémoire: « et sur la colline inspirée de Sion, Barrès priait d’un même élan du coeur la Vierge, la Lorraine et la France et écrivait pour la jeunesse française le roman de l’énergie nationale ».

 Barrés est de nouveau appelé à la rescousse lors du meeting de Rouen le 24 Avril (voir notre article précédent  Sarkozy et le Front National: une liaison dangereuse)

 Lors de cette campagne présidentielle, Mme  Morano  a elle-même collecté des signatures d’élus pour permettre à  Le Pen de se présenter à l’élection. La consigne de Sarkozy était de manifester ainsi  sa bonne volonté à l’égard du dirigeant du FN et de ses électeurs. Le Canard enchaîné, jamais démenti depuis, l’indique explicitement dans son édition du 11 Avril 2007 : "En Meurthe-et-Moselle, par exemple, Nadine Morano, en bon petit soldat, réunit des maires ruraux début mars…nous étions cinq ou six à être désignés pour signer en faveur de Le Pen. Nadine nous a demandé d’envoyer nos parrainages non pas directement au Conseil constitutionnel, mais au siège du comité de soutien départemental de l’UMP. C’est elle, ensuite, qui les a emmenés à Paris raconte l’un d’eux"… » (voir notre article précédent N.Morano au gouvernement:appel à l'extrême droite)

Ce qui se joue actuellement autour de la campagne sur l’Identité Nationale ne se résume pas à  une succession de dérapages et de scandales dérisoires, mais constitue une tentative de replacer la nationalisme et la xénophobie au cœur des affrontements politiques.

MEMORIAL 98  

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6 décembre 2009 7 06 /12 /décembre /2009 22:11

 

 

 

Buisson avec Fillon et Sarkozy.

 

La scène fondatrice se déroule pendant la campagne présidentielle de 2007, lors d’une réunion de l’équipe de campagne de Sarkozy :

« …Le jeudi 8 mars 2007, face à la remontée de Ségolène Royal dans les intentions de vote du second tour, une prompte décision s’impose. Pourquoi ce “coup de mou” que rien ne laissait présager ?

L’analyse est fournie, une fois de plus, par Patrick Buisson (conseiller de Sarkozy issu de l’extrême droite ndlr) lors d’une réunion convoquée d’urgence.

"– Nicolas est en train de se notabiliser, attaque Buisson. J’y vois la conséquence du choix de Simone Veil pour présider le comité de soutien.

Puis, s’adressant à Sarkozy:

–  Tu as percé parce que tu incarnes une transgression par rapport aux tabous de la politique traditionnelle. Il faut, sans tarder, envoyer un signal fort à toutes les couches nouvelles qui ont déjà basculé dans ton camp ou qui sont prêtes à le faire. Or, le tabou des tabous, c’est l’immigration. La transgression majeure, elle est là. Pas ailleurs. Il faut en remettre un coup sur le thème de l’identité nationale.

–  Le silence, alors, est à couper au couteau.

–  Seul Guaino intervient pour soutenir Buisson. Puis, après un nouveau silence, Sarkozy lui-même :

Patrick a raison. Je vais proposer la création d’un ministère de l’Identité nationale. Quant à Simone, je la gère. Elle doit comprendre. Elle comprendra."

Eric Besson a lu et étudié ce passage du livre Histoire secrète de la droite, 1958-2008,  rédigé par des journalistes sarkozystes et dont est extraite le récit de cette scène.

Tout y est explicité : le cynisme avant tout, le désir de réécrire l’Histoire, de la manipuler au profit d’une victoire électorale tant attendue, sans hésiter à recourir à un imaginaire d’exclusion.

Le jeu avec le FN sert de paravent à une entreprise plus profonde et plus dangereuse, car venant du cœur du système de domination politique.

C’est la reprise du cri éternel de la droite nationaliste française : Dehors les métèques ! Juifs dans les années 30, Musulmans aujourd’hui, il s’agit de désigner un ennemi contre lequel se rassembler. Depuis 150 ans, les possédants ont découvert que la xénophobie leur fournissait une  arme efficace pour duper le peuple et le détourner des enjeux sociaux et économiques du moment.

Buisson le confirme en répliquant à Raffarin et en se félicitant des propos racistes de comptoir :  «la France d’en bas s’était saisie du sujet ! »

Dans une posture de continuité politique qui dépasse peut-être leur culture politique, Sarkozy, Fillon et leurs rédacteurs de discours ont d’ailleurs recours aux figures symboliques du nationalisme :  Maurice Barrès pour l’un et maintenant Jacques de  Bainville pour l’autre.

Le tableau est complété par l’utilisation de l’ex-socialiste Eric Besson,  dans un parallèle vertigineux avec les Marcel Déat et  Jacques Doriot, venus de la gauche pour se transformer en hérauts de la « Révolution nationale » pétainiste.

Au plan politique et symbolique c’est cette création d’un ministère de « l’immigration et de l’identité nationale » qui concrétise le plus ouvertement le recours à la  menace d’’ "envahissement " qui constitue depuis plus de cent ans la bannière  du nationalisme en France.

C’est pourquoi nous soutenons  les chercheurs qui ont lancé une fois de plus un appel à la  suppression de ce ministère : www.liberation.fr/.../0101606559-nous-exigeons-la-suppression-du-ministere-de-l-identite-nationale-et-de-l-immigration.

Mais au-delà, n’est-il pas temps que se rassemble le camp majoritaire de ceux et celles qui veulent en finir avec le racisme comme arme de division ? L’exemple venu d’Italie, avec ses centaines de milliers de manifestants réclamant la démission de Berlusconi, ouvre une perspective.

(voir aussi parmi de nombreux autres articles de notre site

Guy Moquet et l'"identité nationale": contre la manipulation, Balladur et Sarkozy: de la préférence nationale à l'Identité nationale,

Contre le ministère de la xénophobie,

Sarkozy et le Front National: une liaison dangereuse,

France-Tunisie: la manipulation sarkozyste décryptée,

Sarkozy: une année dure et exigeante )

Actualisation 24 novembre 2016:

Patrick Buisson soutient évidemment Fillon dans le cadre du 2eme tour de la primaire de la droite et salue sa "révolution conservatrice".

Il ajoute (Europe 1 le 24 novembre): " Fillon a fait une campagne de transgression des tabous".

C'est un terme codé qui signifie que Fillon a utilisé l'arme du racisme et de la dénonciation des musulmans. Ce sont exactement les mêmes mots que Buisson a utilisé en 2007 pour achever de convaincre Sarkozy d'annoncer "un ministère de l'Identité nationale" (voir -ci-dessus)

Buisson conseille aussi Laurent Wauquiez tout en se déclarant proche de Marion Maréchal Le Pen et De Villiers.

Il poursuit obstinément son projet de convergence de la droite et du FN sur ligne xénophobe et ultra-réactionnaire. La victoire récente de Trump, après celle du Brexit, renforce son propos.

 

MEMORIAL 98

 

 

    

 

 

 

 

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