Le maire de Marseille a dénoncé les démonstrations de joie des supporters de l'équipe d'Algérie après sa victoire contre l’Égypte, mi-novembre, dans des termes qui, tout à fait hors de propos, mettent en avant la question de l’Islam : « Nous nous réjouissons que les musulmans soient heureux du match, sauf que quand après ils déferlent à 15.000 ou à 20.000 sur la Canebière, il n'y a que le drapeau algérien et il n'y a pas le drapeau français, cela ne nous plaît pas".
Quel rapport avec les « musulmans » ? Gaudin reprend en fait le vocabulaire qui avait cours au temps de la colonisation en Afrique du Nord et singulièrement en Algérie, alors qu’il occulte totalement le fait colonial. Ce nouveau dérapage verbal d’un dirigeant de la droite (voir nos articles précédents Morano : récidive d’une collaboratrice du Front NationalHortefeux : le retour du refoulé ) est lié à un double contexte. D’une part il s’inscrit dans le « grandébat » sur l’Identité nationale, voulu par Sarkozy et Besson( Identité nationale : comment l’idée vint à Eric Besson ).
Au delà il renvoie à l’ambiguïté des dirigeants de la droite à l’égard du Front National, particulièrement dans les régions du Midi à forte implantation de pieds-noirs ( Sarkozy, Gaudin, Estrosi: l'ombre du Front National// Des "collègues" du FN à la tête de l'UMP .)
Dès 1986, Jean-Claude Gaudin, aujourd'hui vice-président du Sénat et de l’UMP, a constitué une alliance politique avec le Front National afin d’être élu à la tête de la région PACA. Il a géré de concert la région avec le parti d’extrême-droite jusqu'en 1992, à coup de nominations et de désistements réciproques lors des échéances électorales.
Cette gestion commune a servi de laboratoire et de "modèle" à d’autres dirigeants régionaux de la droite qui ont finalisé leurs accords avec le FN lors des élections régionales d’avril 1998
Gaudin a ensuite récupéré de nombreux cadres et élus FN locaux de sa région, rebaptisés par lui « droite républicaine » sans qu’ils aient rien changé de leurs idées et de leurs pratiques.
Un des fleurons de ce recyclage est Daniel Simonpieri, maire de la ville de Marignane qu'il a conquise en 1995 sous l'étiquette du FN, puis intégré par Gaudin à l'UMP en 2004, et dont il a imposé l’investiture au nom de l’UMP pour les municipales de 2008.
Le député UMP de la circonscription, Eric Diard, a protesté et rappelé que Simonpieri avait inauguré dans sa ville une stèle en hommage aux généraux putschistes d'Algérie et aux membres de l’OAS.
Ses protestations n’ont pas pesé face au choix de Gaudin qui préside aussi la commission nationale d’investiture de l’UMP. Diard a refusé cette investiture et présenté une liste qui a largement devancé celle de Simonpieri
Ce dernier avait déclaré au lendemain du premier tour de la présidentielle de 2007:
«Beaucoup d'électeurs FN ont constaté que Nicolas Sarkozy disait les mêmes choses que Le Pen, mais que lui avait une chance de les mettre un jour en application. Ils ont donc voté utile. Parce qu'ils ont cessé de croire à l'accession de Le Pen au pouvoir» (cité dans Le Canard enchaîné du 25 Avril 2007).
Dans la période récente, Gaudin s’est illustré en prenant la défense de Philippe de Villiers lors du ralliement de celui-ci à Sarkozy (voir notre article De Villiers et son faux témoin ).
Le profil patelin de Gaudin et les dénonciations dont il est maintenant l’objet de la part de l’extrême-droite ne peuvent pas dissimuler qu’il utilise sans réticence des thématiques xénophobes.
MEMORIAL 98