L'association MEMORIAL98, qui combat contre le racisme, l'antisémitisme et le négationnisme a été créée en janvier 1998, lors du centenaire de l'affaire Dreyfus.
Son nom fait référence aux premières manifestations organisées en janvier 1898, pendant l'affaire Dreyfus, par des ouvriers socialistes et révolutionnaires parisiens s'opposant à la propagande nationaliste et antisémite.
Ce site en est l'expression dans le combat contre tous les négationnismes
(Arménie, Rwanda, Shoah ...)
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Retrouvez aussi le quotidien de l'info antiraciste sur notre blog d'actus :
A la veille de la commémoration du 93eme anniversaire du génocide arménien, une initiative de parlementaires israéliens vise à faire enfin reconnaître ce génocide.
Une motion dans ce sens a été déposée au Parlement, comme chaque année, par le parti de gauche Meretz et a pour la première fois elle a été votée, sans que le gouvernement puisse s’y opposer. Elle va maintenant être examinée en commission.
Les votes de reconnaissance des parlements de France et des USA ont certainement pesé dans la balance Les motivations de la motion parlementaire indiquent « qu’il est inacceptable que le peuple juif ne se fasse pas entendre à propos de ce génocide ».
Le régime turc a immédiatement réagi en dépêchant en Israël le président de la commission des affaires étrangères et de la défense du parlement turc, Hasan Murat Mercan. Celui-ci demande au gouvernement de faire annuler le débat à la Knesset (parlement) ; il fait planer la menace d’une tension entre les deux pays, si le débat parlementaire a lieu et à fortiori si la reconnaissance du génocide est décidée.
Le régime turc met en balance son rôle d’allié régional d’Israël et d’intermédiaire avec des gouvernements arabes.
Le représentant du Premier ministre israélien s’en est tenu à la position traditionnelle selon laquelle il s’agirait avant tout d’un « débat historique » à régler par le « dialogue » entre la Turquie et l’Arménie. Ce mauvais prétexte, sera sans doute remis en cause par la débat ouvert au Parlement. (Voir aussi notre précédent articleIsraël doit reconnaître le génocide arménien )
Ce même anniversaire du génocide sera marqué à Paris par une initiative intitulée
"1915/2008 : Les génocides vous regardent Arméniens, Juifs, Tutsis, Darfouris : un mur contre le déni"
Le dimanche 27 avril 2008 de 10h à 19h, sur le Parvis de Notre-Dame de Paris, le Collectif VAN [Vigilance Arménienne contre le Négationnisme] rendra hommage aux victimes des génocides arménien, juif et tutsi ainsi qu’à celui qui risque d’être le premier génocide du XXIème siècle : l’extermination en cours au Darfour.
Un mur sera dressé pour dénoncer le négationnisme dont ces génocides font l’objet. Le public sera invité à apposer sur le mur, un symbole de la vigilance face au déni. Les stèles de la vigilance arménienne contre le négationnisme et la stèle en hommage au journaliste arménien de Turquie Hrant Dink, assassiné le 19 janvier 2007 à Istanbul, complèteront ce dispositif de sensibilisation aux génocides et à leur négationnisme.
L’association Memorial 98 soutient cette action et appelle à y participer.
Le 7 avril a été déclaré « Journée Internationale de Réflexion sur le génocide des Tutsi au Rwanda » par la 58ème Assemblée Générale des Nations Unies
Commémorations du Lundi 7 Avril 2008
PARIS Programme de la 14ème Commémoration du génocide des Tutsi du Rwanda : Paris le 7 Avril 2008 de 16 à 22h00
1- de 16h à 17h30 : Rassemblement sur le Parvis des droits de l’homme, place du Trocadéro sur le thème «Oublier, nier valent complicité ».
2- Cérémonie du Souvenir Adresse : 57, Rue Traversière, 75012 Paris Accès : Gare de Lyon : sortie 1 Bruxelles : Marche du Souvenir et Soirée de la Mémoire
1994-2008 : 14e Commémoration du Génocide des Tutsi commis au Rwanda en 1994
• 19h00 : Marche du Souvenir
De la Place Royale jusqu’au Palais de Justice (Place Poelaert)
• 20h00 : Départ vers le Centre culturel d’Auderghem
Boulevard du Souverain, 183 1160 Bruxelles
20h30 : Soirée de la Mémoire au Centre culturel
• Allocution d’ouverture, par Dr P. Kalisa, Président d’IBUKA
Témoignage d’un survivant du génocide des Tutsi
Messages de solidarité Chants et poêmes de circonstance
Chaque 7 avril, un nouveau numéro de la revue La Nuit Rwandaise, dont le thème, identique chaque année, est « l'implication française dans le génocide des Tutsi du Rwanda », se propose de faire le point sur les éléments récents relatifs à cette question d'une très grande importance. Enquêtes, analyses, événements, polémiques sont signés par des spécialistes reconnus de la question afin que les lecteurs disposent d'une information de grandes qualité et précision.
Le 7 avril 2008, le numéro 2 de La Nuit rwandaise sera disponible.
Vous pourrez alors la commander sur Internet ou l’acheter dans toutes les bonnes librairies. Chaque année, La Nuit rwandaise fait le point de ce que l’on peut savoir sur l’implication française dans le dernier génocide du XXème siècle, l’extermination des tutsis du Rwanda.
Pour cette deuxième livraison, La Nuit rwandaise entend revenir sur les récentes prises de position de la majorité aujourd’hui au pouvoir en France, par la voix du Président de la République qui aura déclaré à répétition, pendant la campagne électorale et après, « la France n’a pas commis de génocides », comme par celle de l’actuel ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, qui peu avant d’entrer en fonction pouvait écrire « l’armée française n’a ni organisé ni participé au génocide » de 1994.
La Nuit rwandaise entend également faire le point des diverses publications intervenues cette année, comme de l’ensemble des débats. De Jean Chatain à Jean Hatzfeld, nous examinerons les bons et les mauvais services rendus à la vérité.
Nous rendrons compte également du rapport de la commission rwandaise qui a examiné à son tour la responsabilité française, comme de l’état des procédures judiciaires, devant le Tribunal d’Arusha comme en France.
Nous appelons tous ceux qui travaillent à un titre ou un autre sur cette question de la responsabilité française à apporter leurs contributions.
Parce que, quatorze ans après les faits, la vérité est encore un combat.
Après la défaite de la droite aux élections municipales, Sarkozy se tourne à nouveau vers le discours sécuritaire et xénophobe qui a constitué le cœur de son succès ( voir notre article précédent Sarkozy: une année dure et exigeante) Il fait ainsi entrer au gouvernement la députée UMP Nadine Morano, qui s’est illustrée par des prises de position particulièrement réactionnaires et un style délibérément agressif. La promotion de Morano est avant tout un message à l’électorat proche du FN, qui a massivement soutenu Sarkozy lors de la présidentielle. Elle a d’ailleurs elle même collecté des signatures pour permettre à Le Pen de se présenter à cette élection. La consigne de Sarkozy était de manifester ainsi sa bonne volonté à l’égard du dirigeant du FN et de ses électeurs. Le Canard enchaîné, jamais démenti depuis, l’indique dans son édition du 11 Avril 2007 : "En Meurthe-et-Moselle, par exemple, Nadine Morano, en bon petit soldat, réunit des maires ruraux début mars; “Nous étions cinq ou six à être désignés pour signer en faveur de Le Pen. Nadine nous a demandé d’envoyer nos parrainages non pas directement au Conseil constitutionnel, mais au siège du comité de soutien départemental de l’UMP. C’est elle, ensuite, qui les a emmenés à Paris raconte l’un d’eux"… » Récemment, N.Morano a de nouveau fait du zèle à propos de la rétention de sûreté. Après les critiques de la gauche contre cette mesure, elle a déclaré : "Je laisse le soin aux Français de juger le Parti Socialiste qui se met clairement du côté des assassins et oublie toutes les victimes. C'est irresponsable de jouer avec la sécurité des Français". Elle s’est aussi spécialisée dans la mise en cause de Fadela Amara, qu’elle a abondamment brocardée et insultée. Un autre entrant au gouvernement est H.Falco maire de Toulon, là où Sarkozy est allé entre les deux tours des municipales prononcer un discours sur l’immigration « maîtrisée » pour mobiliser les abstentionnistes de droite.
Pour aider Gaudin et Estrosi, Sarkozy refait campagne contre les immigrés.
Face à la défaite électorale de son parti au premier tour des élections municipales, N. Sarkozy a fait le déplacement de Toulon pour y reprendre son thème fétiche de l’immigration. Au delà du contenu habituel de son discours, c’est la symbolique qui importait. D’abord par le choix de la ville de Toulon, auparavant dirigée par le FN et toujours dominée par une culture de la nostalgie coloniale et militaire ; c’est d’ailleurs à Toulon que Sarkozy prononça le 7 Février 2007 un discours aux accents xénophobes ( voir sur www.ldh-toulon.net/spip.php?article1838 -) La présence à ses côtés de Brice Hortefeux, l’homme aux 25000 expulsions, confirmait cette symbolique. Il s’agissait aussi pour Sarkozy d’apporter une aide spécifique à deux candidats UMP de la région : Gaudin à Marseille et Estrosi à Nice. Ceux-ci se présentent aujourd’hui comme des modérés, quasiment centristes mais ils ont une longue pratique de coopération avec le Front National. JC Gaudin, actuel maire de Marseille a, dès 1986, fait alliance avec le Front National pour être élu à la tête de la région PACA. Il a géré ensemble la région avec le parti d’extrême-droite jusqu'en 1992, à coup de nominations et de désistements réciproques lors des échéances électorales. Cette gestion commune a servi de laboratoire et de "modèle" à d’autres dirigeants régionaux de la droite qui ont finalisé leurs accords avec le FN lors des élections régionales d’avril 1998. En 1998, le même Gaudin organisait la scission de l’UDF car ses instances refusaient l’alliance avec le FN et créait le parti Démocratie Libérale notamment avec Madelin et Raffarin. Gaudin a ensuite récupéré de nombreux cadres et élus FN locaux, rebaptisés par lui « droite républicaine », sans avoir rien changé de leurs idées et de leurs pratiques. Un des fleurons de ce recyclage est Daniel Simonpieri, maire de Marignane qu'il a conquis en 1995 sous la bannière FN, intégré à l'UMP par Gaudin en 2004, et dont il a imposé l’investiture au nom de l’UMP pour les municipales de 2008. Le député UMP de la circonscription,Eric Diard, a protesté et rappelé que Simonpieri avait inauguré dans sa ville une stèle en hommage aux généraux putschistes d'Algérie et aux membres de l’OAS. Ses protestations n’ont pas pesé face au choix de Gaudin qui préside aussi la commission nationale d’investiture de l’UMP. Diard a refusé cette investiture et présenté une liste qui a largement devancé celle de Simonpieri Ce dernier avait déclaré au lendemain du premier tour de la présidentielle de 2007: «Beaucoup d'électeurs FN ont constaté que Nicolas Sarkozy disait les mêmes choses que Le Pen, mais que lui avait une chance de les mettre un jour en application. Ils ont donc voté utile. Parce qu'ils ont cessé de croire à l'accession de Le Pen au pouvoir» ( cité dans Le Canard enchaîné du 25 Avril 2007).
Christian Estrosi quand à lui, se présente comme un grand ami de la communauté juive ; il avait été jusqu’à déclarer en Novembre 2007 que «Sarkozy est le candidat naturel des électeurs juifs» Pourtant en avril 1998 lors de la grande vague d’alliances entre la droite et le FN dans les conseils régionaux, c’est ce même Estrosi qui a mené une bataille dure pour une telle alliance en région PACA, finalement empêchée par la révélation de ces manœuvres et par la résistance de dirigeants locaux de la droite, tel François Léotard . Dans un entretien à Minute du 11 mars 1998, Estrosi avait d’ailleurs annoncé : « Dire "moi je suis là pour empêcher M. Le Pen d'exercer des responsabilités parce qu'il est xénophobe" ne me semble pas la meilleure méthode pour être crédible et efficace» Le recyclage des idées et des hommes du Front national est toujours d’actualité à l’UMP.
Au-delà du tollé, totalement justifié, provoqué par la déclaration de Sarkozy sur la charge qu'il veut attribuer aux élèves de CM2 de perpétuer la mémoire des enfants juifs assassinés pendant la Shoah, il est nécessaire de tenter de comprendre les raisons de cette étrange proposition, qui en effet « glace le sang » comme l’a dit Simone Veil.
Elle a notamment ajouté: " ... cette proposition est "inimaginable, insoutenable, dramatique et surtout, injuste". "On ne peut pas infliger ça à des petits de 10 ans, on ne peut pas demander à un enfant de s'identifier à un enfant mort, souligne-t-elle, cette mémoire est beaucoup trop lourde à porter. [...] "
Il y a bien sûr la recherche d‘annonces spectaculaires et « émouvantes » selon l’expression de Sarkozy, particulièrement dans le contexte de la réunion du CRIF et au lendemain du dérapage de son épouse Carla Bruni , comparant un article du Nouvel Observateur à la dénonciation des Juifs sous Vichy.
Mais au-delà de cette agitation à visée médiatique, les trois éléments de fond qui peuvent expliquer la succession de dérapages du chef de l’État sont : 1) Son refus de ce qu'il nomme avec mépris la « repentance », incluant la participation des autorités françaises à la déportation, le conduit à se placer par substitution sur le terrain plus avantageux de l’émotion. C’était déjà le cas pour la lecture de la lettre de Guy Moquet. Le refoulement de la responsabilité politique et de la simple reconnaissance de la vérité historique débouche ainsi sur la « responsabilisation » morale d’enfants de dix ans. 2) Sa légèreté d’analyse sur ce fut le nazisme, apocalypse ultra-réactionnaire et exterminatrice assimilé à une « folie », doublé d’un mépris affiché pour l’effort de compréhension de l’antisémitisme. Sarkozy a ainsi jugé que les recherches sur les différentes variantes idéologiques de l’antisémitisme "aboutissent parfois à le banaliser". 3) Sa remise en cause constante de la laïcité de l’État et une orientation délibérément communautariste.
Sur le refus de la repentance, il faut se référer au fameux discours de Sarkozy à Nice le 30 mars 2007, en plein durcissement de sa campagne électorale présidentielle, quelques jours après les incidents de la Gare du Nord : « ...Je veux redonner à tous les Français la fierté d'être Français. Je veux leur dire qu'ils auront à choisir entre ceux qui assument toute l'Histoire de France et les adeptes de la repentance qui veulent ressusciter les haines du passé en exigeant des fils qu'ils expient les fautes supposées de leur père et de leurs aïeux. Je suis de ceux qui pensent que la France n'a pas à rougir de son histoire. Elle n’a pas commis de génocide. Elle n'a pas inventé la solution finale. Elle a inventé les droits de l'Homme et elle est le pays du monde qui s’est le plus battu pour la liberté… Je veux dire que dans les colonies, tous les colons n'étaient pas des exploiteurs… Je veux dire aux Français que le 22 avril et le 6 mai, ils auront à choisir entre ceux qui sont attachés à l'identité nationale et qui veulent la défendre et ceux qui pensent que la France a si peu d'existence qu'elle n'a même pas d'identité… »
Si Sarkozy voulait réellement s’attacher à défendre la mémoire de la Shoah en France, il commencerait par désavouer et retirer ce discours qui refusait explicitement de reconnaître une quelconque responsabilité des autorités françaises (et non des Français individuellement) dans la mise en œuvre de la déportation. Ce refus est d’autant plus choquant, que dans le cas des enfants, ce sont les dirigeants de l’État français qui ont demandé aux autorités nazies de les déporter.
En mai 1942, Laval ordonne à la police française d'arrêter les juifs de France afin de les déporter. Alors même que les Allemands ne demandaient pas l'inclusion des enfants de moins de 16 ans dans les convois, il insiste pour les ajouter aux trains de déportation. Sollicité de revenir sur cette décision, notamment par le pasteur Boegner, chef des protestants de France, il refuse et répond : « Pas un seul de ces enfants ne doit rester en France. Je lui parlais massacres », rapportera Boegner, « il me parlait jardinage»(Wikipédia) Ce sont les gendarmes et les policiers français qui ont raflé les enfants juifs. D’ailleurs dans le discours au CRIF (disponible sur le site de l’Élysée), Sarkozy accumule les contradictions sur ce point ; il commence par déclarer « …À l’heure où s’abattaient en Europe les idéologies les plus criminelles, c’est un fait que la République d’alors vous a trahis… » puis quelques phrases plus loin « …Même en 1940, quand Vichy édictait l’immonde statut des Juifs, vous saviez que la République n’était pas dans ce crime et que la France éternelle était plus grande que sa faute du moment … » Cette confusion contraste avec la clarté de la position officielle du discours présidentiel de Chirac en 1995 : "...Ces heures noires souillent à jamais notre histoire et sont une injure à notre passé et à nos traditions. Oui, la folie criminelle de l'occupant a été, chacun le sait, secondée par des Français, secondée par l'État français. La France, patrie des Lumières, patrie des Droits de l'homme, terre d'accueil, terre d'asile, la France, ce jour-là, accomplissait l'irréparable..."
Dans l’esprit de Sarkozy, le nazisme est cantonné au « mystère allemand ». Dans son fameux dialogue philosophique avec Michel Onfray (paru dans Philosophie- Magazine n° 8 de mars 2007), il insiste: "… Qu'un grand peuple démocratique participe par son vote à la folie nazie, c'est une énigme. Il y a beaucoup de nations à travers le monde qui traversent des crises sociales, monétaires, politiques, et qui n'inventent pas la solution finale ni ne décrètent l'extermination d'une race. Mieux vaut admettre qu'il y a là une part de mystère irréductible plutôt que de rechercher des causes rationnelles." Dans son discours au CRIF, Sarkozy a même explicitement rendu hommage à la « repentance’ , en l’occurrence celle de l’allemand Willy Brandt s’agenouillant devant le monument du Ghetto de Varsovie. Notons que Willy Brandt qui a été déchu de sa nationalité allemande par le régime nazi dès 1938 et ne s’est pas extrait pour autant de la nécessité d'un retour authentique sur la mémoire. La repentance est donc pour Sarkozy une bonne démarche mais à usage exclusivement allemand. Le nazisme est pour lui, de manière répétée, placé au même plan que le communisme et constitue une "folie" exclusivement germanique due à «… la redoutable absence de l’idée de Dieu… » (discours au CRIF).
A cette confusion à visée nationaliste, s’ajoute une imposture répétée dans laquelle Sarkozy et ses proches exploitent le sort des Juifs dans des comparaisons choquantes. C’est Sarkozy lui-même qui pour défendre la « dépénalisation du droit des affaires » le 30 août dernier devant le Medef, a recours à la formule suivante : « A quoi sert-il d'expliquer à nos enfants que Vichy, la collaboration, c'est une page sombre de notre histoire, et de tolérer des contrôles fiscaux sur une dénonciation anonyme, ou des enquêtes sur une dénonciation anonyme ?... » C’est Madame Sarkozy-Bruni déjà citée ( voir plus haut). C’est aujourd’hui même le ministre Karoutchi qui, dans le 4eme arrondissement de Paris, à deux pas du Mémorial de la Shoah compare les critiques envers Sarkozy à du « fascisme rampant » et évoque la mémoire de jean Zay « mi-juif, mi-protestant » attaqué par la presse de Vichy puis assassiné par la Milice en 1944.
Ces gens sont dangereux ; on ne peut pas laisser Sarkozy continuer à manipuler la Shoah et à tenter de dicter le contenu de l’Histoire.
Encore une banalisation de la persécution des Juifs, après celle de Nicolas Sarkozy devant le Medef.
Interrogée par l’Express du 13 février 2008 sur la plainte déposée par Nicolas Sarkozy contre le site Internet du Nouvel Obs - qu'il accuse de "faux" à propos d'un SMS, Carla Bruni Sarkozy déclare : « La plainte justifiée de mon mari n'est pas contre un organe de presse, bien sûr, mais contre les "nouveaux moyens de désinformation". Internet peut être la pire et la meilleure des choses. A travers son site Internet, Le Nouvel Observateur a fait son entrée dans la presse people. Si ce genre de sites avait existé pendant la guerre, qu'en aurait-il été des dénonciations de juifs?... »
Cette déclaration pourrait n’être qu’une démonstration de narcissisme exacerbé ou une manifestation de l’absence totale du sens de la mesure, ainsi qu'un signe de la confusion des esprits, car elle ne provoque aucun réaction du journaliste qui réalise l'interview.
Mais il se trouve que Nicolas Sarkozy a commis il y a quelques mois un dérapage semblable, tendant à banaliser la délation envers les Juifs sous le régime de Vichy, comparée et assimilée à la dénonciation de délits fiscaux.
Pour défendre la « dépénalisation du droit des affaires » (terme pudique pour l’impunité garantie aux patrons, mêmes voyous) lors de l’université d’été du Medef le 30 août dernier, il avait utilisé la formule suivante :
« A quoi sert-il d'expliquer à nos enfants que Vichy, la collaboration, c'est une page sombre de notre histoire, et de tolérer des contrôles fiscaux sur une dénonciation anonyme, ou des enquêtes sur une dénonciation anonyme ? ». Il avait été applaudi frénétiquement par son auditoire patronal, absolument ravi par cette scabreuse comparaison.
Nous écrivions alors (Voir notre article précédentSarkozy: nouveau dérapage sur Vichy ) :
"Le drame de Vichy et de la collaboration ne réside pas essentiellement dans la forme des dénonciations et leur anonymat mais leur contenu et les « lois » barbares auxquelles elles faisaient référence. On y dénonçait les Juifs parce que Juifs et on les envoyait ainsi vers la mort.
Comment peut-on, même par démagogie, comparer cette époque terrible et la situation actuelle ? Peut on mettre en parallèle, comme le fait Sarkozy, la déportation des Juifs et un contrôle fiscal ? Comment cette image a-t-elle pu figurer dans un discours officiel et de telles paroles être prononcées par un président de la République ? Pourquoi il y a-t-il si peu de réactions? Qu'on imagine le scandale si Le Pen avait osé une telle déclaration."
Il s’agit en effet d’une rhétorique qu’on trouve habituellement dans la presse d’ extrême droite ou lors des « dérapages » de ce genre.
Ainsi en 2002 en Allemagne, le dirigeant démocrate-chrétien Koch avait provoqué un tollé en rapprochant le sort des personnes fortunées sous un gouvernement de gauche, avec celui des Juifs sous le nazisme, car ces deux catégories étaient selon lui pareillement stigmatisées par une étoile jaune. Il s’était excusé et avait retiré ses propos.
Sarkozy quant à lui n’a manifestement pas l’intention de revenir sur ce parallèle révisionniste. Mais faisons silence, semblent dire les médias aux ordres, car il ne faut surtout pas "diaboliser" le président actuel.
Ce commentaire sur la comparaison "révisionniste" de Sarkozy s'applique également à la référence reprise par Mme Sarkozy-Bruni. Elle a été contrainte de excuser depuis d'avoir comparé le Nouvel Observateur à "la presse collaborationniste" ( voici sa déclaration publiée sur le site Internet de l'Express:"... Dans l'édition d'aujourd'hui, 13 février 2008, L'Express me consacre une longue interview, au cours de laquelle j'ai comparé, à tort, les méthodes employées dans les sites internet avec celles employées par la presse collaborationniste...")
L'interrogation demeure: comment une telle formule délétère a-t-elle pu être maintenue, alors que le directeur de l'Express relate que l'interview a été relue et amendée à de nombreuses reprises par Carla Bruni et son entourage ?
Nous publions un article historique de l’association Mémorial 98 paru en Juin 1998 dans la revue Mauvais Temps ( éditions Syllepse).
Ce texte intitulé « Un siècle de combats contre l’antisémitisme » rend compte de la fondation de l’association et de sa première activité publique le 17 janvier 1998.
Ce jour là, l’association organisait une journée d’étude retraçant notamment la mobilisation du 17 janvier 1898 au cours de laquelle des militants socialistes et anarchistes parisiens prirent d’assaut un meeting antisémite.
En ce cent dixième anniversaire, ce texte garde toute son actualité
Memorial 98
1) Le centenaire de la parution du J'accuse de Zola a donné lieu à de nombreuses commémorations et prises de position. On connaît moins l'engagement des militants de gauche qui se jetèrent très tôt dans la bataille pour la défense de Dreyfus, contre l'antisémitisme et le nationalisme.
Le 17 janvier 1898, quatre jours après la publication par Émile Zola de son J'accuse, protestant contre la condamnation de Dreyfus, au paroxysme de ce qu'il était alors convenu d'appeler l'Affaire, les antisémites ripostaient violemment. Dans toute la France des cortèges pogromistes déferlaient sur les quartiers juifs aux cris de « Conspuez Zola! » et de « Mort aux juifs! ». A Paris une réunion publique était programmée par l'aile la plus dure de l'antidreyfusisme, dans la salle dite du Tivoli‑Vauxhall; plusieurs milliers de personnes s'y pressaient.
Une centaine de militants ouvriers parisiens, allemanistes et anarchistes principalement, vinrent apporter une contradiction musclée à ce meeting. Les orateurs prévus dont Dubuc, président de la jeunesse antisémite, Jules Guérin, président de la Ligue antisémitique de France et directeur de L'Antijuif, ne purent ce soir là déverser leur poison en toute liberté. L'estrade fut prise d'assaut et la grande messe antijuive tourna court.
Cette action connut à l'époque un important retentissement; elle figurait en première page de tous les quotidiens parisiens et fut fièrement revendiquée par ses initiateurs. Ce sursaut fut, dans le mouvement ouvrier de l'époque, la première réaction publique de rejet de l'antisémitisme, alors que l'extrême droite tentait comme aujourd'hui, souvent dans les mêmes termes, d'orienter sa propagande vers les milieux populaires.
Un siècle, jour pour jour après ces événements, l'association Mémorial 98 a voulu rendre hommage à ces pionniers de la lutte antiraciste et réfléchir à cette occasion aux rapports entre le mouvement ouvrier et le combat contre l'antisémitisme.
Il ne s'agissait néanmoins pas d'une commémoration. En effet, deux années plus tôt, alors que le mouvement des sans‑papiers se développe avec le soutien de la notoriété de l'abbé Pierre, débute l'affaire Garaudy. Cet ex‑dirigeant du Parti communiste fait paraître aux éditions de la Vieille Taupe, spécialisées dans le négationnisme, un livre, qui sous prétexte de dénoncer les Mythes fondateurs de la politique israélienne, reprend tous les clichés négationnistes. Le scandale s'aggrave lorsque l'abbé Pierre déclare son soutien à Roger Garaudy et multiplie les prises de position antisémites. On apprend à cette occasion que depuis plusieurs années il a défendu ce genre de thèses.
Militants antiracistes engagés dans le soutien aux sans‑papiers, nous sommes alors surpris par la gêne, voire la complaisance qui se manifeste à l'égard de l'abbé. Son discours antisémite est traité ‑ y compris par ceux qui sont en principe les plus vigilants dans la lutte contre le racisme - comme un dérapage, une foucade un peu obscène mais pas très grave. C'est à ce moment que se cristallise le projet qui devait mener à la création de l'association Mémorial 98.
Notre attention avait déjà été attirée sur cette première mobilisation ouvrière contre l'antisémitisme par quelques phrases d'une brochure de l'organisation Alternative libertaire intitulée « La mauvaise conscience » et qui traitait de l'antisémitisme dans la gauche. Ce document reprenait les informations de Michel Winock (« La gauche et les juifs » paru dans Nationalisme, antisémitisme et fascisme en France)1 qui décrit ainsi la situation en janvier 1898 :
« Le 19 janvier après que les poursuites ont été lancées contre Zola un manifeste est lancé par 32 députés socialistes qui se déclarèrent "au dessus de la mêlée". Les élections législatives devaient avoir lieu en mai 1898, Or les socialistes parlementaires sont sensibles à la pénétration des mots d'ordre nationalistes et antisémites dans les couches populaires. C'est moins du côté du Parlement qu'on retrouve le premier foyer de résistance au nationalisme et les premiers bataillons dreyfusards que dans les tendances antiparlementaires du mouvement ouvrier : dans le groupe allemaniste et dans les colonnes de son journal Le Parti ouvrier et chez les anarchistes qui entourent Sébastien Faure et le Libertaire. Dès la fin de l'année 1897 ils ont fait leur choix [...]. Le 17 janvier, Jules Guérin ayant organise une réunion antisémite les anarchistes de Faure et les allemanistes prennent d'assaut l'estrade et dispersent la réunion. »
Le mouvement ouvrier français a longtemps hésité à s'engager dans la bataille démocratique et antiraciste, L'évolution de ses dirigeants vers la cause dreyfusarde n'est pas linéaire.
La gangrène antisémite a largement touché le mouvement ouvrier français du 19e siècle. Bien entendu, elle était antérieure à celui‑ci et n'avait pas épargné la philosophie des Lumières. Voltaire rédigeait ainsi l'article « Juifs » de son Dictionnaire philosophique: « Vous ne trouverez en eux qu'un peuple ignorant et barbare, qui joint depuis longtemps la plus sordide avarice à la plus détestable superstition. »
Néanmoins, la Révolution a reconnu dès 1789 les Juifs comme citoyens français, puis a émancipé ceux d'Alsace et de Lorraine en 1791. Sous Louis‑Philippe, la presse souligne la fortune colossale accumulée par la famille Rothschild, à laquelle on ne tarde pas à assimiler tous les Juifs... Un antisémitisme à prétention sociale allait dès lors renforcer l'antisémitisme d'origine chrétienne.
Des figures marquantes du mouvement ouvrier français cèdent à la tentation d'amalgamer le Juif et l'usurier, ou d'habiller leur antisémitisme d'un sentiment athéiste. Proudhon, le père de l'anarchisme français, écrit à propos de la « race juive » :
« Demander son expulsion de France, à l'exception des individus mariés avec des Françaises; abolir les synagogues, ne les admettre à aucun emploi [...] Le Juif est l'ennemi du genre humain. Il faut renvoyer cette race en Asie ou l'exterminer »2
Le jeune Marx lui‑même tient un discours douteux dans La question juive écrite en 1844 alors qu'il séjournait en France:
« L'argent est le dieu jaloux d'Israël, devant qui nul autre dieu ne doit subsister, »
En 1891, un délégué juif américain demande au congrès international socialiste de Bruxelles de condamner l'antisémitisme. Mais la motion retenue renvoie dos à dos « les excitations antisémitiques et philosémitiques ». C'est notamment à la demande de deux délégués français que ce dernier mot a été ajouté. Édouard Drumont, l'auteur antisémite du best-seller absolu de l'époque La France juive, n'hésite pas à se parer d'un vocabulaire anticapitaliste :
« Avec le sémite, tout part de la Bourse, tout revient à la Bourse, toute action se résume à une spéculation. [...] Sur qui pèse le régime actuel? Sur l'ouvrier révolutionnaire et sur le conservateur chrétien. L’un est atteint dans ses intérêts vitaux ; l'autre blessé dans ses croyances les plus chères. »3
DU CÔTÉ DES ANARCHISTES...
Lorsque commence l'affaire Dreyfus, les anarchistes français sont affaiblis par la répression. Beaucoup d'entre eux sont contaminés par l'antisémitisme à prétention sociale. En novembre 1894, au début de l'affaire Dreyfus, Pouget écrit dans son journal Le Père peinard :
« Un youtre alsacien, Dreyfus, grosse légume au ministère de la Guerre, a bazardé un tas de secrets militaires en Allemagne. Ohé, bourgeois, ne vous épatez donc pas; les militaires ont ça dans le sang. »4
Les anarchistes qui, comme Bernard Lazare, défendent la cause de Dreyfus sont au début très isolés. Pourquoi défendre un officier, fils de bourgeois... et un « youtre » ?
Bernard Lazare s'engage aux côtés de Dreyfus dès le début de 1895, bien avant Zola, Il essaye de convaincre les autres révolutionnaires d'en finir avec leurs préjugés dans un texte intitulé : « Antisémitisme et révolution ». Mais il faut attendre janvier 1898 pour que le mouvement anarchiste commence à basculer, notamment grâce à Sébastien Faure. Dans son journal, Le Libertaire, celui-ci écrit : « Dreyfus est l'enchaîné de vos lois, monde chrétien et société bourgeoise! ». En février, il répond à Pouget que l'affaire Dreyfus « porte à l'ordre du jour la question sociale toute entière dans ses complexités ». Peu à peu, Émile Pouget et d'autres libertaires finissent par s'engager dans ce que Jean Grave, dirigeant anarchiste, appelle « la lutte entre clarté et obscurantisme ». Mais Sébastien Faure sera, après coup, l'objet de nombreuses critiques de la part de ses camarades qui lui reprocheront une « compromission avec les partis politiques ».
LES SOCIALISTES : DE L’ABSTENTION AU DREYFUSISME
Le socialisme français est fortement divisé à cette époque. Le Parti ouvrier français de Guesde et de Lafargue est le plus organisé. Les socialistes révolutionnaires d'Allemane, implantés dans le mouvement syndical, viennent de se séparer des possibilistes de Brousse. Millerand incarne l'aile droite du mouvement, les socialistes indépendants. Depuis 1893, une quarantaine de socialistes sont députés, parmi eux Jaurès, Guesde et Millerand.
Tous ont longtemps rechigné à s'engager, à l'exception des allemanistes et notamment de Lucien Herr qui mobilisera largement les intellectuels aux côtés de Dreyfus.
Avant l'affaire Dreyfus, Jaurès entretenait des relations somme toute cordiales avec des antisémites notoires comme Drumont et l'ancien communard Rochefort. En mai 1895, à l'issue de courtes vacances en Algérie et après la condamnation et la déportation de Dreyfus à l'île du Diable, Jaurès publie deux articles dans La Dépêche de Toulouse : « Sous la forme un peu étroite de l'antisémitisme se propage en Algérie un véritable esprit révolutionnaire », assure‑t‑il. Et Jaurès de reprendre à son compte les arguments du lobby antisémite contre la « puissance juive ». Il n'a vu que « l'usure juive » qui réconcilie contre elle « l'Européen » et « l'Arabe ».
Lorsque Zola lance son J'accuse, le 13 janvier 1898, les choses vont évoluer... mais lentement. Le Parti ouvrier socialiste révolutionnaire d'Allemane s'est engagé dès décembre 1894 contre le conseil de guerre qui avait condamné Dreyfus.
« Étrangère à l'antisémitisme, c'est la coopérative d'imprimerie, dirigée par Allemane, qui publie en 1898 la belle Lettre des ouvriers juifs de Paris au Parti socialiste français : cessez de nous prendre pour des Rothschild! »5
Comme on l'a vu, les parlementaires socialistes n'en sont pas là! Le plus droitier d'entre eux, Millerand, ne se ralliera au camp dreyfusard qu'au tout dernier moment, le 31 août 1898, après le suicide du commandant Henry, auteur confondu du faux accablant Dreyfus; la révision du procès devenant inévitable, le pragmatique Millerand s'y rallia.
L'évolution de Jaurès est plus rapide, mais non exempte d'ambiguïtés. En juin 1898, déjà acquis à la cause dreyfusarde, il déclare encore :
« Nous savons bien que la race juive, concentrée, passionnée, subtile, toujours dévorée par une sorte de fièvre du gain quand ce n'est pas par la fièvre du prophétisme, nous savons bien qu'elle manie avec une particulière habileté le mécanisme capitaliste, mécanisme de rapine, de mensonge, de corruption et d'extorsion. Mais nous disons, nous : ce n'est pas la race qu'il faut briser; c'est le mécanisme dont elle se sert, et dont se servent comme elle les exploiteurs chrétiens. »6
L'adhésion au dreyfusisme n'évacue pas tout antisémitisme.
Alors que Jules Guesde l'« orthodoxe » a vu dans J’accuse « le plus grand acte révolutionnaire du siècle », son parti publie néanmoins, fin juillet 1898, un manifeste qui tranche : « Les prolétaires n'ont rien à voir dans cette bagarre ». Seules comptent la lutte de la classe et la révolution sociale. Derrière ce discours simpliste, se cache la déception électorale de mai 1898 : Jaurès et Guesde ont été battus dans leurs circonscriptions, alors que Drumont est élu à Alger sur la base d'une campagne dont les thèmes sont à la fois « républicains » et antisémites : « Vive l'Armée! Vive la République! A bas les juifs! ». L'antidreyfusisme ouvrier persiste, notamment chez les travailleurs « de l'habillement concurrencés par le nouveau prolétariat juif originaire d'Europe centrale ». Et « l’on compterait 10 % d'ouvriers, en particulier des cheminots, parmi les 100 000 premiers adhérents de la Ligue de la patrie française »7.Tout de même, l'ensemble du mouvement socialiste finira par entrer dans la bataille. Le mouvement ouvrier pèsera de tout son poids contre les ligues nationalistes, dans un contexte de remontée de la combativité : entre 1898 et 1900, le nombre de jours de grève passe de 1,2 à 3,7 millions. Dans les manifestations dreyfusardes, « les prolétaires font masse, ils contribuent, avec les étudiants, à dynamiser » le mouvement8.
Dreyfusard très tardif, Millerand deviendra ministre du Bloc des gauches. Il s'attachera à convaincre Jaurès de se contenter d'une grâce présidentielle et d'abandonner la bataille pour la révision du procès.
L'affaire Dreyfus a montré que la lutte contre le racisme ou pour les droits de l'homme en général n'est pas étrangère à la lutte des classes. Dreyfusard de la première heure, Bernard Lazare écrira en 1901 :
« On ne pourra Jamais détruire l'antisémitisme; on pourra momentanément en enrayer les manifestations violentes, mais on le verra réapparaître selon les circonstances. Le Juif est trop nécessaire aux peuples chrétiens, l'antisémitisme trop utile pour les possédants, les chefs d'État, les dirigeants des nations chrétiennes. Le Juif n'existerait pas pour qu'on puisse détourner sur lui les colères de ceux qu'on spolie et sauver ainsi les coffres‑forts qu'ondoya l'eau du baptême, qu'assurément on l'inventerait. »9 Notes:
1) WINOCK (Michel), « La gauche et les juifs », Nationalisme, antisémitisme et fascisme en France, Points Histoire, Le Seuil.
2)PROUDHON (P.J.), Carnets, 1858.
3)DRUMONT (Édouard), La France juive, 1886.
4)CRANIGUES (Jean), « Les anarchistes », L'Affaire Dreyfus de A à Z, sous la direction de M. Drouin, Flammarion, 1994.
5)REBÉRIOUX (Madeleine), « Jaurès et les socialistes », L'Affaire Dreyfus de A à Z, op. cit.
6)Ibid note 1.
7)PIGENET (M.), « Les ouvriers et leurs organisations » in L'Affaire Dreyfus de A à Z, op. cit.
8) Ibid.
9)ORIOL (Philippe), « Bernard Lazare », L'Affaire Dreyfus de A à Z, op cit. MEMORIAL 98
Nouvel acte derépression gouvernementale antisémite, cette fois-ci contre la directrice de l'Institut polonais de Berlin. Katarzyna Wielga-Skolimowska est limogée par le gouvernement polonais pour avoir trop soutenu le très beau film "Ida ", déjà critiqué par les médias gouvernementaux en mars dernier car considéré comme "pro-juif" (voir ici) .
Le parti ultra-conservateur PiS au pouvoir en Pologne fait la chasse à ce qu'il nomme "la culture de la honte" ou de la repentance à l'égard de l'antisémitisme en Pologne pendant et après le deuxième guerre. Le symbole de cette traque est son attitude à l'encontre de l'historien Jan Gross.
MEMORIAL 98
Actualisation du 23 juillet
Le débat sur le massacre de Jedwabne et le pogrom de Kielce prennent un tour inquiétant, sous l'influence des dirigeants de la droite radicale au pouvoir .
Ainsi Anna Zalewska, ministre de l’Éducation nationale, a déclaré "ne pas pouvoir dire" qui était les criminels du pogrom à Kielce en 1946 ou dans la tuerie de Jedwabne, en 1941.
La mauvaise volonté manifestée par la ministre Zalewska n’est pas un événement isolé.
Jaroslaw Szarek, récemment nommé au poste de directeur de l'instance officielle "Institut de la mémoire nationale" (IPN), a immédiatement désigné "les Allemands" exclusivement lorsqu'il a été interrogé sur l'identité des assassins de Jedwabne, invalidant par la même occasion, les conclusions précédentes de l’IPN, une institution avec laquelle il collabore pourtant depuis des années (voir ci-dessous). Ces déclarations font partie intégrante d'une forme de négationnisme à la polonaise qui défie ouvertement les faits historiques.
Ces déclarations de responsables polonais, doivent être rapprochées de celles du président actuel Duda au cours de la dernière campagne présidentielle, a utilisé le massacre de Jedwabne, pour attaquer son adversaire, le président sortant.
Une "pétition de Jedwabne" diffusée par Ewa Kurek, historienne d’extrême-droite de Lublin, demande que les corps des Juifs massacrés soient exhumés afin de déterminer comment ils ont été tués. Cette démarche de profanation des sépultures est soutenue par le maire actuel de Jedwabne.
Le parti PiS au pouvoir poursuit ainsi sa campagne révisionniste et antisémite.
Memorial 98
10 juillet 2016:
75e anniversaire du massacre des Juifs de Jedwabne, perpétré par leur voisins.
Selon divers historiens, de 340 à 1.500 Juifs ont été tués dans ce massacre commis le 10 juillet 1941.
Celui-ci a été perpétré par des Polonais sous l'instigation des Allemands, selon les conclusions d'une enquête réalisée en 2003 par l'Institut officiel polonais de la mémoire nationale (IPN).
Quelques centaines de personnes venues de Pologne et d'autres pays ont participé ce 10 juillet 2016 aux commémorations du massacre de ces Juifs brûlés vifs dans une grange par leur concitoyens.
Les habitants de Jedwabne n'ont pas participé aux cérémonies, selon l'agence polonaise PAP.
Comme chaque année, des prénoms, des noms de famille, ainsi que les métiers des Juifs habitant Jedwabne avant juillet 1941 ont été lus publiquement.
Connu des historiens mais passé sous sllence, le massacre de Jewabne a été révélé au grand jour en 2000 par l'historien d'origine polonaise Jan Tomasz Gross dans son livre "Les Voisins" (voir ci-dessous), provoquant un choc en Pologne et une campagne acharnée de la droite nationaliste contre Gross.
En 2001, le président polonais de l'époque Aleksander Kwasniewski avait demandé pardon "au noms de tous les Polonais" pour ce massacre.
Le gouvernement actuel du PiS rejette cette aproche et verse dans le négationnisme. Ainsi le président actuel Duda avait attaqué lors de la campagne présidentielle le président sortant Komorowski sur ses anciennes déclarations à propos du massacre de Jedwabne. M. Komorowski avait déploré que "la nation des victimes (polonaises) ait été aussi celle des coupables", ce qui, selon M. Duda, est faux.
Actualisation du 3 juillet 2016
70 ans après, jour pour jour, nous commémorons le pogrom de Kielce en Pologne le 4 juillet 1946. Lors de ce pogrom, déclenché par une rumeur antisémite, 42 Juifs furent assassinés et de nombreux autres blessés (voir ci-dessous).
Une pensée particulière pour l'historien Jan Gross qui a décrit ces crimes et qui subit une campagne antisémite de la part du gouvernement polonais actuel du PiS, après les intimidations dont il avait été victime en 2008 suite à la parution de son livre.
Memorial 98 réaffirme son soutien au Pr Gross et à tous ceux qui combattent pour la vérité historique sur les persécution antisémites en Pologne.
Memorial 98
Obsèques des victimes de Kielce
Le livre de l’historien polonais Jan Tomasz Gross "La Peur" (en polonais Strach), sorti dans les librairies polonaises le 11 janvier 2008, donne lieu à une campagne d’intimidation judiciaire et médiatique contre son auteur.
Il relate pourtant des faits établis et connus.
Les Juifs polonais rescapés - en toute petite proportion- de la Shoah ont été victimes d'un antisémitisme généralisé dans leurs pays au lendemain de la guerre et ont subi une épuration ethnique violente.
Le régime stalinien de l’époque n’a rien fait pour combattre cette persécution qu’il attribuait uniquement à des « groupes fascistes ».
La hiérarchie catholique, demeurée très puissante, est toujours restée marquée par son antisémitisme militant d’avant-guerre.
Le cardinal Hlond, qui dirigeait le clergé polonais après-guerre et a refusé à l’époque toute condamnation des violences antisémites, avait lui-même publié en février 1936 une « lettre pastorale » destinée à être lue dans toutes les Eglises, dénonçant les Juifs qui « combattent l’Eglise catholique. Libres-penseurs, ils représentent l’avant-garde de l’athéisme du bolchevisme et de la révolution… Les Juifs propagent la littérature pornographique, commettent des fraudes, pratiquent l’usure et sont même impliqués dans l’esclavagisme… »
Cette atmosphère de persécution est bien connue et symbolisée par le pogrom de Kielce, le 4 juillet 1946. Quarante deux juifs rescapés de la Shoah y furent massacrés par la foule, après des rumeurs infondées selon lesquelles un enfant aurait été tué par des juifs. A cette époque les violences étaient quotidiennes. Des Juifs étaient précipités hors des trains, battus, assassinés.
Plusieurs livres ont rendu compte de cette période, dont en France l’ouvrage de Marc Hillel « le massacre des survivants » paru en 1985 (Plon).
C’est l’autorité et la reconnaissance internationales de Jan Gross, professeur à l’Université de Princeton qui poussent les autorités polonaises à recourir à l’intimidation. Son précédent ouvrage publié, en 2000, "Les Voisins", traitait du massacre de Jedwabne perpétré en juillet 1941. Des centaines de Juifs y furent tués ou brûlés vifs par leurs voisins catholiques, en dehors de toute intervention directe des nazis. Il avait provoqué un débat national et entraîné des excuses officielles du président polonais (de gauche) de l’époque.
Le parquet de Cracovie a ouvert une enquête préliminaire pour vérifier si l'auteur ne s'est pas rendu coupable de "diffamation publique contre la nation polonaise", ce qui constitue un délit selon le code pénal polonais.
Amendé en octobre 2006, sous l'impulsion de la droite conservatrice des frères Kaczynski qui a été battue lors des récentes législatives ( et qui est revenue au pouvoir en 2015) , l'article 132 prévoit jusqu'à trois ans de prison pour "quiconque impute à la Nation polonaise la complicité, l'organisation ou la responsabilité de crimes communistes ou nazis". Cette loi extravagante fait partie de l’arsenal répressif mis en place par le gouvernement de la droite radicale allié aux partis de l’extrême droite antisémite. Sa constitutionnalité est actuellement étudiée par la Cour suprême du pays (voir nos articles précédents sur la Pologne, notamment Brochure antisémite polonaise au Parlement européen
Mais Jan Gross n’a pas l’intention de se laisser intimider. Il a déclaré vouloir faire toute la lumière sur cette époque. Il est prêt à faire venir à la barre d’un éventuel procès des témoins, catholiques et juifs, qui décriront ce qui s’est passé exactement en Pologne après la guerre. Jan Gross lui même a du quitter le pays en 1968 lors d’une nouvelle campagne antisémite menée par la bureaucratie stalinienne.
Peut on espérer que ce nouveau scandale entraîne une réflexion de la société polonaise, de la jeunesse, à propos de l’antisémitisme qui irrigue l’histoire politique et culturelle de ce pays ?
Mise à jour du 12 janvier 2017
En Pologne, à quelques kilomètres du camp d'Auschwitz, on peut acheter un étrange porte-bonheur afin de devenir riche : l’image d’un Juif qui tient une pièce d’argent.
Que signifie cette mise en scène de la figure du Juif, dans le contexte polonais d’après la Shoah ? Quelle est la part des préjugés antisémites dans cette représentation?
A l’approche d’importantes élections régionales le 27 janvier, la droite allemande en difficulté sur le plan socialet politique(face notamment à l’exigence de la mise en place d’un salaire minimum) lance de nouveau une campagne xénophobe.
Elle suit ainsi une tendance croissante en Europe; la droite traditionnelle, suivant l’exemple sarkozyste, n’hésite pas à recourir à des thèmes issus de l’extrême droite
Prenant appui sur l’agression d'un retraité par deux jeunes issus de l'immigration, la CDU (démocratie chrétienne) vient de relancer le débat sur un durcissement des peines à l'encontre des jeunes délinquants issus de l'immigration.
A l'origine de cette polémique, Roland Koch,dirigeant de la CDUet ministre-président de Hesse , l'une des trois régions concernées par ce scrutin à valeur de test pour les alliés/ennemis du gouvernement de grande coalition.
"Nous avons trop de jeunes étrangers criminels! ", a-t-il déclaré dans un entretien à la Bild Zeitung du 28 décembre 2007.
M. Koch a présenté des propositions qui prévoient notamment l'augmentation de la peine maximale de prison de 10 à 15 ans pour les jeunes délinquants et l'expulsion des étrangers condamnés à au moins un an de prison ferme.
Le débat enfle depuis les propos polémiques de Koch, qui a reçu l'appui de son parti et de la chancelière Angela Merkel. La gauche et les associations de lutte contre le racisme ont dénoncé la provocation.
Stephan Kramer, secrétaire général du conseil des juifs d'Allemagne, a accusé la campagne de M. Koch de se différencier "à peine de celle du NPD", le parti néonazi allemand.
Koch est un habitué des campagnes xénophobes. Il avait déjà été élu en 1999 en organisant une pétition contre le droit à la double nationalité des personnes issues de l’immigration, dans la continuité d’une conception de la nationalité basée sur le « droit du sang » (voir notre article précédentLe Pen récidive contre Rachida Dati)
Koch est entré au Parti Chrétien-Démocrate à l'âge de 14 ans et fait partie des « jeunes loups » de la CDU. Son ambition est sans limites, malgré un parcours jalonné de scandales.
On a découvert en effet que sa campagne électorale de 1999 a été entièrement financée par de l'argent sale, provenant des caisses noires de la CDU sur un compte en Suisse. Roland Koch a d'abord expliqué qu’il s’agissait de dons légués par « des immigrés juifs », avant de reconnaître avoir menti à l'opinion publique.
Il avait suivi la même ligne de défense que le chancelier Helmut Kohl qui avait aussi évoqué de mystérieux "donateurs juifs" pour justifier ses caisses noires et avait dû quitter ses fonctions. Kohl a ensuite comparé son propre sort à celui des Juifs d'Allemagne sous le
En 2002 Koch avait provoqué un nouveau tollé en assimilant le sort des personnes fortunées sous un gouvernement de gauche, à celui des Juifs sous le nazisme, car selon lui ces 2 catégories étaient pareillement stigmatisées par une « étoile jaune ».
Il avait du s’excuser et avait retiré ses propos.
Notons que ce recours à l’étoile jaune vient encore de se manifester en Allemagne avec la commercialisation de t-shirts censés protester contre des mesures anti-tabac et montrant des fumeurs affublés d’une étoile jaune.
"2008 sera une année dure et exigeante", a affirmé Nicolas Sarkozy lors de ses vœux à l'Elysée. Sarkozy est en difficulté sur le plan social, car ses promesses sur le « pouvoir d’achat » montrent leur vacuité et leur caractère mensonger. Face à la chute de sa popularité, il a recours à sa ressource préférée, au thème fétiche qui lui a ouvert les portes du pouvoir: la démagogie sécuritaire et xénophobe. Un exemple parmi tant d’autres: la mise en scène des vœux avec les cheminots et agents RATP dont il vient de détruire le régime particulier de retraite et qu’il " cajole" dans le domaine de la sécurité. De même, le seul regret exprimé par Sarkozy lors de sa conférence de presse élyséenne du 8 janvier a porté sur le nombre insuffisant d’expulsions d’étrangers. 25000 personnes doivent être expulsées, pas une de moins! Il faut donc s’attendre à voir beaucoup de déploiements policiers, de rafles et d’expulsions avant les municipales et au delà, à mesure qu’apparaîtront les fissures de la politique anti-sociale du président. Ce recours était assumé et annoncé depuis plusieurs années. La récupération de l’ électorat du Front national a été considérée comme la clef de l’élection présidentielle (voir notre article précédent Sarkozy-Le Pen: le livre qui révèle) Un nouveau livre, issu du sérail, témoigne à nouveau de cette préparation méthodique. Extraits du livre « Les hommes d’Etat » de Bruno Lemaire ex directeur de cabinet de Villepin qui retrace le déroulement de la période 2006/2007, vu de l'intérieur du gouvernement.
9 mai 2006 [Petit déjeuner de la majorité à Matignon. Nicolas Sarkozy intervient.] … il croise le regard de Dominique de Villepin : «Moi, je sais pas, la seule chose que je dis, c'est qu'il faut faire de la politique. Et pour faire de la politique, il faut cliver. On a le texte sur l'immigration: je dis pas qu'il est parfait, mais au moins on clive, les socialistes sont mal à l'aise. Et puis on a la prévention de la délinquance: je dis pas que c'est bien ou pas, la prévention de la délinquance, je dis que les Français attendent ça, ils veulent qu'on soit ferme, et ils voient que les socialistes sont mal à l'aise. Alors qu'est-ce qu'on attend? C'est que du bonheur, ça!» 13 juin 2006 [En présence de Bruno Le Maire et de Claude Guéant, Dominique de Villepin reçoit à déjeuner Nicolas Sarkozy, qui fait le point sur la situation politique.] «Le Pen, en ce moment, il engrange. Il engrange un maximum. Moi, je dis jamais du mal des électeurs de Le Pen, jamais. Les électeurs de Le Pen, je dis toujours que c'est des victimes. Des victimes de quoi? J'en sais rien. Mais c'est des victimes. Pour nous, l'élection de 2007 se jouera sur les électeurs de Le Pen. On les prend, on gagne. On les prend pas, on perd.»
Dans cette entreprise Sarkozy s’appuie aussi sur les aspects les plus rétrogrades du catholicisme. Celui qui déclare : "Je suis de culture catholique, de tradition catholique, de confession catholique. Même si ma pratique religieuse est épisodique, je me reconnais comme membre de l’Eglise catholique »( NS dans son livre de 2004 : la République, les religions, l’espérance) met en scène à Rome sa vision des racines chrétiennes et en fait uniquement catholiques de la France. Face à un pape nostalgique de l’ordre ancien et qui fut membre des jeunesses hitlériennes(voir notre article précédentBenoît XVI appuye les intégristes antisémites en France) le président d’une République laïque fixe comme horizon de l’espérance la seule croyance religieuse.
Pour alourdir la symbolique nationaliste de ce voyage au Vatican, Sarkozy s'est fait accompagner de Max Gallo. Ce nouveau chantre de la papauté est aussi le héraut de l’ « identité française » dont il détaille sa conception : « j’assume Thiers, Céline et Brasillach »(ce dernier fasciste, collaborateur des nazis et délateur fut condamné à mort à la Libération pour « intelligence avec l’ennemi », tandis que Céline, hitlérien convaincu et dénonciateur nominal de Juifs et de résistants, échappa à toute sanction)