Impunité post-mortem.
La mort de Raymond Barre donne lieu à un véritable déluge d’hommages, malgré son antisémitisme déclaré, récemment réaffirmé dans une interview à France Culture (voir nos articles précédents Impunité de l'antisémite Barre et Décryptage: R. Barre récidive pour Papon et Gollnisch )
Le plus complaisant de ces dithyrambes est, à ce jour, celui de François Fillon qui déclare :
"La première image qui vient à l'esprit quand on pense à Raymond Barre, c'est la droiture, c'est la rigueur morale et la rigueur intellectuelle. C'était un exemple de rigueur morale et intellectuelle. " a- t- il déclaré. On attend la réaction indignée de son conseiller Arno Klarsfeld.
Les autres déclarations officielles, dont celle de Nicolas Sarkozy, sont de la même veine.
Certains dirigeants socialistes en rajoutent dans la flagornerie, tels Jacques Delors, Michel Rocard et le maire de Lyon Gérard Collomb, qui déshonore ainsi la gauche et sa ville, capitale de la Résistance.
Ceux qui sont plus gênés et directement concernés, comme son "héritier" Bayrou, se réfugient derrière la pauvre excuse de l’état de santé de Barre au moment de ses déclarations antisémites les plus récentes de mars dernier.
Cette justification est inconsistante car depuis 1980 et ses premières déclarations lors de l’attentat contre la synagogue de la rue Copernic ( il avait déclaré sur TF1: " « Cet attentat odieux voulait frapper les Israélites qui se rendaient à la synagogue et qui a frappé des Français innocents qui traversaient la rue Copernic » ) il continue à revendiquer ses propos discriminatoires. Selon lui, ceux qui ont commis l'attentat voulaient «châtier des Juifs coupables», malheureusement, «des Français qui circulaient dans la rue se trouvent fauchés parce qu'on veut faire sauter une synagogue. Alors, ceux qui voulaient s'en prendre aux Juifs, ils auraient pu faire sauter la synagogue et les juifs. Mais pas du tout, ils font un attentat aveugle et il y a trois Français, non juifs». . Barre a persisté dans cette voie: en témoignant pour Maurice Papon lors du procès de celui-ci en 1998 et en affirmant à plusieurs reprises son soutien à Bruno Gollnisch, dirigeant du Front National, négationniste et antisémite avéré.
D’autre encore notent cette « tâche » ou ses « propos inadmissibles » de Barre mais les considèrent comme une espèce de bizarrerie qui selon eux ne remet pas en cause sa « stature d’homme d’Etat »
Pourtant ses dernières déclarations, diffusées sur France Culture le 1er mars dernier (2007), sont d’une grande brutalité.
On y trouve, en plus des appréciations déjà connues sur le "lobby juif de gauche", l'attentat de la synagogue Copernic, Papon, Gollnisch, cette phrase incroyable à propos de Papon:
"Je ne porte pas un jugement moral sur l'attitude que l'on devait avoir à l'égard des déportations de Juifs ou non"
Au fond, cette impunité semble constituer un privilège de la fonction. À partir d'un certain niveau de pouvoir ou de renommée, on peut, sans risque, dire ou écrire des horreurs. Le parallèle qui vient à l’esprit est celui de l’abbé Pierre, pareillement absous de son antisémitisme lors de son décès, avec les mêmes justifications.
Reste à expliquer la passion antisémite de Raymond Barre, qui se déclarait catholique pratiquant et fut un fieffé réactionnaire tout au long de sa carrière.
Memorial 98