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L'association MEMORIAL98, qui combat contre le racisme, l'antisémitisme et le négationnisme a été créée en janvier 1998, lors du centenaire de l'affaire Dreyfus.  

Son nom fait référence aux premières manifestations organisées en janvier 1898, pendant l'affaire Dreyfus, par des ouvriers socialistes et révolutionnaires parisiens s'opposant à la propagande nationaliste et antisémite.

Ce site en est l'expression dans le combat contre tous les négationnismes

(Arménie, Rwanda, Shoah ...)

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Retrouvez aussi le quotidien de l'info antiraciste sur notre blog d'actus :

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Sur les réseaux sociaux : 

    

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Pour correspondre avec nous, nous proposer des articles ou des informations,

pour toute question : 

contact@memorial98.org

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9 juillet 2018 1 09 /07 /juillet /2018 20:14

Comment rendre compte d'une extermination, d'un génocide? Comment évoquer la mort de ceux et celles qui en ont été victimes? Comment construire la mémoire d'un drame collectif tout en retraçant les sorts individuels et singuliers? C'est à ces questions que tente de répondre  le documentaire réalisé par Ruth Zylberman, 

 

Mise à jour du 20 janvier 2020: nouvelle diffusion du documentaire à l'occasion de la journée internationale de la Shoah et du 75e anniversaire de la libération du camp d'Auschwitz 

 

Il sera diffusé le 27 janvier à 22h 35 sur ARTE.

Mais il est aussi dès maintenant  en replay sur Arte.TV et en accès libre; voir ici 

 

Memorial 98

 

Une porte d'un bleu délavé, écaillée par endroit. Le grincement d'un battant qui se ferme ou qui s'ouvre. Des portes qui claquent. Des pas dans les escaliers, des voix, des pas sur les pavés de la cour. Des femmes, des hommes et des enfants montent et descendent les marches une à une, deux par deux, un pied après l'autre, une main sur la rampe en bois ciré. Les habitants se croisent et se saluent. Des enfants vont à l'école du quartier, ils jouent dans la cour et se chamaillent.

 

Des fenêtres les unes à côté des autres, les unes au-dessus des autres, ouvertes ou fermées, éteintes ou éclairées. Des formes en mouvement derrière les vitres, ou les voilages.

 

Quatre bâtiments, autour d'une cour intérieure.  Six étages.

 

Dans les années trente, dans ce même immeuble, au 209 rue St Maur, dans le très populaire onzième arrondissement de Paris, vivent trois cent habitants dont un tiers d'étrangers. Des Italiens, beaucoup de Juifs, venus pour la plupart de Pologne et de Roumanie.

Les hommes et les femmes vont travailler : un menuisier, un couvreur zingueur, un tailleur, un fourreur, un maroquinier, une couturière, une femme de chambre, un garçon de café. Au rez-de-chaussée, la loge de la concierge, l'épicerie et le bougnat.

Les enfants vont à l'école du quartier, ils ont des copains, ils  jouent dans la cour et se chamaillent.

 

La France : ˝Terre des Droits de l'Homme˝.

1940 Vichy: Les Juifs doivent aller se déclarer dans les sous-préfectures et à Paris dans les commissariats. 

1941 : premières rafles de Juifs dans le 11e arrondissement, dont celle dite du "billet vert" basée sur le fichier constitué 

1942 16 juillet: c’est la rafle du Vel’ d’Hiv’.   La police française cogne aux portes, pas n'importe lesquelles.

Un inspecteur de police, habitant de l'immeuble, tente de prévenir les familles.

Des cavalcades dans les escaliers, des cris, des pleurs, des hurlements. Une jeune femme jette son bébé dans les bras de la concierge avant d'être embarquée. Une mère va confier ses trois garçons à une organisation clandestine juive et disparait.

Cinquante personnes et neuf enfants arrêtés qui ne reviendront pas.

 

Grâce aux archives, la réalisatrice Ruth Zylberman va retrouver les noms et prénoms des familles et de leurs enfants, habitants de l'immeuble du 209 rue St Maur.

La date de leur arrivée en France, leur métier, le bâtiment, l'étage, le nombre de pièces...

 

Durant quatre années,  elle part à la recherche des enfants survivants en France et à l'étranger. Tel Aviv, Melbourne, New York. Le fil d'Ariane pour remonter jusqu'à eux. Ils avaient cinq ou six ans, quatorze ans maximum. Ils ne reverront jamais leurs parents. Ils sont octogénaires pour la plupart. Les souvenirs sont enterrés. Chacun a reconstruit sa vie ailleurs.

Avec délicatesse, Ruth Zylberman les accompagne.

La configuration de l'immeuble est reconstituée. Les listes de recensement. Du papier, des crayons, des post-It. Des figurines, des meubles de poupées, des maquettes. Tout un matériel pour faire resurgir d'infimes détails propres à chacun d'eux.

 "Il fallait coudre l'étoile sur les vêtements, de telle sorte que la mine d'un crayon ne devait pas pouvoir passer entre les points."

"Mon père m'apportait des cerises, j'étais une enfant gâtée." Odette place son lit à côté de la table de salle à manger et celui de ses cinq frères et sœurs. Ils sont huit dans un espace minuscule. Elle est la seule survivante.

 

Les souvenirs enfouis surgissent dans un silence. Des sourires timides devant des photos d'autrefois. Des photos jaunies, des photos sur lesquelles les enfants posent avec leurs parents, leurs cousins, leurs camarades, la meilleure amie, le cousin chéri. Leurs frères et sœurs, leur meilleur copain, disparus, pas revus. Une vie d'enfant saccagée.

Ils se retrouveront au 209 rue St Maur.

Henry, soixante dix neuf ans, vit aux Etats-Unis. Il a été placé, de famille d'accueil en famille d'accueil. Il ne voulait surtout pas revenir sur ce passé. C'est sa fille qui veut savoir. Un flash, en voyant une salle de bains : "Nous n'en avions pas, nous allions aux bains-douche municipaux ".

L'émotion, à l'idée que ses parents (dont il ne se souvient pas) ont poussé la poignée de la porte de l'immeuble, qu'il pousse à son tour, avant de marcher sur les pavés de la cour.  "Est-ce qu'ils ont été heureux dans cet immeuble ?"

"Inconcevable, Inimaginable", ces mots jaillissent, tandis que chacun se souvient, le regard embué.

Un film documentaire tout en discrétion, singulier dans sa forme et la manière de nous parler de cette période bouleversée.

Pour que personne n'oublie.

 

 

EL

Voir également:

 

Sur le site du fil d'actualité de  Memorial 98 L'Info antiraciste  ( abonnez-vous!)

http://info-antiraciste.blogspot.com/2019/07/ghetto-de-varsovie-la-deportation-qui.html

D'autres oeuvres abordant la Shoah, présentées sur notre site:

 http://www.memorial98.org/2017/03/le-ghetto-de-cracovie-mars-1943.html 

http://www.memorial98.org/2016/01/le-fils-de-saul-du-bruit-et-de-la-fureur.html

 

http://www.memorial98.org/article-allez-voir-la-rafle-46705214.html

 

http://www.memorial98.org/article-liberation-d-auschwitz-70-ans-apres-les-images-temoignent-125439876.html

 

 

MEMORIAL 98

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4 juin 2018 1 04 /06 /juin /2018 11:08

Li Wenzu, épouse de Wang Quanzhan, a utilisé le seul moyen de protestation à sa disposition en se rasant la tête, avec d'autres femmes solidaires

Mise à jour du 28 janvier 2019

L'avocat Wang Quanzhang a été condamné ce 28 janvier à quatre ans et demi de prison pour «subversion du pouvoir de l'État». Il a défendu des personnes se plaignant d'avoir été torturées par la police ou des paysans privés de leur terre ainsi des membres du mouvement spirituel interdit Falun Gong,

Il fait partie des plus de 200 avocats et militants des droits de l'homme à avoir été interrogés ou arrêtés depuis le coup de filet démarré en juillet 2015 ( voir ci -dessous) . La grande majorité d'entre eux avait été relâchés, mais certains ont été condamnés à des lourdes peines de prison. Wang Quanzhang était le seul à ne pas avoir été fixé sur son sort.

Il a été placé en détention au secret pendant plus de trois ans, avant que ne se tienne son procès, à huis clos, le 26 décembre. Sa femme Li Wenzu, qui a longtemps ignoré s'il était toujours en vie, n'a pas eu l'autorisation de quitter Pékin pour y assister. Ni les membres de sa famille, ni les avocats qu'ils avaient engagés n'ont pu rencontrer Wang Quanzhang durant sa détention.

Li Wenzu a écrit sur Twitter que son mari était innocent, alors que le comportement «inhumain» des responsables de la justice envers lui enfreignait les lois chinoises. «Je respecte et soutiens les choix qu'a faits Wang Quanzhang», a ajouté cette femme, qui dit vouloir continuer à défendre les droits de son époux et s'inquiète d'éventuelles tortures subies en détention. 

Depuis la disparition de l'avocat, elle a multiplié les initiatives pour attirer l'attention sur sort. En avril, elle a effectué une marche de 100 km de Pékin à Tianjin et, en décembre, elle s'est rasée la tête pour protester. Elle était parvenue à mobiliser la chancelière allemande Angela Merkel, qui, dans un geste politique fort, l'avait rencontrée en mai au cours d'une visite à Pékin.

Les organisations internationales de défense des droits de l'homme ont fustigé le verdict . Pour Maya Wang, de l'ONG Human Rights Watch (HRW), il «tourne en dérision» la volonté affichée par le président Xi Jinping de faire respecter l'État de droit. Amnesty International (AI), dénonce de son côté une «grave injustice». Mais une chercheuse de cette ONG, Doriane Lau, fait observer que Wang Quanzhang devrait pouvoir sortir de prison «dans un peu plus d'un an», étant donné le temps qu'il a déjà passé en détention.Plusieurs autres avocats ou militants des droits de l'homme interpellés à partir de juillet 2015 ont été jugés pour "subversion". Parmi les peines de prison les plus lourdes, l'avocat Zhou Shifeng a été condamné en 2016 à 7 ans de réclusion, et le dissident Wu Gan à huit ans, en décembre 2017. Wang Quanzhang appartenait au cabinet d'avocat pékinois Fengrui - aujourd'hui dissous - qui s'était spécialisé dans les dossiers politiquement délicats. La presse officielle l'avait décrit en 2015 comme un «gang criminel», et avait accusé l'équipe dirigeante de «perturber l'ordre social». Le mouvement de répression commencé cette année-là avait symbolisé les efforts croissants du Parti communiste chinois pour museler toute voix dissonante, depuis l'arrivée au pouvoir du président Xi Jinping.

Wang Quanzhang et tous autres prisonniers politiques doivent être immédiatement libérés

Memorial 98

 

 

 

Mise à jour spéciale du 10 juillet 2018:

Liu Xia est enfin libérée et en route pour l'Allemagne (ci-dessus à l'aéroport d'Helsinki en transit)

 

 

 

Nous nous réjouissons de l'annonce aujourd'hui de la libération de Liu Xia, après 8 ans de persécution, de surveillance constante et d'assignation illégale à résidence. Pendant ces années, les autorités chinoises ont tout fait pour la punir de défendre son mari et de s’exprimer librement. Ces autorités viennent enfin de lui accorder la possibilité de quitter la Chine et de rejoindre l'Allemagne, où son accueil est prévu.

Cette libération est le résultat des campagnes internationales qui ont été menées en soutien à Liu Xia.

Le rassemblement du 12 juillet à Beaubourg sera l'occasion de saluer cette libération et de marquer la mémoire de Liu Xiaobo, qui est quant à lui mort en détention.

Il marquera aussi notre volonté d'agir pour d'autres prisonniers d'opinion en Chine, dont l'avocat des droits de l'homme Wang Quanzhang, "disparu" depuis 3 ans.

C’était il y a trois ans jour pour jour : le 9 juillet 2015, une vaste opération policière visait plus de 200 avocats des droits de l’homme à travers toute la Chine. Une vague de répression connue sous le nom « 709 » (9 juillet ou 9/7). La plupart ont fini par être libérés après quelques semaines de détention. Certains ont gardé les séquelles de la torture subie en prison et nombreux sont ceux qui ont perdu leur licence d’avocat. Mais l'un de ces avocats reste disparu à ce jour: Wang Quanzhang. Son épouse Li Wenzu se bat depuis trois ans pour la libération de son mari et père de son enfant.

MEMORIAL 98

 Mise à jour du 6 juillet 2018:

Afin d’honorer la mémoire de Liu Xiaobo, et d’obtenir la libération de Liu Xia, nous appelons celles et ceux qui sont attachés aux libertés et au respect des droits humains en Chine, comme dans le monde entier, à se rassembler à Paris le jeudi 12 juillet, à partir de 17h, Place Igor Stravinsky, à côté du Centre Pompidou (Métros Hôtel de Ville, Rambuteau, Châtelet).

 

Il y a un an, le 13 juillet 2017, Liu Xiaobo, Prix Nobel de la Paix 2010 pour son combat en faveur des droits humains en Chine, décédait en détention. Emprisonné depuis 2009 pour « incitation à la subversion du pouvoir de l’Etat » après avoir cosigné la Charte 08 appelant à des réformes politiques en Chine, il n'a jamais été libéré.

Le régime a fait répandre les cendres de Liu Xiaobo dans la mer, et ne permet aucune commémoration en son honneur dans son pays natal, la Chine. Tout semble avoir été fait par les autorités chinoises pour que le souvenir de Liu Xiaobo soit effacé.

Liu Xia, son épouse, est toujours illégalement assignée à résidence, sans jamais avoir été jugée, ni même accusée. Les autorités lui ont jusqu’à présent refusé la possibilité de quitter la Chine, pour la simple raison qu’elle fut l’épouse de Liu Xiaobo. 

 

Nous demandons aux autorités chinoises de rendre sa liberté à Liu Xia, et de permettre au plus vite sa sortie du territoire chinois, comme elle en a explicitement émis le souhait.

 

À cette occasion sera présenté un monument conçu par l’artiste WANG Keping, en mémoire de Liu Xiaobo : une « chaise vide », symbolisant son absence forcée à Oslo, lors de la remise de son prix Nobel de la Paix en 2010. Catherine BLANJEAN, auteure du livre « Liu Xia, Lettres à une femme interdite », publié aux éditions François Bourin, sera également invitée à lire quelques textes de la poétesse.

 

— ACAT — Amnesty International France— Ensemble contre la peine de mort— FIDH— Ligue des droits de l’Homme— Memorial 98— Reporters sans Frontières— Solidarité Chine

 

Au même moment, des experts des Nations Unies travaillant sur les cas de détention arbitraire viennent d’appeler la Chine à libérer Liu Xia 

"Nous sommes troublés par les informations faisant état de la détérioration de l'état de santé de Liu Xia. Elle serait physiquement retenue dans un lieu inconnu et souffrirait d'une grave détresse psychologique", disent les rapporteurs de ces groupes de travail sur les disparitions forcées, sur les détentions arbitraires et sur la situation des défenseurs des droits de l'homme.

Voici la réponse négative de Lu Kang, porte-parole du Ministre des Affaires étrangères chinois, : "La Chine protège les droits des citoyens chinois conformément à la loi, a -t-il déclaré. En ce qui concerne sa santé, le gouvernement chinois se préoccupe plus que quelque étranger que ce soit de la santé des citoyens chinois."

 

 

MEMORIAL 98

 

 

A l'occasion du 29e anniversaire de la répression des manifestations de Tiananmen en juin 1989, des familles exhortent le président chinois Xi Jinping à enfin "réhabiliter" leurs proches tués lors de l'assaut militaire contre les étudiants.

Les mères de Tienanmen évoquent "la catastrophe de la répression et les plaies qui ne peuvent pas guérir" 

Dans la nuit du 3 au 4 juin 1989, soldats et blindés avaient mis fin par les armes au mouvement d'étudiants qui occupaient depuis un mois et demi la place Tiananmen, au coeur de Pékin. Les manifestants réclamaient la fin de la corruption et une ouverture démocratique.  

Le bilan de cette répression était généralement évalué à un millier de morts mais de nouvelles révélations se sont faites jour sur l'ampleur de la répression. Un rapport de l'ambassadeur de Grande-Bretagne mentionne plusieurs milliers de  morts en une nuit, des cadavres "en pâte" sous les blindés et des manifestants achevés à la baïonnette par l'armée, confirmant ainsi les photos prises sur place et publiées par des journalistes. Le régime chinois, qui impose un tabou absolu sur cette période, avait de son côté affirmé fin juin 1989 que la répression des "émeutes contre-révolutionnaires"avait fait 200 morts chez les civils et "plusieurs dizaines" du côté des forces de l'ordre. 

Les tanks de l'armée chinoise écrasent la révolte 

"Chaque année lorsque nous voulons commémorer (nos proches), nous sommes contrôlés, placés en résidence surveillée, ou éloignés de chez nous", déplorent les "mères de Tiananmen", une association regroupant des parents ayant perdu un enfant lors de la répression.  

"En tant que dirigeant d'un grand pays, vous n'êtes certainement pas insensible au massacre qui s'est déroulé il y a 29 ans, ni aux familles de victimes", indiquent-t-elles dans une lettre ouverte adressée au président Xi Jinping et diffusée cette semaine par l'ONG Human Rights in China. 

Le Parti communiste chinois (PCC) présente toujours officiellement les manifestants de la place Tiananmen comme "une petite minorité de personnes ayant provoqué des troubles contre-révolutionnaires". 

"Alors que nous sommes au soir de notre vie, nous espérons assister un jour, avant notre mort, à la réhabilitation de nos proches", expliquent ces "mères de Tiananmen" à Xi Jinping. "Nous avons toujours trois revendications: la vérité, des indemnisations et l'établissement des responsabilités.

L'épisode reste l'un des sujets les plus tabous en Chine. Il est banni des livres, des manuels scolaires, des films et est censuré sur les réseaux sociaux. 

Lundi 4 juin, la plateforme chinoise de microblogs WeChat empêchait ainsi ses usagers d'échanger des sommes d'argent pour 89,64 ou 64,89 yuans, montants faisant allusion à la date du 4 juin 1989.

Des militants ont également été éloignés de Pékin pour les empêcher de prendre part à d'éventuelles commémorations, à l'instar de l'intellectuel Hu Jia, cantonné depuis le 1er juin en "vacances forcées" à Qinhuangdao, station balnéaire située à 300 km de la capitale. "Mais où que je sois, je jeûne [le 4 juin] et j'allume des bougies. Je me sens chanceux, je suis un survivant [de la répression]. Tant de gens sont morts, mais la Chine est toujours bloquée en 1984 en termes de progrès" politique, a-t-il indiqué , en allusion au roman de George Orwell.

Le territoire semi-autonome de Hong Kong est le seul endroit du pays où les commémorations sont marquées, avec une veillée organisée le 4 juin (ci-dessous). 

 

La commémoration du massacre revêt cette année une importance particulière en raison d'un autre anniversaire tragique et récent. Il s'agit de la mort en prison, le 13 juillet 2017, du combattant pour la démocratie chinois et prix Nobel de la paix (2009) Liu Xiaobo. Il est mort à 61 ans, après plus de huit années de détention, sans avoir été libéré, ni soigné de sa grave maladie, alors qu'il sollicitait des soins spécialisés et que l'Allemagne se déclarait prête à l'accueillir.

Sa veuve, Liu Xia, est toujours maintenue en détention à son domicile,  sans jamais avoir été jugée ni même accusée. On lui a imposé une mise en scène macabre: l'immersion des cendres de son époux, décidée par le régime afin d'empêcher les hommages sur sa sépulture.

 

Poème de Liu Xia envoyé à une amie écrivain. 

 
Soucieuses de leur image répressive, les mêmes autorités chinoises ont pour faire diversion, envoyé des pandas dans un zoo en France; Mme Macron est la marraine officielle de ces aimables bestioles et n'a jamais dit un mot sur le sort de Liu Xia. 

La complaisance et la la lâcheté des gouvernements et dirigeants français à l'égard de la dictature chinoise atteint des sommets. 

 

En mai dernier François Hollande rend visite et hommage à son "vieil ami" le  dictateur chinois Xi Jen Ping. Le 24 mai, alors qu’il visitait l’usine Airbus il explique aux journalistes français qui l’accompagnaient qu’il était «admiratif de la vision longue qu’ont les dirigeants chinois».  

 

 

 

Alors que Xi Jen Peng a ouvert la voie à un règne à vie pour sa propre personne, ces louanges à la dictature revêtent une résonance sinistre.   

 

Lors de sa visite présidentielle en Chine en avril 2013, le même Hollande avait "renoncé" à mentionner le nom du prix Nobel  Liu Xiaobo, de peur de fâcher la dictature .

Hollande s'inscrit dans la longue lignée des politiciens français qui font silence sur la répression féroce qui règne dans ce pays et qui est exercée au nom du "marxisme".

Chirac, Sarkozy et Raffarin ont porté cette complaisance, le dernier a de plus monté une immense business d'intermédiaire et de lobbyiste pour les patrons des deux pays.

De son côté Sarkozy applaudit la présidence à vie de Xi.

 

Macron poursuit dans la même direction: ainsi le lendemain de la mort de Liu Xiaobo, le 14 juillet 2017, il tenait une conférence de presse conjointe à Paris avec Donald Trump.

Il s'agissait de mettre en scène leur amitié . Interrogés par un journaliste chinois sur leurs impressions à propos du "président" chinois (non élu)  Xi Jipeng, ils célébrèrent « un des grands leaders de notre monde » (M. Macron), « un ami, un leader de talent, un homme très bon » (M. Trump), mais n’ont pas eu un mot pour dénoncer la mort d’un Prix Nobel de la paix en détention. Emmanuel Macron s'est contenté d'un tweet de 131 signes pour réagir à cette mort.  Même Barack Obama, qui a lui-même reçu le prix Nobel en 2008, un an avant le démocrate chinois, ne s’est  jamais engagé pour lui. En revanche le comité Nobel norvégien avait  déclaré que la Chine portait "une lourde responsabilité" dans la mort "prématurée" de Liu Xiaobo en le privant de soins médicaux adaptés. 

 

 

 

Le "modèle chinois", de capitalisme contrôlé par la dictature du Parti Communiste (!)  chinois représente un rêve pour de nombreux gouvernants et patrons à travers le monde: pas de démocratie, pas d'élections, pas de syndicats indépendants, pas de presse libre, pas de lois protectrices, pas de liberté d'expression, Internet contrôlé. La mort récente de Serge Dassault a rappelé les déclarations de ce grand patron ultra-libéral  "Les Chinois, ils travaillent 45 heures, ils dorment sur place dans leurs usines, ils font des bons produits pas chers."

Face à cette alliance mondiale de soutien à la dictature chinoise, nous sommes plus que jamais aux côtés de ceux et celles qui combattent pour les libertés démocratiques, la justice sociale, le droit à la santé, les droits des femmes et des LGBTQ,  les droits des minorités notamment au Tibet et au Xinjiang (population Ouïgour). Nous affirmons une totale solidarité en hommage au courage et à la détermination des mères de Tienanmen. 

MEMORIAL 98 

 

Mise à jour du 11 juillet

Le lendemain de la libération de Liu Xia, Qin Yongmin, vétéran chinois de la dissidence, a été condamné, ce 11 juillet à 13 ans de prison pour « subversion ». C'est la plus longue peine infligée à un opposant politique depuis que Xi Jinping est à la tête du pays.

Qin Yongmin, 64 ans, avait été arrêté en 2015, sous l’accusation d’avoir organisé un rassemblement illégal. À l’époque, il avait déjà passé 22 ans de sa vie en prison ou en camps de rééducation par le travail.

Après une première peine de 12 ans

 

Il avait été libéré fin 2010, après avoir purgé une peine de 12 ans de prison pour avoir tenté, en 1998, de déposer les statuts d’un « Parti démocrate chinois ». Initiative qui avait suivi la signature par Pékin du pacte de l’Onu sur les droits civils et politiques. Un texte que le gouvernement chinois n’a depuis jamais ratifié.

À sa sortie de prison, il avait promis de continuer à se battre pour les droits de l’Homme et dirigeait jusqu’à son arrestation en 2015 une association en faveur de la démocratie.

 

Son association de défense des droits de l'homme dénonçait la politique du gouvernement sur internet et organisait des forums de discussion. L'acte d'accusation évoquait un texte dans lequel M. Qin appelait les jeunes Chinois à lutter pour les garanties légales offertes par les traités de l'ONU en matière de libertés fondamentales. Néanmoins, "en trois années d'enquête, les autorités ont été incapables de bâtir un dossier contre lui", a observé Frances Eve, de l'association de défense des droits de l'homme Chinese human rights defenders.

 

Lors de son procès en mai, l'opposant "a refusé de coopérer avec la cour" et a observé un silence total, selon un de ses avocats, Lin Qilei. Son autre avocat, Liu Zhengqing, a déclaré à l'AFP que Qin Yongmin était  "désespéré" par sa condamnation et "furieux contre ce régime véreux". Selon ses défenseurs, le dissident "fera certainement appel".

 

Mise à jour spéciale du 10 juillet 2018:

Liu Xia est enfin libérée et en route pour l'Allemagne (ci-dessus à l'aéroport d'Helsinki en transit)

Nous nous réjouissons de l'annonce aujourd'hui de la libération de Liu Xia, après 8 ans de persécution, de surveillance constante et d'assignation illégale à résidence. Pendant ces années, les autorités chinoises ont tout fait pour la punir de défendre son mari et de s’exprimer librement. Ces autorités viennent enfin de lui accorder la possibilité de quitter la Chine et de rejoindre l'Allemagne, où son accueil est prévu.

Cette libération est le résultat des campagnes internationales qui ont été menées en soutien à Liu Xia.

Le rassemblement du 12 juillet à Beaubourg sera l'occasion de saluer cette libération et de marquer la mémoire de Liu Xiaobo, qui est quant à lui mort en détention.

Il marquera aussi notre volonté d'agir pour d'autres prisonniers d'opinion en Chine, dont l'avocat des droits de l'homme Wang Quanzhang, "disparu" depuis 3 ans.

C’était il y a trois ans jour pour jour : le 9 juillet 2015, une vaste opération policière visait plus de 200 avocats des droits de l’homme à travers toute la Chine. Une vague de répression connue sous le nom « 709 » (9 juillet ou 9/7). La plupart ont fini par être libérés après quelques semaines de détention. Certains ont gardé les séquelles de la torture subie en prison et nombreux sont ceux qui ont perdu leur licence d’avocat. Mais l'un de ces avocats reste disparu à ce jour: Wang Quanzhang. Son épouse Li Wenzu se bat depuis trois ans pour la libération de son mari et père de son enfant.

MEMORIAL 98

 

 

 

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12 mai 2018 6 12 /05 /mai /2018 01:22

Dans la foulée du 8 mai qui marque l'anniversaire de la défaite nazie de 1945, nous présentons le travail exemplaire d'un enseignant documentaliste et sa pédagogie originale pour éduquer et lutter contre l'intolérance, les préjugés et l'oubli.

Ce soixante-treizième anniversaire de la chute du nazisme est marqué par les succès de l'extrême-droite dans de nombreux pays d'Europe et aux USA. En Allemagne, en Autriche, en Hongrie, en Pologne, en Italie, les nostalgiques du fascisme et du nazisme, les nostalgiques et racistes de tout poil sont à l'offensive. 
Nous en appelons plus que jamais au combat contre les idéologies et actes racistes et antisémites quels que soient leur prétextes, ainsi que pour la mémoire des génocides et crimes contre l'humanité ( comme on peut le voir ici et ici ). 

La date du 8 mai rappelle à nouveau que le fascisme et le nazisme seront vaincus, mais que si on les laisse prospérer, ils auront auparavant provoqué d'effroyables catastrophes. 

MEMORIAL 98


 

 

Stéphane Amelineau, professeur documentaliste, avec un groupe de  lycéens à Auschwitz

 

La mission des professeurs documentalistes est  de rendre les élèves autonomes dans leur accès au savoir, à l'aide des ressources pédagogiques et documentaires de l'établissement.

 

Ces enseignants sont chargés d’animer les  CDI (Centre de Documentation et d'Information) en collège ou en lycée

 

Un combat contre l'intolérance et les préjugés

 

Stéphane Amelineau exerce cette profession dans la région de Soissons. Après un parcours atypique d’employé de bureau puis comptable, il obtient une licence d'histoire et un Capes de documentaliste.

Dès l'âge de dix ans, il entend parler des deux guerres. "Tranchées, poilu", c'est "Pépé Jules", son arrière-grand-père paternel, blessé aux Chemin des Dames, dont il garde soigneusement une photo.

Son grand-père maternel est quant à lui enrôlé dans le service du travail obligatoire (STO) contre son gré, à Berlin,où il assiste à des scènes effroyables. Il lui enseigne pourtant la tolérance vis-à-vis des jeunes Allemands afin de construire une Europe meilleure.

A cette même époque, il entrevoit sur l'écran de télévision des scènes effrayantes de la série américaine : "Holocauste". Quatre épisodes pour décrire la destruction des Juifs d’Europe à travers deux familles, l'une juive et l'autre nazie.

Plus tard complétée par des lectures, cette expérience précoce va déterminer son combat et sa pédagogie auprès de la jeunesse pour éduquer et lutter contre l'intolérance, les préjugés et l'oubli.

 

"La question de la Shoah m'intéresse par humanisme. Ce qui me taraude c'est la question du lien paradoxal entre Auschwitz et l'humanité."          

 

Lutter contre l'oubli :

De collèges en lycées, il raconte l’histoire du « convoi n°67 » . Grâce à des documents d'archives, il a retrouvé la liste des personnes déportées dans le département de l'Aisne et qui faisaient partie de ce convoi qui mit trois jours pour arriver à Auschwitz. Il raconte les bourreaux et les victimes d’Auschwitz-Birkenau.

Fort de sa propre expérience, il est convaincu que confronter les jeunes à des témoignages vivants, des vidéos ou des photos est la meilleure façon de transmettre l'histoire de la Shoah.  

Itinéraire de mémoire

Entre 2003 et 2016, il organise six voyages pour Auschwitz, en passant par Cracovie.

Yvette Lévy, une des dernières rescapées d'Auschwitz-Birkenau, accompagnera un de ces voyages.

 

Qui participe à ces voyages ?

Ce sont des élèves volontaires de son lycée Saint-Rémy de Soissons. 1/3 de garçons, 2/3 de filles qui préparent un STSS (Science et technique sanitaire et sociale). Environ 35 élèves et des collègues accompagnateurs à chaque voyage.

 

Préparation au voyage :

Un atelier pédagogique organisé pour les recherches sous forme d'enquête.

Pendant trois ou quatre mois, Stéphane et ses élèves accomplissent un travail de fourmis, en dehors du temps scolaire. Cet effort est soutenu par l'Éducation Nationale et le Mémorial de la Shoah.

 

Tous les élèves volontaires ont pu participer aux voyages.

 

La déportation des Juifs du Soissonnais

Au cours de leur enquête, les élèves découvrent que à Soissons, il y a eu deux grandes rafles: la première les 19 et 20 juillet 1942, opérée par la gendarmerie locale et la seconde le 4 janvier 1944 organisée par la police allemande. 31 Juifs de la région ont été déportés, 4 sont revenus en 1945.

 

Grâce aux recherches dans les archives, ils retrouvent les noms d'enfants, d'adolescents, d'adultes, témoins ou acteurs de cette époque et qui acceptent de témoigner. A 70 et même 90 ans, au soir de leur vie, toutes ces personnes portent les traces du traumatisme de ce qu'ils ont vécu.

Les révélations du destin de leurs parents ou grands-parents déportés sont consignées dans des registres : Gazés, pas gazés, sélection pour le travail, date du décès. Des révélations traumatisantes et libératrices. C'est comme redonner vie à ceux qui n’étaient pour les protagonistes que des noms inscrits sur des listes interminables.

 

Des familles de victimes ont fait le voyage jusqu'à Auschwitz pour la première fois

Ils ont pu aller se recueillir derrière le bois de bouleaux, là où se trouvait l'une des deux chambres à gaz provisoire (Bunker 1) ˝La maison blanche˝, (l’autre, Bunker 2, appelé aussi ˝ Maison rouge ˝). Deux sites de mise à mort, dans les chaumières de paysans polonais, réquisitionnées en 42, aménagées en chambre à gaz, tandis, que non loin, s'élaboraient les futures  complexes de chambres à gaz-crématoires  destinées à l'extermination de masse (Krematorium II, III, IV et V)

Peu de guides emmènent les visiteurs jusque là.

Les bougies du souvenir, en face des anciennes fosses de crémations où furent incinérer des milliers et des milliers de corps de Juifs assassinés entre l’été 1942 et le printemps 1943, puis réutilisées durant l’été 1944. La photo au pied d’une des pierres noires, le portrait de Rose Lewkowicz, la mère de Nathan Lewkowicz (voir ci-dessous).

 

Durée du voyage

Le voyage se déroule sur trois ou quatre jours avec un arrêt à Cracovie, ville de Pologne située à 65 km d'Auschwitz-Birkenau, dont l'ancien quartier juif de Kazimierz est classé au patrimoine de l'UNESCO.

 

 

Une nouvelle expérience vers des plus jeunes 

Après avoir rencontré des centaines de collégiens, lycéens, étudiant et adultes, Stéphane décide de se lancer dans une nouvelle expérience quant à la transmission de l'Histoire de la Shoah vers les plus jeunes. Comment adapter la manière d'aborder la persécution des Juifs de Soissons, avec des élèves de 10 et 11 ans ? Il s'appuie pour cela sur les programmes scolaires d'Histoire et les conseils préconisés par le Mémorial de la Shoah.

 

Raconter la Shoah à des enfants d'une classe de CM1- CM2

Une enseignante de l'école primaire de Noyant, village près de Soissons avait lu le livre de Stéphane A. :" La Shoah en Soissonnais".

Elle l'invite à venir en parler aux élèves de sa classe. C'est l'occasion pour Stéphane d'adapter sa pédagogie.

L'enseignante et lui-même se rencontrent à plusieurs reprises pour bien préparer cette intervention.

Le jour de sa venue dans la classe, les élèves sont déjà sensibilisés à un certains nombre de notions : Qu'est-ce que la Shoah ? Qui sont le Maréchal Pétain et Hitler ? Qu'est-ce qu'une chambre à gaz ?  Pourquoi, des enfants ont été cachés, comme Armand, un enfant juif de Noyant. ?  Chacun a une représentation de ces événements : "Les Juifs sont partis dans les trains. Il y avait plein d'étoiles."

 

Pendant deux heures et demie, Stéphane A. raconte…

Stéphane conte l'histoire de Maurice Wajsfelner. Ce petit garçon de 10 ans, est arrêté avec sa tante Chaja, le 4 janvier 1944 dans son appartement à Soissons. Ses parents et son grand-frère Charles avaient déjà été arrêtés pendant la rafle de 1942.  

D'autres enfants ont subi le même sort à Soissons, comme Nelly (4 ans) et Albert Gochperg (9 ans). D’autres, comme Lisette Ehrenkranz, Viviane Bich ou encore les enfants Lewkowicz ont pu être cachés par "des messieurs et des dames au grand cœur". (Des justes parmi les Nations de France).  

 

Le vocabulaire est choisi, les prénoms, noms et adresses (à Soissons) accompagnent des photos comme celles de Maurice et de sa famille.

Stéphane a rassemblé des jouets anciens, patins à roulettes, guignol, carabine qui ont été volés aux enfants. Autant, de preuves visibles et palpables. Les enfants sont autorisés à poser des questions au fil du récit.

Ils sont interloqués, suffoqués, touchés de ce qu'ils entendent, entièrement à l'écoute.

 

Les prolongements pédagogiques dans la classe

Un travail d'écriture va se faire avec l'enseignante en prolongement de la présentation. Un texte à trous, des dessins, des productions écrites. Suzanne, la cousine de Maurice plus jeune que lui, a échappé à l'arrestation du 4 janvier 1944. Elle est partie vivre au Brésil après la guerre.

Désormais, les élèves de la classe de CM1-CM2, ont pour mission de retrouver la cousine de Maurice. Stéphane a proposé aux enfants d'écrire un mot pour l'envoyer à cette cousine au cas où elle serait encore en vie.

Tous ces écrits lui ont été remis. "Ces messages, dans une capsule numérique envoyés dans l'océan Internet, comme une bouteille à la mer " dit-il.

 

 

 

Conclusion

Quels ont été les objectifs de ce travail ?

Sensibiliser les élèves à l’histoire de la Shoah en général et sur le destin de familles en particulier. Décrypter des destins au travers de documents d’archives et de témoignages. Les éclairer sur l’organisation de la déportation en France et la mécanique de déshumanisation et de destruction des Juifs dans les camps d’extermination. Rechercher, sélectionner, analyser et traiter des sources historiques afin de confronter les élèves au travail de l’historien et développer leur esprit critique. De manière cognitive, souligner l’importance de la solidarité et de la tolérance pour ne jamais laisser quelqu’un au bord de la route.

 

L'éducation précoce pour lutter contre les "métastases du nazisme" pourrait-elle semer une graine de tolérance contre les préjugés, comme ce fut le cas pour Stéphane ?

 

Cette expérience très pointue auprès de jeunes adultes et de jeunes enfants a attiré l'attention de Memorial 98. La mémoire des génocides et des crimes contre l'humanité ne résume pas à des commémorations mais nourrit les combats actuels 

 

EL

 

MEMORIAL 98



Bibliographie

Stéphane Amelineau décrit son parcours dans un livre : "La Shoah en Soissonnais, journal de bord d'un itinéraire de mémoire", paru aux éditions Fondation pour la Mémoire de la Shoah/Le Manuscrit, Paris, 2017.

http://www.fondationshoah.org/memoire/la-shoah-en-soissonnais-journal-de-bord-dun-itineraire-de-memoire-stephane-amelineau

 

 Son site rend compte de son travail https://itinerairesdememoire.com/

 

 

 

 

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23 avril 2018 1 23 /04 /avril /2018 21:13

103e anniversaire du génocide des Arméniens de 1915: nous alertons  sur la situation en Turquie aujourd'hui.

La répression du régime Erdogan touche particulièrement les démocrates et les minorités. Le parti HDP, qui représente notamment la population kurde mais aussi Arménienne, subit durement les mesures gouvernementales. Des dizaines d'élus, maires et députés du Parti démocratique des peuples ( HDP), dont ses deux co-présidents, Selahattin Demirtaš et Figen Yüksekdağ, sont emprisonnés sous prétexte de complicité avec des terroristes.

Garo Paylan, député Arménien du HDP pour la ville d’Istanbul, subit des violences et menaces continues de la part du parti présidentiel de l'AKP ainsi que du parti d'extrême-droite MHP. La situation risque d'ailleurs de s'aggraver si Erdogan parvient à obtenir au cours des élections anticipées du 24 juin prochain un nouveau mandat présidentiel aux pouvoirs renforcés. 

La reconnaissance du génocide arménien se poursuit dans différents pays, malgré les énormes pressions de la Turquie.

 

A l'occasion de la commémoration du génocide arménien, un projet important nommé " Les racines du mal " voit le jour afin d'enquêter sur la continuité entre ce génocide et la Shoah, à travers un film documentaire.

Avec nos partenaires du Collectif VAN et de Ibuka France, nous soutenons ce projet, présenté ci-dessous. 

 

Il correspond à nos engagements autour de la mémoire des génocides qui nourrit nos combats .

Cette mémoire commune est particulièrement perceptible lors commémorations du mois d'avril, au cours duquel est honorée la mémoire des victimes des trois génocides majeurs du XXe siècle : celui des Tutsi du Rwanda le 7 avril, celui de la Shoah le 19 avril correspondant au début du soulèvement du ghetto de Varsovie le 19 avril 1943 celui des Arméniens le 24 avril correspondant aux premières arrestations des intellectuels arméniens à Constantinople/Istanbul en avril 1915.

 

Nous appelons à participer à la réalisation du projet  " Les racines du mal en contribuant au financement collaboratif (crowfunding) qui doit permettre sa réalisation, en suivant ce lien:  

 

https://www.kisskissbankbank.com/les-racines-du-mal

 

Et comme le demandent les responsables de ce projet, dont nous saluons l'engagement,

 

"Aidez-nous à donner de l’élan à la campagne ! En faisant suivre ce lien à vos amis et contacts qui peuvent être intéressés, ou en partageant le lien de la collecte autour de vous. Si chacun d'entre vous réussit à convaincre 2 amis, nous franchirons vite le 1er objectif, qui nous permettra de démarrer le tournage du film cet été.

Merci encore de tout coeur pour votre soutien ! 

Nous remercions également, pour leur précieux soutien, les organisations qui ont choisi de nous accompagner dans cette aventure "

 

Nous considérons que les différents génocides ont des liens profonds entre eux car dans tous les cas les populations promises à l’extermination ont été d’abord été discriminées, stigmatisées, accusées de tous les maux, puis désignées comme ennemies, regroupées, marquées et « étiquetées » sous différentes formes et enfin conduites à l’extermination ou massacrées sur place. Le génocide est l’aboutissement de décennies, voire de siècles, de discriminations.

 

Un autre point commun à ces génocides est qu'ils font face à des entreprises de  négation, dans le cadre d’une solidarité avec ceux qui ont perpétré le génocide. Nous luttons contre ce phénomène très organisé, mis en place par les génocidaires eux mêmes et qui constitue avec l’impunité une incitation à de nouveaux massacres.

Le but des génocidaires, en tout temps et en tout lieu, ne consiste pas seulement à assassiner les vivants, mais aussi à nier à tout jamais leur existence.

 

C’est pour cette raison que les négationnismes sont consubstantiels aux génocides. En niant, il ne s’agit pas seulement d’une tentative faite par les assassins pour échapper aux conséquences de leurs crimes. Au même titre que les massacres physiques de masse, la négation est au service au service du but final : effacer de l’histoire et de l’humanité une partie des hommes et des femmes qui la constituent.

Hitler lui–même trouvait un encouragement dans la manière dont le génocide arménien était nié :
« Mais qui se souvient encore du massacre des Arméniens ? » déclarait-il dans une allocution aux commandants en chef de l'armée allemande le 22 août 1939, quelques jours avant l'invasion de la Pologne.

 

 

 

 

« Les racines du mal » ( voir le site ici ) est un projet de film documentaire mêlant enquête historique, film d’animation et rencontres avec les acteurs du travail de mémoire pour comprendre comment le génocide des Arméniens a pu contribuer à rendre possible la Shoah.

 

 

                            Du génocide des Arméniens à Auschwitz

 

Lors d’une visite de l’ancien camp d’extermination d’Auschwitz-Birkenau, Anna et Mathieu apprennent que des officiers allemands - qui avaient été en poste dans l’Empire ottoman durant la première Guerre mondiale, alors que se déroulait le génocide des Arméniens - se sont ensuite retrouvés dans la garde rapprochée d’Hitler. Tel Rudolf Höss qui deviendra commandant du camp d’Auschwitz. En creusant un peu, ils découvrent que des historiens soutiennent maintenant que les nazis ont été influencés par l’extermination des Arméniens, qui a pu servir de modèle pour la « solution finale ». Alors, décidés à en savoir plus sur les liens entre ces deux génocides, ce couple de documentaristes mène une enquête historique et de terrain, qui plonge ses racines avant 1915 pour remonter jusqu’à nos jours, afin d’apporter un éclairage nouveau sur l’impact qu’à eu l’extermination des Arméniens sur l’histoire européenne, et comprendre pourquoi le fantôme du génocide des Arméniens ressurgit à intervalles réguliers en Europe... 

Des organisations et associations dont Memorial 98 sont partenaires du projet et le soutiennent .

Le 2 juin 2016, le parlement allemand adopte une résolution reconnaissant le génocide des Arméniens. Mais, la résolution votée au Bundestag va plus loin, puisqu’elle reconnaît que l’Allemagne, alliée historique de la Turquie, porte une part de responsabilité dans les évènements de 1915. On sait à présent que l’Empire allemand masqua les politiques de violence envers les Arméniens, que les officiers allemands en poste dans l’Empire ottoman furent les témoins de leur martyre et qu’ils fermèrent les yeux. Ce que l’on sait moins, c’est que certains d’entre eux sont ensuite devenus des officiers nazis et furent proches d’Hitler.

Des historiens soutiennent même qu’ils ont été influencés par cette expérience qui a pu servir de modèle pour la « solution finale ». Ainsi, le travail de mémoire entamé par l’Allemagne nous amène à porter un nouveau regard sur le rôle qu’a joué l’extermination des Arméniens dans l’idéologie nationale-socialiste et dans la décision d’éliminer les Juifs d’Europe, 25 ans plus tard.

Le modèle turc

Dans une interview qu'il accorda en 1931 à Richard Breiting, le rédacteur en chef du  journal Leipziger Neueste Nachrichten, Hitler évoquait la destruction des Arméniens, et parlait de la déportation, des déplacements et du massacre comme des moyens de fournir de « l'espace vital » à l'Allemagne et à la race aryenne. « Pensez aux déportations bibliques, aux massacres du Moyen Âge… et rappelez-vous de l'extermination des Arméniens… on tire finalement la conclusion que des masses d'hommes ne sont rien d'autre que de la pâte à modeler biologique ». La Turquie post-génocidaire avait fasciné les nationalistes et l'extrême droite d’Allemagne. La Turquie était un État moderne et florissant qui avait réglé ses problèmes de minorités de façon définitive, et en toute impunité. Elle avait fourni la preuve que la purification d’une nation de ses éléments indésirables à une grande échelle était possible et que c’était le fondement préalable à la mise en place du rêve nationaliste. Elle devint un modèle à suivre pour le national-socialisme allemand qui aspirait à un nouveau type d'Etat.

Une enquête historique et actuelle.

En retraçant le destin de Rudolf Höss - jeune soldat allemand affecté à une division turque pendant la Première Guerre mondiale et qui deviendra commandant du camp d’Auschwitz 25 ans plus tard - ou celui de Max Erwin von Scheubner-Richter - consul à Erzurum en 1915 et ami proche d’Hitler par la suite - nous voulons suivre la trace laissée par le génocide des Arméniens dans l’histoire allemande et européenne. Une enquête historique qui offrira une relecture des implications allemandes dans l’extermination des Arméniens. 

MEMORIAL 98 

 

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5 avril 2018 4 05 /04 /avril /2018 18:17

Le 7 avril marque le début du génocide des Tutsi du Rwanda et des "jours de sang" du mois d'avril, alors que se renforce l'exigence de vérité sur les responsabilités des autorités françaises  :

 

C'est à ce génocide que revient en effet le triste privilège d'ouvrir les commémorations du mois d'avril, au cours duquel est honorée la mémoire des victimes des trois génocides majeurs du XXe siècle : celui des Tutsi du Rwanda le 7 avril (date du début des massacres en avril 1994) celui de la Shoah le 19 avril (correspondant au début du soulèvement du ghetto de Varsovie le 19 avril 1943 celui des Arméniens le 24 avril (correspondant aux premières arrestations des intellectuels arméniens à Constantinople/Istanbul en avril 1915).

 

Nous y associons le premier génocide du XXe siècle commis en 1904 par l'Allemagne impériale  contre les peuples Herero et Nama en Afrique australe,  les actions génocidaires en Bosnie à Srebrenica, au Darfour, le génocide nazi des Roms, les actions génocidaires du régime khmer rouge au Cambodge et la récente tentative d’extermination des Yézidis d’Irak par Daech.

 

Ces différents génocides ont des liens profonds entre eux car dans tous les cas les populations promises à l’extermination ont été d’abord été discriminées, stigmatisées, accusées de tous les maux, puis désignées comme ennemies, regroupées, marquées et « étiquetées » sous différentes formes et enfin conduites à l’extermination ou massacrées sur place. Le génocide est l’aboutissement de décennies, voire de siècles, de discriminations.

 

Un autre point commun à ces génocides est qu'ils font face à des entreprises de  négation, dans le cadre d’une solidarité avec ceux qui ont perpétré le génocide. Nous luttons contre ce phénomène très organisé, mis en place par les génocidaires eux mêmes et qui constitue avec l’impunité une incitation à de nouveaux massacres.

Le but des génocidaires, en tout temps et en tout lieu, ne consiste pas seulement à assassiner les vivants, mais aussi à nier à tout jamais leur existence.

 

C’est pour cette raison que les négationnismes sont consubstantiels aux génocides. En niant,il ne s’agit pas seulement d’une tentative faite par les assassins pour échapper aux conséquences de leurs crimes. Au même titre que les massacres physiques de masse, la négation est au service au service du but final : effacer de l’histoire et de l’humanité une partie des hommes et des femmes qui la constituent.

 

Afin de contribuer à faire face à cette tentative d'extermination et de négation, 

nous présentons les "Cahiers de Mémoire de Kigali" parus en 2017 et l'extraordinaire démarche qui a conduite à leur publication, sous l'impulsion de Florence Prudhomme.

 

Cette oeuvre collective est issue de l ’Atelier de mémoire a créé en 2014 - lors de la 20e commémoration du génocide des Tutsi au Rwanda - au sein de la Maison de quartier Rwanda avenir à Kigali, un lieu construit pour et avec des femmes rescapées. Leurs témoignages composent cette oeuvre. 

 

 

Septembre 2004 : Mémorial de Gisozi à Kigali. Deux veuves m’accompagnent. Au cours de cette visite, l’une d’elles s’effondre : elle a perdu l’ensemble de sa famille - environ 80 personnes. L’autre voudrait fuir son pays qu’elle estime  « déchiré et détruit ». Entre cauchemar et phobie, elle rejette d’un même geste sa maison, son quartier et le pays tout entier. Elle dit ne plus rien attendre pour elle-même - « Moi, c’est fini, je suis morte » -, mais lorsqu’elle parle de sa fille, l’avenir semble de nouveau s’ouvrir. Là est né le projet de construction d’une Maison de quartier, pour se réapproprier l’espace, du plus intime au plus vaste.

 

A Kigali, présentation des Cahiers de mémoire

 

L’association Rwanda avenir a été créée en 2004, lors de la dixième commémoration du génocide des Tutsi, qui a fait en trois mois près d’un million de morts. Les survivants sont majoritairement des femmes, « les veuves », et des enfants, « les orphelins ».

Rwanda avenir se situe délibérément dans la perspective de l’après-génocide et s’est fixé comme objectif prioritaire de participer à la reconstruction psychique des victimes.

 

Au Rwanda, les séquelles traumatiques sont omniprésentes. Vivre au Rwanda aujourd’hui suppose de transformer une mémoire meurtrie et sidérée en une mémoire dynamique, porteuse d’avenir. Cette démarche est celle des soignants rwandais. En particulier celle du pionnier le Dr Naasson Munyandamutsa (décédé en 2016 et auquel Memorial 98 a rendu hommage ici ) et d’Esther Mujawayo, rescapée du génocide,  co-fondatrice de AVEGA (Association des Veuves du Génocide d'Avril 1994) auteure de deux livres de témoignage Survivantes, et La fleur de Stéphanie, écrits avec la journaliste Souâd Belhaddad (contributrice de Memorial 98 notamment sur le Rwanda )

Sur le terrain, les thérapeutes, conseillers en traumatisme, les associations de rescapés et les associations de femmes prennent en charge la détresse d’une population traumatisée, pauvre et souvent malade.

 

Habiter sa terre, sa maison, une ville, un pays. Donner lieu à un espace de reconstruction de soi. Tels ont été les prémices de la Maison de quartier.

 

Elle a été construite avec et pour les rescapées du génocide à Kimironko (Kigali, Rwanda). C’est un ensemble de quatre bâtiments, situé à une cinquantaine de mètres du lotissement groupé où vivent 125 veuves. À l’initiative de l’Association des veuves du génocide d’Avril (AVEGA), le Fonds d’aide aux rescapés du génocide (FARG) a financé, la construction de leurs maisons.

L’ouverture d’un lieu d’échanges, d’apaisement, d’écoute, est facteur de paix et de développement. Les activités thérapeutiques, mémorielles, créatrices et culturelles ont été privilégiées au sein de la Maison de quartier pour briser la force d’attraction quasi hypnotique que conserve souvent le souvenir traumatique. Des activités génératrices de revenus (dont un atelier d’art Imigongo) ont été mises en œuvre.

 

Construire une Maison de quartier, c’est se donner un lieu d’accueil et d’hospitalité.

Les veuves très démunies rencontrent d’extrêmes difficultés pour subvenir à leur vie quotidienne et à celle de leurs enfants survivants et des orphelins qu’elles ont recueillis. Le coût élevé des déplacements restreint leur mobilité et leur impose de rester isolées et sans activités dans leur quartier ou dans les collines. Leur demande de soutien psychologique est forte.

Le choix de construire une Maison de quartier s’est trouvé conforté par les veuves qui ont exprimé avec enthousiasme leur adhésion à ce projet qui répond à leur besoin d’un lieu pour « se rencontrer », être ensemble et mener des activités collectives.

 

MEMORIAL 98

 

 

L’atelier de mémoire


L’atelier de mémoire a été créé lors de la 20e commémoration du génocide perpétré contre les Tutsi au Rwanda. Des « grandes mamans », des jeunes, des femmes, des hommes se sont réunis au rythme d’une matinée par semaine. Ils ont écrit chacun leur Cahier de mémoire. Ils les ont lus aux autres.

Le respect mutuel, la confiance et leur commune expérience étaient le socle de leurs échanges. Ces mémoires singulières sont l’histoire du génocide, elles en restituent la réalité composite et sont une archive pour les générations futures.

Cris ; odeurs âcres, fumées et sang ; fuites et poursuites, annoncées par des persécutions accumulées durant plus de trois décennies ; terreur ; regroupements effarants.

Violence extrême - une population exterminée, près d’un million de victimes. Des paysages anéantis par le projet génocidaire. Les rescapés sont porteurs de cette histoire. Leur mémoire individuelle et collective est porteuse de ce qu’aucun mémorial ne peut exprimer. Le mémorial transmet l’horreur, le résultat du génocide – mais il est muet, aucun sang n’irrigue les corps gisants atrocement mutilés, figés dans leur dernier instant d’effroi ou ensevelis dans des fosses communes.

« Nous partageons une même histoire ». Les rescapés parlent une langue, le kinyarwanda, où certaines expressions sont difficiles à traduire, non pas littéralement, mais par leur trop plein de significations. . C’est l’histoire qu’ils ont vécue parce qu’ils sont nés Tutsi. Les Cahiers de mémoire font entendre le sort commun. « Les nôtres », ceux qui ne sont plus là et ceux qui sont restés. Une histoire à priori indéchiffrable pour les enfants tutsi dont la vie bascule en 1959.

Annonciata a huit ans au moment du génocide, elle ne recevra aucune réponse aux questions qu’elle pose de manière répétée  à sa mère. Plus tard, face à des situations demeurées inexplicables pour la fillette qu’elle est encore, elle reprendra à son compte ce silence : « Je me suis tue. » Après le génocide, elle sera frappée d’oubli, d’amnésie. Il lui arrivera d’oublier jusqu’à son nom ou la présence de ses enfants à ses côtés. L’absence a tout envahi, le monde est devenu un gouffre insondable.

Les Cahiers de mémoire restent prioritairement des récits du génocide, mais la remémoration s’étend en amont et en aval, ils parlent de l’amour, des saisons, de la famille, des traditions. Comme les Livres du souvenir (Yzkhor- buch) écrits par les survivants de la Shoah, ils suivent un rythme ternaire : avant, pendant, après, mais le fil conducteur, l’épicentre, demeure le génocide.

Mémorial pour les disparus, conservatoire de leurs noms, conservatoire des familles décimées, les Cahiers de mémoire occupent un espace où se rejoignent la nomination des disparus et le récit énonciatif et mémoriel, qui restitue le vivant/le réel de celles et ceux qui ont péri.

Pendant. Toutes les collines, toutes les pistes étaient couvertes de barrières, toutes les routes étaient « barrées pour notre race ». Les portes demeurent impitoyablement closes : « Aujourd’hui, ce n’est pas hier, prends ton enfant et pars d’ici. » Quelques exceptions pourtant. Le voisin cache puis accompagne celui qui fuit un peu plus loin. L’errance se déroule dans un périmètre variable. Au-delà des frontières. L’Ouganda, le Burundi, le Zaïre, la pointe nord du lac Tanganyika, l’île d’Ijwi. À l’intérieur du pays, dans les limites géographiques d’une préfecture, d’une région, d’une commune. Entre les maisons éparses sur la colline.

Ce sont des allers-retours éperdus. La fuite est circonscrite. Tellement entravée qu’on parle de « piétinement ». Comme un animal pourchassé pris dans le piège. Le paysage, ce sont les lieux où l’on espère trouver secours : des églises, des écoles, des centres de santé, « une brousse impénétrable », un pont. Tout autour les champs de sorgho, les bananeraies, les roseaux et les papyrus, la terre détrempée du mois d’avril. La pluie donne le signal d’un court répit : les Interahamwe (miliciens génocidaires Hutu) cessent de traquer leurs « cibles ». Le paysage sonore, ce sont les hurlements des Interahamwe. Leurs slogans, leurs cris, les coups de sifflets. Les roulements saccadés des tambours. Les vociférations de la Radio-télévision des Mille collines, livrant les noms et les lieux précis où sont cachées jusqu’à l’asphyxie les familles tutsi. Les pas qui se rapprochent. Les ultimes cris d’effroi, les gémissements durant des nuits entières. Pendant cent jours et cent nuits.

 

Après. Nous avons choisi d’accompagner les rescapé-e-s tout au long de leur parcours de reconstruction de soi ( nommée Twiyubaka). Les thérapeutes rwandais ont guidé nos pas. Naasson Munyandamutsa, dès le premier jour. Et plus tard Emilienne Mukansoro, et Béatrice Niweburiza.

En 2013, un voyage de mémoire nous a emmenées, les grandes mamans et nous, dans le sud du pays. Nous avons traversé des régions lourdes de souvenirs et d’absences. Les cris, les pleurs jaillissent. C’était là. Il ne reste que des épineux et des brousses. Les lieux sont dévastés, abandonnés, détruits à jamais. Au cours du voyage pourtant surgissent d’autres souvenirs, des légendes que racontaient les grands-parents, des histoires énigmatiques, des contes. Une restauration du paysage se met à l’œuvre. Les souvenirs heureux se mêlent au chagrin. Les lieux s’animent et s’apaisent. La présence des disparus est une image vivante. Les troupeaux reviennent sous les yeux. Et aussi les matinées où on récoltait des herbes qui rassemblées en gerbes se balançaient joyeusement au-dessus de la tête des petites filles. Les saisons étaient celles des récoltes et des veillées où se transmettait l’histoire du Rwanda. Les heures étaient celles où l’on trayait les vaches Inyambo, où on buvait le lait. Les fêtes, les naissances, les baptêmes, les cérémonies de la dot, du mariage, de Gutwikurura.

 

Cette reviviscence mémorielle donne les forces de ne pas suffoquer en entendant le cri qui, de travée en travée, transperce le stade Amahoro où se déroulent les commémorations du génocide. Les traumas éclatent lors des veillées de mémoire inondées de larmes, qui agissent comme de fulgurantes thérapies. Des scènes de compassion inouïes voient le jour. Le lendemain c’est l’apaisement. C’est plus que de l’apaisement, c’est de « la joie », dit Emilienne sans pouvoir trouver d’autre mot après la veillée de mémoire de la 18e commémoration. Les pratiques thérapeutiques inédites mises en œuvre au Rwanda sont un apport inestimable pour la clinique, partout où les catastrophes et les désastres anéantissent de manière récurrente et massive les êtres humains. L’atelier de mémoire y a puisé son inspiration.

Un mouvement sans fracas anime la psyché de celles et ceux qui dans leurs récits tressent les fils d’une temporalité tridimensionnelle qui avait volé en éclats. Les pleurs, les cris, les souvenirs ouvrent la voie aux élans de la reconstruction de soi. À l’injonction criminelle, « Aucun de vous ne doit survivre », répond le choix de vivre qui se dit en kinyarwanda : Kubaho kwawe kuranyubaka, « Ton choix de vivre me fait exister ».

Florence Prudhomme

 

MEMORIAL 98


 

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22 février 2018 4 22 /02 /février /2018 18:37

 

 

 

                                     Hans Scholl, Sophie Scholl, Christoph Probst.

 

 

Le 22 février 1943, trois jeunes résistants allemands antinazis du groupe de la "Rose Blanche", Hans Scholl, Sophie Scholl et Christoph Probst étaient guillotinés, après une parodie de jugement. 

Ils avaient  été arrêtés quelques jours auparavant, le 18 février, après une action audacieuse dans l'Université de Munich (voir ci-dessous) .

En quelques mois seulement ils ont écrit une page particulièrement glorieuse et émouvante de la résistance au nazisme, au cœur même de son espace. Leur mémoire mérite un hommage particulier alors que partout en Europe et aux USA, les tenants du fascisme et du nazisme sont à l'offensive notamment en Allemagne, Autriche, Hongrie, Pologne, Italie ...     

L'histoire de la "Rose blanche" est celle d'un groupe de jeunes Allemands et d'un de leurs professeurs qui s'engagent dans une résistance de plus en plus déterminée au régime nazi. 

Ils sont six:

Hans Scholl, né en 1918
Alexander Schmorell, né en 1917
Christoph Probst, né en 1919
Willi Graf, né en 1918
Sophie Scholl, née en 1921
Leur professeur, Kurt Huber, né en 1893

Dans un premier temps, Hans et Sophie Scholl sont attirés par les thèmes du nouveau Reich, comme beaucoup d'autres gens de leur âge.

En 1938, Hans est néanmoins arrêté par la Gestapo pour appartenance à des "groupes de jeunesse interdits". Chrétiens, ils sont non-conformistes, alors que l’Allemagne est uniformisée par les nazis.

Puis ils sont influencés par leurs lectures et ce qu'ils observent sur le front. En effet, les garçons du groupe font partie des étudiants autorisés à poursuivre leurs études, tout en étant mobilisés dans l'armée. Pendant les vacances universitaires, ils redeviennent soldats. Ainsi Hans Scholl, qui a participé à la campagne militaire de France, s’y est procuré des livres qui influencent son entrée en opposition.
 

Une autre membre du groupe, Alexander Schmorell, élevé par une gouvernante russe, peut ainsi parler dans leur langue à des paysans sur le front russe. C’est lui qui révèle au groupe le génocide des Juifs .

Dès leur deuxième tract de juin 1942, ils alertent sur le sort des Juifs en Pologne et écrivent: 
..."dreihunderttausend Juden in diesem Land auf bestialischste Art ermordet worden sind..."
..."depuis la mainmise sur la Pologne, 300 000 Juifs de ce pays ont été abattus comme des bêtes. C’est là le crime le plus abominable perpétré contre la dignité humaine, et aucun autre dans l’histoire ne saurait lui être comparé. Qu’on ait sur la question juive l’opinion que l’on veut : les Juifs sont des hommes et ce crime fut commis contre des hommes..."

Les tracts du groupe étaient diffusés dans les boites aux lettres ou envoyés à des destinataires chargés de les recopier. Ils ont rédigé en tout six tracts appelant à la résistance contre le régime.
Ils les envoient à Hambourg, Sarrebrück, Ulm, Fribourg, Stuttgart, Berlin.
A Berlin, Ruth Andreas-Friedrich et son groupe de résistance nommé "Onkel Emil" (Oncle Emile), recopient le sixième tract et le diffusent.

En janvier 1943, le chef nazi de Bavière, Giesler, déclare aux étudiantes de Munich qu’elles feraient mieux d’offrir un enfant au Führer plutôt que de poursuivre leurs études. Cette injonction déclenche des protestations de la part des étudiant.e.s.
Le groupe peint alors des slogans sur les murs de l’université à Munich :" FreiheitLibertéNieder mit Hitler, A bas Hitler"

La défaite nazie de Stalingrad en février 1943 inspire leur sixième et dernier tract, écrit par le professeur Huber et diffusé à 3000 exemplaires.

Le 18 février 1943, Hans et Sophie Scholl lancent ce sixième tract dans le hall (Lichthof) de l'Université Ludwig Maximilian de Munich.  Ils y appellent les étudiants à se soulever contre la dictature, pour « la liberté et l’honneur ». Ils sont dénoncés par le concierge de la faculté, arrêtés et remis à la Gestapo.

Un tribunal nazi, nommé « Tribunal du peuple » est immédiatement convoqué le 22 février à Munich.  Son président vient spécialement de Berlin afin de  "juger" les accusés.
 

Condamnés à mort pour "haute trahison", Hans et Sophie Scholl, ainsi que Christoph Probst, sont guillotinés quelques heures seulement après le jugement, dans la prison de München-Stadelheim. Après un deuxième procès, le 19 avril 1943, Kurt Huber, Alexander Schmorell et Willi Graf sont également guillotinés.

Un de leurs tracts déclarait:  "la honte pèsera pour toujours sur l’Allemagne, si la jeunesse ne s’insurge pas enfin pour écraser ses bourreaux"...

La mémoire de leur engagement nourrit nos combats 

21 Février 2020:  Hanau, Thuringe, la menace des héritiers du nazisme.

Le 77e anniversaire de l'exécution des membres de la Rose Blanche se déroule dans un contexte dramatique, quelques jours après l'attentat d'extrême-droite de Hanau qui a fait neuf victimes. Auparavant c'est la synagogue de Halle qui avait été attaquée par un terroriste néo-nazi qui a tué deux personnes ( voir ici )

Dans la même période, une alliance entre la droite et le parti AfD en Thuringe, sous la direction du négationniste Björn Hoecke, a provoqué une crise politique majeure (voir ici)

Il apparaît que la lutte contre l'extrême-droite et contre la propagande néo-nazie et complotiste a été gravement négligée par les pouvoirs publics allemands, comme l'a déjà démontré la longue entreprise meurtrière de la cellule néo-nazie NSU ( voir ici)

MEMORIAL 98

Mise à jour du 4 Mai 2019

Hommage à Traute Lafrenz, dernière survivante de la Rose Blanche, qui fête son centième anniversaire. Elle vient d'être décorée de l'Ordre du Mérite, plus haute décoration civile allemande.

 

Memorial 98

Voir sur l'actualité en Allemagne http://info-antiraciste.blogspot.com/2020/02/alerte-en-allemagne-lextreme-droite.html

 

 

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12 octobre 2017 4 12 /10 /octobre /2017 19:00

Le 9 novembre, Memorial 98, avec ses partenaires du Collectif VAN (Vigilance Arménienne contre le négationnisme) et de l'association Ibuka-France (Justice et soutien aux rescapés du génocide perpétré contre les Tutsi au Rwanda)  vous invite à participer à la  commémoration de la « Nuit de Cristal », pogrom d’État commis par les nazis le 9 novembre 1938 contre les Juifs d’Allemagne et d’Autriche.

 

 

Pour la quatrième année consécutive, nous nous rassemblerons à Paris, à partir de 19h, devant le gymnase Japy, lieu symbolique dans lequel furent parqués en 1942, les Juifs raflés par la police française au service des nazis.

Dans la montée du nazisme et du fascisme en Europe, la Nuit de Cristal représente un jalon important: les nazis, au pouvoir depuis 1933 franchissent alors une nouvelle étape dans la violence, celle de massacres antisémites commis au vu et au su de toute l'Europe.

Les images des synagogues incendiées, des enfants, des femmes et des hommes assassinés, arrêtés en masse, frappés et humiliés en public ne pouvaient pas être ignorées. 

Pourtant, en France elles ne changèrent pas la situation: ni à la politique de refoulement des Juifs qui tentaient de fuir l'Allemagne, ni à la politique de laissez faire face à Hitler. La France fut ainsi la seule grande démocratie à ne pas avoir dénoncé officiellement les massacres perpétrés dans la nuit du 9 au 10 novembre 1938.

 

 

 

Soixante-dix neuf ans après la Nuit de Cristal et soixante-douze ans après la défaite du nazisme, rappeler que l'Europe et le monde entier sont de nouveau en proie aux « vieux démons » peut apparaître comme un cliché, mais rend compte d’une réalité.

 

En ce moment même, les Rohyngia de Birmanie sont victimes d’une épuration ethnique et d’un crime contre l’humanité. Les institutions internationales, dont l’ONU se montrent une fois de plus démissionnaires et incapables de mettre en œuvre une réelle intervention afin de sauver cette population. Nos pensées vont vers ces hommes, femmes et enfants traqués et massacrés. 

La population syrienne subit toujours les massacres et tortures du régime Assad qui a accueilli l'adjoint de Adolf Eichmann, Aloïs Brunner et lui a confié l'organisation de ses méthodes de torture.  

 

En Europe c'est d'abord le cas en Allemagne avec la poussée électorale récente du parti AfD, anti-migrants, mais aussi largement imprégné d'antisémitisme et de négationnisme. Un des ses principaux dirigeants déclare ainsi " nous avons le droit d'être fiers des performances des soldats allemands durant la Deuxième Guerre Mondiale"  et s'oppose à l'exclusion des négationnistes. 

Manifestation contre l'AfD à Berlin le 22 octobre 2017

 

L'Autriche voisine fut directement concernée par la Nuit de Cristal, qui y prit un caractère particulièrement violent. Le parti d'extrême-droite FpÖ vient d' y remporter une double victoire. Il s'agit de son score de 26% des suffrages, mais aussi de la reprise de ses thèmes racistes par le parti de droite conservateur avec lequel il va sans doute gouverner.

 

En France, l'antisémitisme a refait ouvertement surface lors de la campagne présidentielle. Les dirigeants du FN ont choisi d’ouvrir une polémique sur la rafle du Vel d’Hiv’. Marine Le Pen a ainsi déclaré à deux semaines du premier tour de la présidentielle de 2017 : « Je pense que la France n’est pas responsable du Vél’ d’Hiv’ ». Il s’agissait manifestement d'un choix stratégique, car elle redoublait ainsi les propos identiques du « dédiabolisé » Florian Philippot tenus quelques jours avant elle. Cette sortie provocatrice ponctuait une campagne au cours de laquelle l’antisémitisme et le négationnisme du FN ont été plusieurs fois révélés.       

 

 

En Pologne , en Hongrie, en Slovaquie, en Tchéquie depuis les élections du  21 octobre, l'extrême-droite gouverne. 

 

Aux Etats-Unis la campagne de Trump a encouragé les néo-nazis qui l'ont massivement soutenu et qui ont droit à toute son indulgence. Depuis ils paradent et n'hésitent pas à tuer, comme à Charlottesville  le 12 août dernier.

Au Japon, le premier ministre négationniste, Abe, qui minimise la responsabilité du Japon impérial dans les crimes de la 2e guerre mondiale vient de remporter une nouvelle victoire électorale.

 

Les génocides du vingtième siècle restent victimes d’offensives négationnistes, parfois dirigés par un Etat puissant et autoritaire. Le génocide des Arméniens reste  ainsi contesté par les autorités turques qui mènent une offensive mondiale dans ce domaine. Mais c’est aussi le cas du génocide des Tutsi, de celui des Musulmans bosniaques de Srebrenica ainsi que premier génocide du 20e siècle à l’encontre des Herrero et Nama d’Afrique australe

 

                                L'incendie de la gande synagogue de Berlin

 

Nuit de Cristal: un faux mouvement populaire 

 

Une polémique a récemment éclaté à propos du rôle de la "rue " dans l'avènement et la chute du nazisme 

Suite à la déclaration historiquement fausse de Jean-Luc Mélenchon selon laquelle la rue avait abattu le nazisme, on a vu fleurir de nombreuses répliques prétendant qu'au contraire, la « rue » avait porté Hitler au pouvoir et qu’elle était responsable des violences antisémites de la Nuit de Cristal.

Ces deux affirmations sont erronées: dans ce dernier cas c’est exactement ce que les nazis ont prétendu et mis en scène, en ordonnant aux troupes de combat SA et SS d’accomplir leurs exactions sans porter leur uniforme.

 

Mais la propagande antisémite avait aussi porté ses fruits après cinq années de règne nazi. Les réactions de soutien aux Juifs ont donc été faibles.

Nuit de Cristal: les SA, les SS et la Gestapo en action

Les nazis guettaient une occasion pour lancer une étape supplémentaire de ce qui deviendra, selon leur terminologie, la « solution finale du problème juif en Europe».

Le premier acte en sera un vaste pogrom organisé dans tous les territoires sous domination allemande, destiné à terroriser les populations juives et à les forcer à émigrer.

L'attentat à Paris contre le conseiller d’ambassade allemand Vom Rath leur offre un prétexte idéal.

Herschel Grynzspan était un jeune Juif polonais qui, le 7 novembre 1938, dans un geste de protestation contre le sort des Juifs en Allemagne et l'expulsion de milliers d'entre eux vers la Pologne, avait abattu à Paris le conseiller d'ambassade Vom Rath.

Hitler prépare alors une mise en scène destinée à démontrer que les Allemands du Grand Reich sont menacés par les Juifs. Le quotidien officiel du parti nazi, le "Völkischer Beobatcher", dirigé par  Goebbels, écrit ainsi le 8 novembre, alors que Vom Rath est encore vivant :

 "… Il est clair que le peuple allemand tirera les conclusions de cette nouvelle action. On ne peut plus tolérer que des centaines de Juifs règnent encore à l'intérieur de nos frontières sur des rues entières de magasins, qu'ils peuplent nos lieux de distractions, que des propriétaires étrangers empochent l'argent des locataires allemands tandis que leurs frères de race incitent au-dehors à la guerre contre l'Allemagne et tuent des fonctionnaires allemands"

Parallèlement, dès le 8 novembre, les nazis prennent la précaution de confisquer chez les Juifs  tout objet que ceux-ci pourraient utiliser pour se défendre.

Lorsque Vom Rath décède, le 9 novembre, l’organisation de la terreur est en place.

Au moment où la nouvelle parvient à Hitler, ce dernier se trouve à Munich, avec la « vieille garde » des Sections d’assaut du parti nazi (SA). Ils sont réunis comme chaque année pour commémorer la tentative de putsch nazi de 1923.

 Hitler quitte l'assemblée sans prononcer de discours et déclare:

"Il faut laisser le champ libre aux SA (Sections d'Assaut)"

C'est Goebbels, ministre de la Propagande, qui se charge d'annoncer publiquement le décès de Vom Rath devant l'assemblée des SA, et également d'inciter au pogrom.

Les principaux chefs nazis quittent ensuite la réunion  et téléphonent des instructions à leurs sections régionales.

Pour les troupes nazies, il s'agit d’abord  d'incendier les synagogues, sans laisser les pompiers intervenir, de détruire les magasins juifs et d’y apposer des pancartes "Mort à la juiverie internationale", ainsi que de tuer sur place les Juifs trouvés en possession d'une arme.

Dans le même temps, un message secret est diffusé depuis la direction de la Gestapo (police secrète d’Etat) de Berlin.

 Pour la Gestapo, il s'agit d'incendier les synagogues, mais d'empêcher les pillages, de mettre en lieu sûr les archives trouvées dans les synagogues, de préparer l'arrestation de 20 à 30 000 Juifs parmi les plus fortunés, de traiter avec une « extrême rigueur » les Juifs trouvés avec des armes.

Dans son Journal, Goebbels confirme qu'il présente un rapport sur la situation à Hitler; ce dernier décide de laisser les manifestations se poursuivre et donc de faire retirer la police.

Goebbels commente : « Les Juifs doivent sentir pour une fois la colère du peuple. »

Il décrit ensuite précisément son action, motive les indécis. Il est ovationné par les dirigeants du parti. Tous se précipitent sur leurs téléphones. Le bataillon des SA « Hitler » part attaquer les Juifs de  Munich.

Selon les directives de Goebbels, la seule réserve est de ne pas apparaître en tant qu'organisation officielle. La fiction de la « réaction populaire » doit être maintenue.

Aussi, les SA et les SS s'habillent en civil et passent à l'acte dès 1 heure de matin.

Du nord au sud de l'Allemagne, incluant l'Autriche annexée, synagogues, maisons communautaires, asiles de vieillards, hôpitaux juifs, maisons d'enfants, logements privés et magasins juifs subissent l'assaut.

Les synagogues sont pillées, saccagées, détruites, incendiées, sans que les pompiers n'interviennent, se contentant d'empêcher la propagation des incendies aux maisons alentour. Des groupes de SA attaquent les magasins juifs qui sont facilement reconnaissables, depuis qu'une ordonnance nazie a exigé que le nom du propriétaire soit peint sur la vitrine en grandes lettres.

La teneur des messages des chefs de SA et de celui de la Gestapo montre  l'existence d'un véritable plan d'ensemble, dont l'instigateur est Hitler lui-même.

 Le silence officiel de Hitler et Goebbels lors des événements des 7 et 8 novembre confirme ce plan : officiellement, il ne s’agit pas d’une action organisée par l’Etat  nazi mais d’une explosion de colère populaire contre les Juifs.

 Dans son journal, Goebbels écrit à propos de l'attentat, lorsqu'il relate la journée du 8 novembre : « A Paris, un juif polonais du nom de Grynzspan a tiré dans l'ambassade sur un diplomate allemand Vom Rath, le blessant grièvement ... En Hesse, grandes manifestations antisémites. On brûle des synagogues. Si seulement on pouvait déchaîner la colère du peuple ».

 

Pour la mémoire et la mobilisation contre les fascismes 

Il y a 78 ans, les gouvernements européens, pourtant dument avertis, refusaient de regarder la réalité nazie en face.

Ils fermaient leur frontière à ceux qui fuyaient Hitler, et laissaient commencer le massacre des Juifs, qui allait finir en génocide. 

L'Histoire nous montre sans cesse que les violences, les massacres, voire les génocides dirigés contre une partie de la population et considérés ailleurs avec indifférence aboutissent toujours à l'extension de la guerre et de la haine au niveau mondial.

Nous serons ces témoins qui n'oublient aucune victime de la violence fasciste du passé, parce que l'oubli est la meilleure arme des héritiers des bourreaux. 

La mémoire des génocides nourrit nos combats contre le racisme et le fascisme 

 

 

Retrouvons nous le 9 Novembre 2017 à 19 H devant le gymnase Japy (2 rue Japy 75011, métro Voltaire ou Charonne) afin de rendre hommage aux victimes de la Nuit de Cristal et de tous les génocides.

 

MEMORIAL 98

 

 

 

 

 

 

Vous êtes aussi invités à aider à financer les frais liés à l'organisation de la commémoration, en participant à la souscription "Pot Commun" ci-dessous

https://www.lepotcommun.fr/pot/hkegfjbc

9 novembre 2017 Commémoration de la Nuit de Cristal nazie
~ Organisé par : Memorial 98 ~

 Le 9 novembre 2017, Memorial 98 organise, pour la 4ème année consécutive, une commémoration de la Nuit de Cristal, pogrom d’État perpétré par les nazis le 9 Novembre 1938 contre les Juifs d’Allemagne et d’Autriche

Nous nous rassemblerons comme chaque année à Paris devant le gymnase Japy dans le 11e arrondissement , où furent parqués, sous le régime de Vichy, les victimes des rafles de la police française, avant d'être envoyées dans les camps d'extermination nazis.

Nous aurons la chance d'avoir à nos côtés, les combattants infatigables de la mémoire des génocides arméniens de 1915 et tutsi du Rwanda de 1994 que sont nos amis du Collectif Van et d'Ibuka-France. Ainsi se concrétisera l'esprit de dialogue des mémoires qui est pour nous le seul moyen de faire vivre un antiracisme efficace

Comme chaque année, des gerbes de fleurs seront déposées lors de la cérémonie d’hommage aux victimes de la Nuit de Cristal. Les jours précédant la commémoration, des collages d'affiches auront lieu dans le quartier, afin de faire vivre une histoire que beaucoup ignorent.

Memorial 98 est un collectif indépendant, nous ne bénéficions d'aucun financement autre que celui de nos soutiens.

Si vous souhaitez et pouvez contribuer financièrement à l'organisation de cette commémoration, nous vous en remercions.

 

 

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29 juin 2017 4 29 /06 /juin /2017 20:34

                                   Au Mémorial du génocide de Gisozi à Kigali 

 

Mise à jour du 26 juin 2018: 

 

Un nouveau témoignage met en cause  l'attitude des autorités françaises face au génocide au Rwanda. Un ex-aviateur français, ayant pris part à l'opération "Turquoise" en juin 1994, conteste dans le journal La Croix le caractère strictement humanitaire de l'opération . Ce soldat, qui a souhaité garder l'anonymat, affirme que les militaires français étaient préparés à "frapper" les troupes du Front patriotique rwandais (FPR) qui agissaient pour mettre fin au génocide.

Il s'agit du deuxième militaire français ayant participé à l'opération militaro-humanitaire "Turquoise" (lancée le 22 juin 1994 sous mandat de l'ONU pour tenter de mettre fin aux massacres) à relancer ce débat récemment, après la parution du livre important Rwanda, la fin du silencede l'officier Guillaume Ancel.

 

"Nous étions là pour faire la guerre"

Dans cet ouvrage, Guillaume Ancel assure que les troupes envoyées par Paris avaient pour mission de "stopper le FPR, donc empêcher la victoire de ceux qui combattaient les génocidaires". Une affirmation appuyée par l'ex-aviateur français dans La Croix : "Il [Ancel] n'est pas un affabulateur pour ce que j'ai vu de 'Turquoise'. C'est pourquoi il m'est apparu juste d'apporter mon témoignage." 

 

 

 

Les preuves s'accumulent quant à la participation des pouvoirs publics français et d’institutions financières à l’exécution du crime.

Nos amis et partenaires des associations Ibuka, qui regroupe des rescapés tutsi et du Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR) qui mène un énergique combat judiciaire ainsi que l'ONG Sherpa, portent plainte contre la banque BNP. Ils l’accusent d’avoir favorisé le génocide en finançant la livraison d’armes, malgré l’embargo décidé par l’ONU.

 

En même temps les mises en cause se multiplient à propos de l’implication de dirigeants français de l’époque. L’attention se concentre sur Hubert Védrine, ancien ministre des Affaires étrangères et surtout à l’époque secrétaire général de l’Elysée à l'époque du génocide, déjà plusieurs fois cité.

 

A ce moment (1993-1995) Mitterand était président et Balladur chef d’un gouvernement de cohabitation, suite aux élections de 1993. Védrine jouait un rôle capital et bénéficiait de l’entière confiance du président.    

 

Selon le journaliste Patrick de Saint-Exupéry,  spécialiste du Rwanda, fondateur de la revue XXI et qui a dénoncé le génocide dès 1994, un haut fonctionnaire chargé d’examiner les archives de l’Elysée de 1990 à 1994 affirme que les autorités françaises ont bien donné l’ordre de réarmer les auteurs du massacre, alors que ces derniers venaient d’être mis en déroute par le Front patriotique rwandais (FPR).
Le fonctionnaire, anonyme mais manifestement très bien informé, qui a eu accès aux archives au moment de leur ouverture par François Hollande en 2015, évoque un document faisant état d’une fronde de certains militaires français contre la décision des autorités françaises de réarmer les génocidaires.
En marge de ce document et concernant le trouble de ces militaires, une note manuscrite d’Hubert Védrine insistait sur la nécessité de «s’en tenir aux directives fixées» et donc de livrer les armes.

 

Selon un autre spécialiste du Rwanda, Jacques Morel, cité par Libération, on retrouve la signature de Védrine en bas d’une note sur une dépêche officielle citée par l’agence Reuters et datée du 15 juillet 1994.
La dépêche était titrée: «Paris prêt à arrêter les membres du gouvernement intérimaire rwandais.» , eux qui avaient orchestré le génocide et qui s’étaient repliés dans les zones sous contrôle français.
En marge de la dépêche, Hubert Védrine avait écrit: «Lecture du Président (Mitterand): ce n’est pas ce qui a été dit chez le Premier ministre (Balladur).»

L' arrestation fut donc annulée.

 

A l’appui des révélations de la revue XXI, un ancien militaire engagé dans l’opération française au Rwanda raconte à RFI qu’au début du mois de juillet 1995, donc à la fin du génocide qui s’est arrêté le 17 juillet, , on lui a demandé de « distraire » des journalistes présents sur sa base militaire, le temps de laisser passer un convoi d’armes destiné au génocidaires. Le témoignage du lieutenant-colonel Guillaume Ancel est précis .

 

 

Mitterand et Védrine étaient particulièrement complaisants à l’égard des chefs Hutu, considérés comme favorables à la France car francophones, alors que les dirigeants Tutsi, qui avaient dû se réfugier en Ouganda étaient considérés comme favorables au monde anglophone. De plus Mitterrand défendait la thèse négationniste du « double génocide », selon lequel les torts étaient partagés entre génocidaires et victimes. Ainsi  après le sommet franco-africain de Biarritz en 1994 , il lance à un journaliste qui l’interroge : “De quel génocide, parlez-vous, monsieur ? De celui des Hutus contre les Tutsis ou de celui des Tutsis contre les Hutus ?”

                                          

 

Védrine a de son côté défendu l’auteur négationniste Pierre Péan en 2008 lors du procès de ce dernier après la parution de son livre « « Noires fureurs, blancs menteurs ». Le déroulement de ce procès démontre les ressorts et arguments des négationnistes, si proches de ceux qu’on retrouve dans des cas semblables (lire ici le compte rendu qu'en fit Memorial 98)

   

C’est dans cette sphère du déni qu’à aussi agi le juge « anti-terroriste » Jean-Louis Bruguière chargé d’une enquête sur l’attentat qui le 6 avril 1994, toucha l’avion transportant le président du Rwanda Habyarimana,  abattu par deux missiles à son approche de l’aéroport de  la capitale Kigali.

 

Bruguière, conclut, au terme d’une enquête partiale conduite depuis Paris, sans déplacement sur les lieux de l’attentat, à la responsabilité des rebelles tutsi (FPR) ; il lança des mandats d’arrêt internationaux contre de hauts responsables du FPR au pouvoir à Kigali.

Suite aux  conclusions du rapport Bruguière, les thèses négationnistes se renforcèrent et obtinrent une sorte de droit de cité dans le discours public, notamment français. L’attribution au FPR de la responsabilité de l’attentat du 6 avril a servi  à protéger des questions embarrassantes les dirigeants politiques de cette époque de cohabitation : Mitterrand, Balladur, Léotard, Juppé,  Roussin, Hubert Védrine, les responsables militaires et tous les officiels ayant joué un rôle dans la complicité militaire, politique, diplomatique et financière de la France dans le génocide.

Bruguière, parti à la retraite avant une carrière politique dans les rangs de l’UMP, son successeur, le magistrat anti-terroriste Marc Trévidic se rendit à Kigali en 2012 , ce que n’avait jamais fait Bruguière, et aboutit à des conclusions totalement inverses sur le déroulement de qui allait constituer le prétexte de la mise en œuvre du crime.

 

La vérité sur l’attentat du 6 avril est cruciale pour établir les responsabilités et définir les coupables d’un génocide qui était planifié et préparé par des campagnes de haine à l’encontre des Tutsi.

C'est en effet le lendemain, le 7 avril 1994 que débutèrent les massacres qui allaient voir la mort d'au moins 900 000 personnes jusqu'à juillet de la même année : des individus définis comme Tutsi, constituant la majorité des victimes, mais aussi des Hutu opposés aux partisans de l'idéologie raciste dite "Hutu Power"

D'une durée de cent jours, ce fut le génocide le plus bref et concentré de l'histoire et celui de la plus grande ampleur quant au nombre de morts par jour de tuerie.

Fruit d'une idéologie raciste mise en œuvre sur des décennies, ce génocide s'est appuyé, pour diffuser la haine, avant et pendant, sur une forme perverse d'humour, notamment à la Radio Télévision des Milles Collines, mais aussi sur les caricatures déshumanisantes de la propagande génocidaire .

Les habitants et les pouvoirs publics de notre pays ont un devoir particulier en ce qui concerne le Rwanda.

En effet, une partie du combat est aujourd'hui celui de la pleine reconnaissance par l’État français de ses responsabilités.

Cet État qui prétend parler en notre nom, persiste aujourd'hui à garder un silence complice sur l’implication de l’armée française dans le génocide des Tutsi.

 

Or le pouvoir Hutu extrémiste a reçu de manière continue et appuyée le soutien des autorités françaises tant au plan politique, militaire que financier, avant, pendant et après le génocide. Toute la vérité doit être faite au sujet de cette implication : tous les documents doivent être rendus publics.

 

 

C’est pourquoi nous soutenons et partageons pleinement le combat de nos amis et partenaires de Ibuka, du CPCR et de Survie afin que la vérité se fasse jour et que les coupables éventuels soient jugés. On notera que Védrine est toujours présent sur la scène politique et médiatique. Il semble qu’il soit écouté par le nouveau président français. Il serait même  à l’origine du tournant consistant à s'allier avec Bachar El Assad sous prétexte de « lutter contre le terrorisme » alors que Assad en est le principal responsable et parrain. Vedrine a aussi beaucoup de sympathie « réaliste » envers Poutine.

 

Il y a quelques jours seulement, la justice des Pays-Bas a émis un verdict historique, bien qu'incomplet et frustrant.  Elle juge que les autorités de son pays a laissé se dérouler le génocide de Srebrenica (un an à peine après celui des Tutsi), sans permettre le sauvetage des personnes qui tentaient de se réfugier dans l'enclave des Casques Bleus néerlandais présents sur place. C'est le résultat d'une longue bataille des victimes et de leurs avocats avec le soutien d'ONG néerlandaises et internationales, mobilisées pour la justice et contre l'impunité.

Cette reconnaissance est importante car elle trace la responsabilité des gouvernements qui laissent se dérouler des génocides et crimes contre l'humanité et n'interviennent pas pour sauver des vies humaines. C’est dans le même sens que nous devons agir afin que soit levée la chape de plomb de la dissimulation au nom de la raison d’Etat.

 

En effet, à l’inverse, l'impunité des auteurs des génocides et massacres représente un facteur évident de récidive et de perpétuation des actes génocidaires.  On se souvient notamment du propos de Hitler trouvant un encouragement dans la manière dont le génocide arménien de 1915 était nié :
« Mais qui se souvient encore du massacre des Arméniens ? » déclarait-il dans une allocution aux commandants en chef de l'armée allemande le 22 août 1939, quelques jours avant l'invasion de la Pologne.
 

 

C'est pourquoi, plus que jamais et en permanence,  la mémoire des génocides nourrit nos combats. 

 

MEMORIAL 98

 

 

 

 

 

 

 

Mise à jour du 5 aout 2017

 

Paul Kagame réélu avec 98% (?) des suffrages. L'élection présidentielle qui vient de se dérouler au Rwanda montre les graves problèmes de démocratie et liberté d'expression dans ce pays. Kagame a fait modifier la Constitution afin de pouvoir se présenter à un 3e mandat et sans doute à de nombreux autres par la suite. De plus toute velléité de critique ou d'opposition subit des menaces, voire une répression violente.

 

La situation particulière du pays, émergeant du génocide de 1994, ne justifie en rien cette violation des principes démocratiques. A l'inverse la gestion autoritaire de Kagame ne justifie en rien le soutien des autorités françaises au régime extrémiste de 1994 qui organisa et mit en oeuvre le génocide; nous réclamons à nouveau la vérité sur ce soutien et l'ouverture de toutes les archives 

 

Mise à jour du 22 juillet 2017

 

Quel a été le rôle exact du général Lecointre lors du génocide des Tutsi au Rwanda (suite)? Dés la nomination du nouveau chef d'état-major et au vu de sa présence au Rwanda en 1994, nous avons dit publiquement ici  et sur notre compte Twitter (@98Memorial) qu'il était nécessaire de préciser son rôle exact puisque l'armée française avait sur ordre des autorités ( Mitterand et Balladur) aidé les génocidaires et contribué à les évacuer. Un entretien paru dans l'Humanité (voir ci-dessous) semble indiquer que Lecointre aurait été impliqué directement dans l'aide aux génocidaires. Les propos de la personne interviewée (Jacques Morel) nécessitent néanmoins un peu de prudence et le témoignage d'autres sources provenant ce ceux qui ont combattu le génocide. Nous serons sans doute fixés assez rapidement.

 

 

 

Mise à jour du 19 juillet 2017:

Le général Lecointre, nommé chef d'état-major ce jour , a notamment été actif au Rwanda lors de l’opération Turquoise en 1994, 
Or l’opération « Turquoise », avait servi à la France de François Mitterrand – qui avait appuyé les génocidaires rwandais avant et pendant le génocide– sous couvert de visées humanitaires, à exfiltrer du Rwanda vers le Zaïre le gouvernement et l’armée génocidaires ainsi que de nombreux miliciens et civils dont une grande partie étaient impliqués dans les massacres. Des groupes armés issus des génocidaires sont encore présents en RD du Congo. Il est donc important de savoir quel a été le rôle exact de Lecointre dans cette opération.

 

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4 mai 2017 4 04 /05 /mai /2017 18:26

 

 
 
 
 
 
 

 

 
 
MEMORIAL 98
 
L'acteur français Victor Lanoux, décédé le 3 mai a été, pendant la Seconde Guerre mondiale, un enfant caché parce que Juif.
Né le 18 juin 1936 à Paris d’un père juif et d’une mère catholique , il est envoyé à l’âge de trois ans avec sa sœur, dans un petit village de la Creuse, au sein d'une famille d'accueil, au début de la guerre. Il y restera tout au long de celle-ci. Sa véritable identité, "Victor Robert Nataf", est changée en "Victor Lanoux", nom qu’il conservera pendant sa carrière.
En France 60 à 70000 enfants furent ainsi mis à l'abri. Survivants au génocide, ils ont subi de graves traumatismes psychologiques et souvent le deuil de leurs parents exterminés.
Un des exemples tragiques du sort de ces enfants est le destin funeste de ceux réfugiés à la Maison des enfants d'Izieu , raflés par Klaus Barbie le 6 avril 1944. Ce jour-là se nouait le sort tragique des 44 enfants et 7 adultes juifs raflés dans ce village de l'Ain qui devait constituer un refuge. Ils furent tous exterminés à Auschwitz, sauf une éducatrice qui survécut.  C'est à ce Mémorial d'Izieu que s'est récemment attaqué Laurent Wauquiez, alors que la résistante SImone Lagrange y avait défendu la mémoire de la Résistance contre les nazis et leurs héritiers. 
 
Le sort des enfants raflés au Vel' d'Hiv' constitue un autre exemple particulièrement tragique. 
En effet, les familles raflées par la police française vers le Vel’ d’Hiv’ entre les 19 et 22 juillet 1942 arrivent aux camps de Pithiviers et Beaune-La-Rolande, gérés par l’administration française. Les parents sont rapidement déportés alors que les nazis n’ont pas encore donné leur réponse quant au sort des enfants. La période durant laquelle les enfants internés dans les camps de Pithiviers et Beaune-la-Rolande ont vécu séparés de leurs parents déjà déportés est décrite par les témoins comme un des moments les plus insupportables. Agés de 2 à 15 ans, les enfants restent seuls durant plusieurs semaines. Désorientés par l’absence de leurs parents et vivant dans des baraques inadaptées à la présence d’enfants, ils connaissent des conditions d’hygiène catastrophiques. Huit d'entre eux meurent durant cette période.
Le 13 août 1942, le service d’Eichmann fait savoir que les enfants doivent également être déportés: ils sont alors transférés vers Drancy et, de là, embarqués dans les convois partant pour Auschwitz.
 
En France, 11458 enfants juifs furent déportés et massacrés. Serge Klarsfeld a identifié un seul enfant de moins de 16 ans déporté en 1942 et revenu vivant.

 

Au total, le chiffre des enfants victimes des nazis est d'au moins un million et demi, y compris plus d'un million d'enfants juifs, des dizaines de milliers d'enfants tsiganes, des enfants allemands handicapés physiques et mentaux, des enfants polonais ainsi que des enfants d'Union soviétique occupée.

Sauvetages

En plus des démarches individuelles, des organismes héroïques contribuèrent à dissimuler des enfants sous une fausse identité dans des familles et des foyers d'accueil. Un réseau extrêmement bien organisé s'était constitué avec l'aide de l'association juive Œuvre de secours aux enfants (OSE), des Éclaireurs israélites de France, des organisations communistes juives telles le MNCR , mais également des réseaux chrétiens et résistants. Ceux qui les accueillirent font partie des "Justes" qu'on trouve heureusement lors des génocides, notamment dans le génocide des Arméniens et celui des Tutsi du Rwanda.
 
Le rapport des fascistes, et parmi eux du FN, envers les enfants issus de l'immigration est particulièrement pervers et violent.
Ainsi lors de la campagne présidentielle de 2007, nous avions noté que Jean Marie Le Pen, en meeting à Marseille le 3 Mars de cette année-là, avait ainsi abordé ce  sujet (extrait) : " il  s'en est violemment pris  à l'immigration. Dans son discours il a choisi d'aborder la situation des enfants de parents expulsés. Voici sa formulation exacte, sous forme de pseudo-question :

"On me dit, M. Le Pen, si vous renvoyez les clandestins chez eux, avez-vous pensé à leurs enfants ? Bien sûr que j'y pense, ils ne doivent pas être séparés de leurs parents, c'est pour cela qu'ils partiront avec eux"

Cette formulation n'est pas le fruit du hasard.

Il s'agit d'une référence, directe et voulue,  à la déportation des enfants juifs décidée par Laval, en utilisant le même prétexte monstrueux " ne pas séparer les enfants  des parents".

C'est le chef du FN qui choisit, par l'utilisation de ces termes, de tracer un parallèle parfaitement compréhensible et codé dans l'univers historique de l'extrême-droite française. La salle a d'ailleurs frénétiquement applaudi ce passage du discours. Il ne s'agit pas pour nous de comparer expulsion et déportation vers l'extermination mais de relever la volonté lepeniste de faire appel à cette thématique."

Le 6 juillet 1942, Theodor Dannecker, gradé SS en charge de la déportation des Juifs de France , informait son supérieur à Berlin, Adolf Eichmann : « Le président Laval a proposé que, lors de l’évacuation des familles juives de zone non occupée (sous responsabilité du régime de Vichy) les enfants de moins de 16 ans soient emmenés aussi. Quant aux enfants juifs qui resteraient en zone occupée, la question ne l’intéresse pas »

 

Dix ans plus tard, en décembre 2016, Marine Le Pen reprenait les attaques envers les enfants, marchant ainsi une fois de plus dans les pas de son père, qui parraine et finance largement sa campagne, au delà de leurs règlements de compte. Celui-ci est toujours président d'honneur du parti qu'il a fondé et transmis à sa fille, laquelle n'a jamais modifié le nom de cet parti marqué par le fascisme. 

 

 

Marine Le Pen, parlant des enfants, déclare :  "Si vous venez dans notre pays, ne vous attendez pas à ce que vous soyez pris en charge, à être soignés, que vos enfants soient éduqués gratuitement, maintenant c'est terminé, c'est la fin de la récréation !'". 

La vulgarité de ses propos renvoie à la haine de l'extrême-droite envers les malades ( voir ici) et les enfants d'origine étrangère.

 

 
Mise à jour du 19 novembre 2019

 

Une nouvelle exposition en ligne en français du mémorial Yad Vashem : " Ils avaient de 7 à 13 ans. Cachés ou confiés dans l’espoir d’être sauvés, ils s'adressaient à leurs parents ou grands-parents. Tous périront loin des leurs à voir" https://www.yadvashem.org/yv/fr/expositions/lettres-denfants/index.asp

 

Mise à jour du 2 décembre 2019

Quand le futur mime Marceau convoyait des enfants juifs de Limoges à Annemasse. Il agissait dans le cadre des réseaux de l'OSE, en lien avec son oncle Georges Loinger. Son talent lui permettait d'aider ces enfants à surmonter leurs craintes voir ici à partir de 30'

Mise à jour du 30 décembre 2018

 

Hommage éternel: le grand résistant juif Georges Loinger ( ci-dessus), qui a sauvé des centaines d'enfants juifs pendant l'Occupation nazie en France est décédé vendredi 28 décembre à l'âge de108 ans

Il était  titulaire de la médaille de la Résistance et de la croix de guerre et a présidé l'Association de la Résistance juive de France (ARJF)

« Organisation juive de combat »

En 1940, alors qu'il est prisonnier de guerre en Bavière, il reçoit une lettre de son épouse qui dirige une maison abritant 125 enfants juifs allemands dont les parents avaient été arrêtés en 1938 en Allemagne. Il s'évade et rejoint La Bourboule (Puy-de-Dôme) en zone libre, où elle s'est repliée avec les enfants. Comme ils risquent d'être arrêtés, le couple les sauve en les dispersant, d'abord dans des maisons de l'Œuvre de secours aux enfants (OSE) puis dans des familles ou institutions chrétiennes ou laïques. Par la suite, Georges Loinger fera passer quelque 350 enfants juifs en Susse par la ville française d'Annemasse. Certains convois connaîtront des fins tragiques. Il fait partie du fameux réseau Garel  créé par l'OSE, entre 1942 et 1944.

Il choisit avec ses compagnons de Résistance le nom d'Organisation juive de combat : « Fin 1943, lors d'un parachutage d'armes de Londres, nous avons trouvé dedans un paquet avec un livre qui racontait la révolte du ghetto de Varsovie », avait-il confié à l'Agence France-Presse. Celui qui était le doyen de la Résistance juive en France a aussi participé à la création de " La Fraternité d'Abraham", qui prône le rapprochement des trois religions monothéistes, judaïsme, christianisme, islam. Interrogé en 2005 alors qu'il recevait les insignes de commandeur de la Légion d'honneur, il avait répondu qu'il estimait avoir fait simplement « ce qu(« il) avait à faire ».

Nous saluons sa mémoire et ses combats

MEMORIAL 98

Mise à jour du 6 décembre 2018
 
Joseph Joffo, enfant caché pendant la Shoah, auteur du livre « Un sac de billes », est décédé ce 6 décembre à l’âge de 87 ans. Nos pensées pour lui et ses proches, pour tous les enfants victimes de la persécution nazie ( voir ci-dessous) et pour les survivants qui ont pu témoigner. Le grand succès du livre de Joffo et ses nombreuses interventions publiques ont contribué à faire connaître le sort des enfants juifs pendant la guerre.
 
 
 
 
 
 

 

 

 


 
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13 mars 2017 1 13 /03 /mars /2017 21:56

La "liquidation" par les nazis du ghetto juif de Cracovie, capitale historique de la Pologne  située à soixante-cinq kilomètres du camp d'Auschwitz, eut lieu le 13 et 14 mars 1943. 

Un mois plus tard débutait la révolte du ghetto du Varsovie, dont la liquidation avait débuté quelques mois plus tôt,  en juillet 1942.

La SS et la police planifièrent cette liquidation en obéissant à l'ordre de Himmler d'octobre 1942. 

Ce dernier avait ordonné d'achever la mise à mort des Juifs dans la zone dite du " Gouvernement général de Pologne". Il ordonnait également d'incarcérer dans les camps spéciaux ceux dont le travail forcé demeurait nécessaire pour la machine de guerre nazie.

Le 13 et 14 mars 1943, les SS et les policiers lancèrent l'opération dans le ghetto de Cracovie et massacrèrent sur place environ 2000 Juifs, notamment les personnes âgées, les enfants et les malades . 

Deux mille autres, qui étaient capables de travailler, furent transférées au camp de travail forcé de Plaszow, à proximité immédiate.

Ce camp a été rendu célèbre par le film " La Liste de Schindler", notamment à travers la personne de son commandant SS Amon Göth , habitué à tirer sur les internés depuis le balcon de sa villa, comme on peut le voir ci-dessous.

L'usine de Schindler se trouvait à proximité du camp et il parvint à sauver des centaines de Juifs.

 

En déjà, le témoin survivant Mieczyslaw Pemper fut témoin dans le ghetto de Cracovie de scènes où Göth lâchait ses chiens sur les habitants et leur tirait dessus.

En tant que commandant du camp de Płaszów, où l'espérance de vie moyenne était de quatre semaines, Göth était particulièrement redouté des prisonniers, qu'il soumettait à diverses tortures et qu'il exécutait même par balles. Ses deux chiens, Ralf et Alf, qu'il lançait sur les détenus, terrorisaient ces derniers . 

Poldek Pfefferberg, l'un des juifs de Płaszów sauvés par Schindler , témoigna en ces termes : « Voir Göth, c'était voir la mort. ».

Lors du procès de Göth en Pologne en 1946, suite auquel il fut condamné à mort et exécuté, le survivant  Henryk Bloch rapporta les faits suivants :

« […] Göth ordonna que chacun reçoive cent coups [de fouet], mais tout le monde en reçut plus de deux cents, voire trois cents. Chaque prisonnier devait compter les coups à voix haute ; si une erreur était commise, alors les coups recommençaient à partir de zéro. […] Après avoir été retiré de la table, le prisonnier était littéralement une masse sanglante aux chairs coupées. […] Pendant tout ce temps, un homme criait horriblement. Göth hurla, lui demandant de se calmer et de compter. L'homme ne se calma pas. Göth s'approcha, prit la moitié d'une brique au sol, vint vers la table sur laquelle on était en train de battre l'homme et lui asséna un coup avec la brique, lui fendant la tête en deux. [...] Couvert de sang, le crâne fendu, l'homme se leva de la table, s'approcha de Göth et lui dit qu'il avait reçu sa punition. On lui ordonna de partir et lorsqu'il se tourna, Göth sortit son revolver et lui tira une balle dans la tête. »

Göth, né à Vienne, devient membre de la branche autrichienne du parti nazi en 1930 (avec le numéro 510764)  La même année, il rejoint les SS autrichiens (numéro de membre : 43673).

Les nazis autrichiens occupèrent une place centrale au sein de la galaxie nationale-socialiste, suivant l'exemple d'Hitler, lui même d'origine autrichienne. Adolf  Eichmann, lui aussi autrichien, symbolise cette implantation au cœur de la mise en œuvre du génocide.
  

Les trois mille Juifs restants du ghetto de Cracovie furent déportés à Auschwitz-Birkenau, à 70 kilomètres de cette ville, en deux convois, l'un arrivant le 13 mars et l'autre le 16 mars. A leur arrivée, environ 2450 personnes furent envoyées directement dans les chambres à gaz.

A quelques semaines de l'anniversaire des génocides Tutsi qui débuta le 7 avril 1994,  du génocide des Arméniens qui débuta le 24 avril 1915, de la révolte du ghetto de Varsovie qui débuta le 19 avril 1943,  nous réaffirmons la nécessité du combat contre toutes les formes de racisme et de discrimination et d'un engagement particulier contre le négationnisme, arme des bourreaux et de leurs défenseurs.

Mise à jour du 5 octobre 2019:

Croix gammée et insulte antisémite "Les putes juives, dégagez de Pologne" peints sur un mur de l’ancien ghetto de Cracovie, à quelques dizaines de kilomètres d'Auschwitz

La profanation fait partie de la campagne antisémite qui sévit en Pologne à l'approche des élections législatives du13 octobre prochain.

Le parti PiS au pouvoir et la "Confédération" d'extrême-droite ont recours à une agitation particulièrement perverse dans ce pays dont la population juive a été massacrée durant la deuxième guerre mondiale et dont les survivants ont encore  eu à subir des pogroms après cette terrible période

Mars 2017

Il y a quelques jours au conseil municipal de Fontaine (Isère) un responsable local du FN, conseiller municipal, propose de "récupérer les dents en or" des Roms pour financer leur accueil . C’est un retour du refoulé génocidaire: les nazis "récupéraient les dents en or" de ceux qu'ils exterminaient, les Juifs ainsi que les Roms.

L'extermination des Juifs par les nazis, aidés par leurs alliés, représente une étape cruciale dans la chaîne des génocides qui marquent le vingtième siècle, des Herrero et Namas aux Arméniens, des Roms aux Tutsi du Rwanda, des  Musulmans de Srebrenica  aux Cambodgiens.

 

Malgré l'apocalypse de la Shoah, l'antisémitisme, matrice des racismes européens, est  toujours au premier plan, soixante-dix ans après la défaite du Reich nazi .

L'extrême-droite et la droite radicale ont constamment recours à cette forme première de racisme, tout en l'étendant à l'islamophobie et au rejet des réfugiés et immigrants. C'est ce que montrent des cas récents: Marine Le Pen prétendument "dédiabolisée" est financée et parrainée par son père, fondateur du parti dont elle se revendique, antisémite et négationniste avéré. 

 

Dans la campagne du parti "Les Républicains", on a d'abord vu un candidat antisémite excusé et toléré par ses concurrents, puis le recours à une imagerie antisémite contre Macron, puis l'intégration par Fillon du  facho intégriste Charles Millon, ancien président du Conseil Rhône-Alpes de 1998, élu à ce poste grâce à une alliance de sa part avec le FN de Gollnisch et Jean-Marie Le Pen. En raison de cette alliance, Charles Millon a été expulsé d'une cérémonie au Mémorial des enfants juifs d'Izieu en 1998, par Simone Lagrange, victime de Klaus Barbie et représentante des déportés.

 

En même temps Memorial 98 a révélé qu'un comédien et metteur en scène à succès, Olivier Sauton, était en fait un compagnon de route de Dieudonné, avec qui il avait co-écrit un film de propagande intitulé "L'Antisémite". Suite aux publications de Memorial 98 et à la découverte de messages antisémites de sa part sur Twitter,  Sauton a finalement été déprogrammé par le théâtre dans lequel il jouait.

 

La campagne de Trump aux USA a eu recours à des thèmes antisémites et complotistes et elle sert de modèle aux nombreux démagogues qui veulent reproduire ses succès électoraux. En Pologne même, le gouvernement ultra-réactionnaire du PiS met en cause la vérité historique de la Shoah et s'attaque aux chercheurs qui contestent sa propagande. En Allemagne le parti raciste et islamophobe AfD abrite en son sein un fort courant ouvertement antisémite et négationniste qui s'est exprimé récemment. 

 

Il est donc d'autant plus important de retracer la réalité de ce que fut l'extermination programmée des Juifs d'Europe, dans les camps , chambres à gaz et autres massacres. Une exposition en cours au Memorial de la Shoah à Paris permet de mesurer la trace profonde de cette tragédie, y compris dans des domaines tels que la bande dessinée et les comics

MEMORIAL 98

A voir également dans les publications de Memorial 98:

 Sur le sorts des Roms à Auschwitz

http://info-antiraciste.blogspot.fr/2016/06/memoire-de-la-shoah-decouvertes-vilnius.html

Sur la "Shoah par balles" dès 1941 en Ukraine et sur la répression de la mémoire de la Shoah par les régimes staliniens

 

 

 

 

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