Allons à l’essentiel:
Behring Breivik a commis un massacre politique précisément orienté. Il ne s’agit ni d’un attentat-suicide, ni d’un acte « aveugle ».
Il a abattu individuellement des jeunes participants à un rassemblement de jeunes de la gauche travailliste après s’en être pris au siège du gouvernement.
Il a dit lui-même qu'il avait voulu s'en prendre au Parti travailliste, au pouvoir en Norvège, parce que, selon lui, ce parti a trahi le pays. Breivik a voulu « porter un coup d'arrêt au recrutement de nouveaux membres au sein de ce parti », selon lui, « favorise la venue massive de musulmans en Norvège ».
Nous avons déjà entendu cette argumentation à de nombreuses reprises de la part de ces partis qui sont présents dans beaucoup de pays d’Europe de l’Ouest
C’est le cas notamment en France, en Italie, en Autriche, aux Pays-Bas, au Danemark, en Belgique, en Suisse…
Ces partis, plus ou moins relookés, concentrent leur agitation sur la défense de l’identité nationale et la dénonciation des musulmans et des immigrés.
Ils ont connu une victoire importante lors du référendum suisse sur les minarets ( Suisse : nouvelle victoire de l’extrême-droite)
Dans plusieurs pays, la droite traditionnelle cherche la voie d’une alliance avec ces partis parfois nommés "populistes".
Les partis d’extrême-droite « populistes » et islamophobes européens, ainsi que leurs alliés dans les partis de la droite traditionnelle tentent déjà de faire passer Brievik pour un dément isolé. Ils tenteront de faire valoir que ce n'est pas ce qu'ils voulaient dire lorsqu'ils parlent de « guerre totale » contre l’immigration et les musulmans.
(voir Europe : une marée brune ?)
Breivik a pourtant largement participé aux activités du parti norvégien de la droite radicale, nommé étrangement Parti du Progrès, ouvertement xénophobe dans un pays qui n’est pas confronté à une crise sociale.
Malgré l’image bucolique qui s’attache à elle, la Norvège a connu dans son histoire une convulsion violente qui a laissé des traces profondes : lors de 2e guerre mondiale, un gouvernement pronazi a été mis en place sous la direction de Quisling, dont le nom est d’ailleurs devenu le symbole de la collaboration avec un occupant.
Mais au-delà des particularités norvégiennes et scandinaves, c’est toute l’Europe qui est percutée par l’onde de choc de ces crimes.
Ils interpellent directement les partis de droite qui ont choisi la xénophobie comme instrument de conquête ou de maintien au pouvoir.
L'extrémisme politique de droite, nourri de nationalisme et de xénophobie, a cessé d'être un tabou puisque des dirigeants de la droite aussi déterminants que Sarkozy, Angela Merkel et Cameron défendent tous trois l'idée que ce qu'ils nomment péjorativement le « multiculturalisme » est un échec dans leur pays et qu’il faut « serrer la vis » contre les étrangers. (voir Europe : vague de racisme, les gouvernements responsables)
Quand un ministre de l’intérieur français martèle qu’on « ne se sent plus chez soi » n’encourage-t-il pas ainsi une atmosphère de violence ?
Entre autres crimes de la haine dans notre pays, rappelons que le 1er mai 1995 Brahim Bouaram, jeune marocain de 29 ans, a été assassiné par des militants d'extrême droite participant à un cortège du Front National qui l'ont jeté à la Seine.
D’ailleurs un dirigeant national du Front National, Laurent Ozon, membre de son bureau politique et proche de Marine Le Pen, a posté plusieurs messages dans lesquels il « explique » ainsi le crime de Breivik :
"Expliquer le drame d'Oslo: explosion de l'immigration: X6 (multipliée par 6, NDLR) entre 1970 et 2009".
(voir Qui veut se faire piéger par Marine Le Pen ?
Sarkozy-Le Pen: l’apocalypse ? )
Le drame d’Oslo doit constituer le point de départ d’une grande et profonde contre-offensive contre la xénophobie et l’extrême-droite.
MEMORIAL 98