Une fois de plus Marine Le Pen marche dans les pas de son père. Elle dénonce à nouveau Eva Joly, d'origine norvégienne, en raison de sa double nationalité et lui conteste le droit de se présenter à l'élection présidentielle de 2012.
Elle utilise pour cela la rhétorique classique de l’extrême-droite française en déclarant :
"Quand on est candidat à la présidentielle (...) il faut avoir un lien charnel avec notre pays, avec notre peuple. Je trouve profondément indécent que quelqu'un qui est devenu français à 20 ans, qui a la double nationalité, puisse poser sa candidature...Il faut supprimer la double nationalité"
La nouvelle présidente du Front National reprend ainsi le style et le contenu des diatribes de son père.
Lors de la précédente présidentielle, en 2007 celui-ci avait d’abord à plusieurs reprises mis en cause les « 3 grands parents étrangers de Sarkozy ». Nous avions alors révélé qu’il s’agissait d’une référence codée au statut des Juifs de Pétain prévoyant l’exclusion de la vie publique pour ceux qui avaient 3 grands-parents juifs ( Le Pen et les "3 grands-parents étrangers" de Sarkozy )
Puis en juin 2007 il s’en était pris à Rachida Dati dans ces termes : " question à Mme Dati: est ce que vous avez la nationalité marocaine, ou est-ce que vous avez la nationalité française ? vous devez choisir. Si vous choisissez la nationalité étrangère, vous serez des étrangers, respectés en France, mais selon le statut des étrangers, sans les avantages que moi je crois devoir réserver aux Français… » (Le Pen récidive contre Rachida Dati)
Tradition délatrice
Les Le Pen père et fille s’inscrivent ainsi dans la longue tradition de l’extrême droite française consistant à dénoncer des personnes en raison de leur religion ou de leur origine et à dresser dans ce but des « listes de noms ».
Le dirigeant du FN avait souvent fait huer des noms à consonance juive de journalistes lors des fêtes de son parti.
Il avait inauguré la mise en cause de la nationalité de ses contradicteurs dès 1989.
Le 5 décembre de cette année-là, à la télévision (sur la chaîne de l’époque « la 5 »), Le Pen est censé débattre avec Lionel Stoleru, alors secrétaire d'Etat chargé du Plan, sur le thème du travail au noir:
Le Pen commence par demander à son interlocuteur s'il a une double nationalité...
Réponse de Stoleru:
- "Être juif, ce n'est pas une nationalité... Jusqu'à présent, c'est une religion."
Après les hésitations de Le Pen qui évoque une prétendue double nationalité franco-israélienne de son , la discussion porte sur le contrôle du travail clandestin:
Lionel Stoleru : "Sur ce problème du travail au noir, j'ai moi-même organisé des descentes dans le Sentier, des opérations coup de poing..."
Jean-Marie Le Pen dans une "plaisanterie" nauséabonde : "Vraiment ? Vous pourriez faire une rafle, c'est le cas de le dire..."
Cette agression antisémite provoqua à l’époque un tollé.
En Europe, la droite et l’extrême droite contre la double nationalité
La remise en cause en cause de la double nationalité n'est pas limitée aux vitupérations de Le Pen. Dans notre pays, De Villiers avait inscrit à son programme présidentiel de 2007 " l'interdiction de la double nationalité". Dans plusieurs pays d’Europe, la droite met en cause les élus et responsables qui se trouvent dans ce cas. En Allemagne le parti démocrate-chrétien CDU-CSU, correspondant de l’UMP et membre du même parti européen (PPE), mène depuis des années une campagne contre le droit à la double nationalité des personnes issues de l’immigration.(voir Europe : une marée brune ?)
Marine Le Pen tente ainsi d’exploiter et d’approfondir sa popularité auprès des franges xénophobes de l’électorat UMP, agité par les orientations que lui ont distillées Sarkozy, Besson et Hortefeux.(voir
Qui veut se faire piéger par Marine Le Pen ?
Succès du Front National: quelles conséquences?
Notons que Marine Le Pen réalise aussi une opération de soutien à l’ex-ministre mitterrandiste Roland Dumas, compagnon de route du Front national depuis 2007;voir (Impunité de l'antisémite Barre) et présentement soutien de Laurent Gbagbo. Dumas poursuit de sa haine Eva Joly qui avait mis à jour ses turpitudes financières dans l’affaire Elf.
Albert Herszkowicz pour
MEMORIAL 98