Léonarda Dibrani
Les mobilisations qui se sont développées ces derniers jours autour des cas de jeunes expulsés représentent d’ores et déjà un acquis important de la lutte anti-raciste.
L’ampleur atteinte par la révolte contre les expulsions de Léonarda Dibrani et Khatchik Kachatryan, constitue un tournant dans l’attitude d’une partie importante de la jeunesse et de la gauche à l’égard de la politique du ministre de l’Intérieur, soutenu en sous-main par Hollande.
La mobilisation des enseignants de Pontarlier, les manifestations de lycéens ont rapidement mis en accusation la « ligne Valls-Hollande », déjà ébranlée par des prises de position antérieures au sein du Parti socialiste et des Verts membres du gouvernement.
Les mots d’ordre des lycéens furent limpides : « Halte à la Valls des expulsions, Valls démission, retour immédiat de Khatchik (il s’agit du lycéen arménien expulsé qui constitue le premier motif de leur mobilisation et dont les médias parlent peu) et de Léonarda ».
Les revendications des enseignants de Pontarlier mobilisés pour Leonarda et les autres enfants de la famille Dibrani sont tout aussi claires:
" Nous, professeurs du collège André Malraux et du lycée Toussaint Louverture (de Pontarlier NDLR), sommes profondément choqués par les méthodes utilisées pour renvoyer des enfants issus de la minorité rom vers des pays qu'ils ne connaissent pas et dont ils ne parlent pas la langue. Nous, professeurs du collège André Malraux et du lycée Toussaint Louverture, sommes choqués de voir comment les efforts d'intégration fournis par ces enfants à l'école sont réduits à néant par des politiques aveugles et inhumaines.
Nous demandons le retour immédiat des enfants en France pour leur sécurité.
Les enseignants du collège André Malraux et du lycée Toussaint Louverture "
Ces mobilisations sont, à nos yeux, beaucoup plus importantes pour l’avenir que l’opération de communication qui s’est organisée autour de Manuel Valls pour justifier la mauvaise action commise contre Leonarda , contre Khatchik et contre tant d’autres.
Rien n’aura été épargné : la publication d’un rapport à caractère policier sur la vie de sa famille, la mise en cause de son père censée justifier l’expulsion de la fille, le défi lui enjoignant de revenir seule alors que qu’elle a été descendue de son car scolaire, prétendument au nom de regroupement familial d’expulsion.
Il s’agissait et il s’agit toujours de déshumaniser des jeunes en voie d’intégration et de les projeter dans un collectif décrit comme louche et menaçant.
Il faut rappeler que Valls avait entamé une véritable guerre policière et idéologique contre les Roms et contre les valeurs de la gauche, y compris celles proclamées auparavant par le Parti socialiste, en déclarant le 24 septembre dernier : « Ces populations ont des modes de vie extrêmement différents des nôtres et qui sont évidemment en confrontation» «C’est illusoire de penser qu’on règlera le problème des populations roms à travers uniquement l’insertion… pas d’autre solution que de démanteler ces campements progressivement et de reconduire (ces populations) à la frontière «les Roms ont vocation à revenir en Roumanie ou en Bulgarie »
Il avait aussi organisé une opération de communication par une déclaration de soutien à son action signée par des maires membres du PS. Il s’agissait d’une escalade aggravant l’ action entamée dès sa nomination (voir Roms : les mauvaises actions du gouvernement. )
Au sein même du gouvernement la réponse de Montebourg (qui depuis prétend soutenir Valls et approuver ses mesures) fut alors immédiate : « je considère qu'il n'existe pas de théorie selon laquelle tel peuple, telle personne de telle origine ne pourrait jamais au grand jamais s'intégrer. On a dit ça des Italiens, on a dit ça des Espagnols, on a dit ça des Portugais, on a dit ça des Arabes. Décréter par avance que c'est impossible me paraît excessif et mérite d'être corrigé.»
D’autres dirigeants socialistes ont marqué, plus ou moins clairement, leur désaccord avec Valls alors que Hollande le soutient. Il pratique ainsi de la même manière que Lionel Jospin qui approuva les imprécations de Chevènement contre les sans-papiers et des « sauvageons » et se retrouva éliminé du 2e tour de la présidentielle de 2001, au profit de Le Pen.
Ceux qui mènent campagne pour que la gauche applique une politique dure contre les étrangers au prétexte de la lutte contre la progression de Marine Le Pen dans les sondages et les urnes nous entraînent vers une catastrophe encore plus grande. Accepter les règles et les diktats de l’adversaire xénophobe constitue non seulement une faute morale, mais aussi la garantie de l’échec et le signe qu’on ne croit pas à ses propres idées.
Dans les mois à venir, il est plus que jamais nécessaire de soutenir les associations anti-racistes, de dénoncer la récidive de la droite qui veut détruire le droit du sol en transformant des milliers d’enfants en apatrides
(voir nos articles détaillés qui rappellent l'historique des tentatives de la droite et du Front National sur ce terrain Copé : au-delà de la provocation
Nationalité : Copé et l’UMP en embuscade.
Un enjeu particulier est de démonter minutieusement le danger que représente le Front National. Ce parti d’extrême-droite, raciste et antisémite, vient encore de s’illustrer par le énième dérapage d’une de ses candidates assimilant Christiane Taubira à un singe, alors même que Marine Le Pen prétendait interdire le qualificatif "extrême-droite" à propos de son parti.
Pour notre part, nous nous y emploierons, avec les associations antiracistes (voir déclaration link) avec le Réseau Education Sans Frontières (site link ) avec la Coordination Nationale contre l’Extrême droite (CONEX) dont nous sommes membres (voir Antifascisme: regroupement des forces ) .
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