La commémoration du génocide des Tutsis du Rwanda revêtira cette année en France un caractère particulier.
Les éléments s’accumulent à propos de l’implication de l’armée française dans la préparation et même la mise en œuvre de ce génocide.
Ainsi le quotidien Wall Street Journal du 26 février dernier a révélé la participation des militaires français, en plein génocide, à l’attaque massive contre les soixante mille civils tutsi réfugiés à Bisesero les 13 et 14 mai 1994. Quarante mille Tutsis auraient été tués lors de cette attaque.
http://www.genocidemadeinfrance.com/spip.php?article118 pour la traduction de cet article.
D’autres livres et film témoignent du déroulement de ce génocide, commis au vu et au su des puissances du monde et des médias.
D’autre part la visite de Sarkozy au Rwanda le 25 Février dernier a donné lieu à une ébauche de reconnaissance des responsabilités françaises.
Nous citons sur ce point le début de la déclaration de la Commission d’enquête citoyenne sur le Rwanda, http://cec.rwanda.free.fr/ qui écrit le 19 mars 2010 :
« Le président de la République française a marqué d’une courte visite au Rwanda, le 25 février 2010, la réorientation relative de la politique de la France vis-à-vis de ce pays.
1- Nicolas Sarkozy a visité silencieusement le mémorial de Kigali, soulignant ensuite la dignité de sa conception dans la conférence de presse conjointe avec le Président du Rwanda, Paul Kagame. Cette attitude corrige de fait les propos négationnistes d’Hubert Védrine en 2001, alors ministre français des affaires étrangères, qui ne voulait pas s’incliner devant un mémorial « pour ne pas céder à l’instrumentalisation du génocide ».
2-Mais il a également persévéré dans les réserves de la France à reconnaître pleinement son rôle dans le génocide des Tutsi, acceptant seulement d’ajouter au constat des « graves erreurs d’appréciations », fait par les députés français en 1998, leurs « conséquences dramatiques ». Il n’a pas présenté les excuses de la France… »
Cette visite a aussi donné lieu à une mobilisation autour d’un Appel Citoyen France-Rwanda intitulé: Faire toute la lumière sur les "erreurs", nous avons signé cet appel. (http://appel-citoyen-france-rwanda.over-blog.org)
Ce contexte nouveau rend d’autant plus importante la participation aux commémorations (bruxelloise et parisiennes ) ci-dessous et auxquelles nous nous associons
Mémorial 98
A Bruxelles, activités organisées par Ibuka Belgique
Le mercredi 7 avril
19:00: Marche du Souvenir (De la Place Royale jusqu'au Palais de Justice)
20h30 : Soirée de la Mémoire (Au Centre culturel d'Auderghem)
XVIe COMMEMORATION DU GENOCIDE DES TUTSI
(PARIS, AVRIL 2010)
Mercredi 7 avril 2010, une journée du souvenir
16h00 : Rassemblement devant le Mur pour la paix
19h30 : Veillée du souvenir
62, rue Marcadet, 75018 Paris
Le 7 avril 1994, au Rwanda, débutaient les massacres génocidaires qui visaient les
populations tutsi de ce pays d’Afrique. En moins de cent jours près d’un million d’hommes,
de femmes et d’enfants ont trouvé la mort, la plupart sous les coups de machettes. Notre
devoir est de ne pas oublier. Ainsi pour la seizième fois, nous vous invitons à venir rendre
hommage avec nous aux victimes du dernier génocide du XXe siècle.
Nous avons placé cette cérémonie sous le signe de la justice. Seize ans après le crime, de
nombreux auteurs restent encore en liberté. Les insuffisances en la matière privent les
rescapés du droit à la réparation et atténuent l’impact de toute politique de réconciliation entre
les Rwandais. Celle-ci n’est possible que si les rescapés retrouvent l’espoir que les criminels
soient arrêtés et jugés. Pour l’instant, les victimes restent dans cette attente qui est une étape
nécessaire vers de moindres souffrances :
« On a jugé les fauteurs dans les tribunaux. Ca représente une fraction des tueurs, une
fraction quand même. Oui, il y a une justice après le génocide, mais pas de réconciliation.
Elle s’adapte au nombre de magistrats, de tueurs et de victime, elle corrige les fauteurs et
empêche les vengeances, elle se montre atténuante pour les tueurs et profitable à la bonne
marche du pays. Elle est gratifiante pour l’avenir. Elle satisfait les autorités, les donateurs
internationaux, et tant pis pour le chagrin des rescapés ». Marie-Louise Kagoyire, in La
Stratégie des antilopes, Jean Hatzfeld, Seuil, 2007 p.160
Dimanche 18 avril 2010 : Transmettre la Mémoire
Lieu : 62, rue Marcadet, 75018 Paris
Pour prévenir l’oubli, en quête des moyens pour maintenir la flamme de la conscience
universelle dont l’absence a fait de ce siècle celui des génocides, nous vous invitons à venir
partager avec nous la réflexion sur les différentes manières de transmettre la mémoire
En Europe, l’acte ou le devoir de mémoire évoque l’épisode douloureux du génocide des
Juifs. Or, celui-ci a été perpétré au cœur de l’Europe. Il a été réalisé par et contre des
européens. L’énormité, la proximité géographique et historique n’ont pas suffi à transmettre la
mémoire de la tentative d’extermination des Juifs par les nazis. Il a fallu le recours à des
techniques classiques d’élaboration et de la diffusion de la connaissance historique ainsi que
le concours de toutes les disciplines des sciences sociales : la littérature, la philosophie,
l’histoire, le cinéma, l’école, l’art…
Bien qu’il ait été commis sur le continent noir, le génocide des Tutsi n’est pas étranger à
l’Occident. Il suffirait de rappeler les liens entre le Rwanda et la communauté internationale
au moment des faits. On pourrait aussi, pour le sortir de la catégorie des massacres ordinaires
lointains et barbares, examiner le recours aux techniques modernes dans sa mise en œuvre,
notamment l’usage des médias, dont la radio. Pour le comprendre et en transmettre la
mémoire, des outils modernes de la recherche et de la diffusion du savoir sont déjà mis en
oeuvre. Par ce colloque, nous voulons comprendre les techniques les plus utilisées et les
problèmes que poseraient leur application au génocide des Tutsi.
A l’ouverture, une invitée, Linda Melvern : journaliste, écrivain, auteur de
- A People Betrayed: The Role of the West in Rwanda's Genocide, Zed Books 2000, ouvrage
dont la traduction en français paraitra début avril
- Conspiracy to Murder: The Rwandan Genocide, (Reviseé) Paperback – 17 avril 2006
- Les Nations unies by Linda Melvern (Hardcover - Sept. 25, 2002)
I. Les passerelles les plus usuelles : 10h15-11h
1. Comment se construisent les représentations ?
Par Ariane Mathieu, doctorante à l’Université de Concordia (Canada), elle travaille sur les problématiques de la reconstruction de la mémoire et de l’histoire. Elle a collaboré
à « Cambodge ... Retour sur une des grandes traversées de l'été de France Culture » sur
France Culture : http://alturl.com/4apo
2. Cinéma/documentaire
Arnaud Sauli – Cinéaste. De formation en histoire à l’EHESS, Il s’est notamment intéressé aux acclimatations colonialesdes idées de police, de criminalité et de violence. Il a depuis déplacé ses activités vers le cinéma documentaire et termine actuellement un film documentaire sur l’écriture de l’histoire du génocide des Tutsi du Rwanda.
3. La pédagogie : Quand les jeunes explorent un territoire où leurs professeurs
n’ont jamais mis les pieds : le point sur la recherche des étudiants - mémoires et
thèses.
Héloïse Leterrier – a soutenu en 2009 à l’Université de Caen/Basse Normandie, un mémoire de Master sur « La culture et l’éducation rwandaise en France : partage d’une mémoire et transformation des valeurs »
II. L’apport des sciences humaines et sociales : 11h30 – 12h30
1. Le témoignage des victimes et celui des assassins :
Catherine Coquio
- Professeur de littérature comparée à l'Université de Poitiers.
- Responsable du groupe de recherches Littérature et savoirs à l'épreuve de la violence
politique. Génocide et transmission.
- Présidente de l'Association Internationale de Recherche sur les Crimes contre l'Humanité et les Génocides (www.aircrige.org)
- Auteur de Rwanda. Le réel et les récits, Belin, 2004.
2. Penser l’événement
Gérard Rabinovitch - Philosophe et sociologue, chercheur au CNRS
En 2009, il a publié : De la destructivité humaine (PUF) et Connaissance du monde juif
(CRDP)
3. Penser et agir :
Denis Peschanski - Historien, directeur de recherche au CNRS.
- La France des camps : l'internement 1938-1946, Gallimard, 2002 qui a donné lieu au film
« La France des camps 1938 – 1946 », écrit par Denis Peschanski, réalisé par Jorge Amat qui
sera diffusé sur France 2, le 8 avril 2010 dans Infrarouge.
III. Lieux de transcription et de transmission de la mémoire
1. Récit, tradition et écriture
Scholastique Mukasonga –écrivain, auteure de trois ouvrages,
- Inyenzi ou cafards, Continent Noir Gallimard, 2006
- La femme aux pieds nus, prix Seligmann « contre le racisme, l’injustice et l’intolérance »
2008 - L'Iguifou Nouvelles rwandaises, coll. Continents Noirs, éd. Gallimard
2. Le corps ou la mémoire silencieuse :
Hélène Piralian – Psychanalyste, philosophe et écrivain auteur de :
- Génocide, disparition, déni. La Traversée des deuils, L’Harmattan, 2007
- Génocide et transmission : Sauver la mort, sortir du meurtre, L’Harmattan, 2005
Elle travaille sur les effets psychiques des deuils "rendus" impossibles
3. Enseigner, transmettre et former.
Christian Savary / Anthony Vérove – professeurs au Lycée Lebrun à Coutances, dans
l’Académie de Caen, ils encadrent la Junion Association Les Sentiers de la Mémoire, i.
Ils organisent et animent des Semaines de la Mémoire et de Voyages de Mémoire et
d'Histoire en Europe de l'Est.
Avec le soutien des associations : Médecins du Monde, CRF, UEJF, SOS Racisme,
Mémorial de la Shoah, Centre Simon Wiesenthal, Etudes sans frontières, CPCR,
Conseil de coordination des organisations arméniennes de France, Comité de défense de la cause arménienne, Fondation pour la Mémoire de la Shoah, Survie, Nor Seround, Urgence Darfour, Appui Rwanda, Forim, Idilick, AJ162, Mémorial 98.
Venez nombreux rendre hommage à la mémoire des victimes et témoigner de notre soutien aux rescapés
Mémorial 98