Le contexte est connu et important: un pseudo « film » islamophobe a été diffusé à partir des Etats-Unis par des groupes d’extrême-droite et des chrétiens coptes radicaux.
Ces groupes ont tenté d’attribuer ce film à un Israélien, qui aurait été financé par « 100 donateurs juifs » selon les messages d’intoxication qu’ils avaient lancés. Le pseudo film a été relayé dans les pays musulmans et a provoqué des affrontements violents et meurtriers, mais pas de mobilisations massives, sauf celle organisée par le Hezbollah au Liban. Ce point est important car les effets médiatiques ont pu laisser penser qu’une vague extrêmement importante de manifestations avaient eu lieu. Aux Etats-Unis même, l’hebdomadaire Newsweek a voulu exploiter cette veine et a vu sa tentative critiquée et ridiculisée par les internautes.
C’est dans ce climat que Charlie Hebdo a choisi de « traiter l’actualité » en publiant à nouveau des caricatures de Mahomet. Les responsables du journal semblent avoir voulu réaliser un « coup » médiatique et économique. C’est leur droit, car la presse et l’expression sont libres et doivent le demeurer. Mais ce choix peut aussi être analysé et « déconstruit ». Or les responsables de Charlie récusent toute critique en arguant de son statut de « journal satirique ». C’est un leurre, car Charlie est un journal avant tout politique, qui utilise certes le dessin et la caricature mais semblait défendre des valeurs, y compris d’ailleurs le droit de dénoncer les religions et de « blasphémer ».
Mais cette fois, en raison du contexte et des explications des dirigeants du journal lui-même (Charb) le sentiment est que la recherche du « buzz » a dicté la publication des caricatures.
Il faut aussi rappeler que Charlie a connu une crise importante en 2008 quand un commentaire à caractère antisémite de Siné a conduit au licenciement de celui-ci ainsi qu’au départ ultérieur du directeur d’alors, Philippe Val, qui fut récupéré par Sarkozy.
Au total, dans cette affaire, les dirigeants de Charlie contribuent à renforcer à la fois la haine des musulmans et la violence des groupes qui sèment la terreur au nom de la religion.
Nous choisissons plutôt de défendre l’écrivain Salman Rushdie, qui depuis 1989 vit sous la menace d’être tué en raison d’un ordre de Khomeiny. Le prix de la récompense pour son assassinat vient d’être porté à plus de 3 millions de dollars par les services iraniens qui le pourchassent.
MEMORIAL 98