Le ministre de l'Identité Nationale et de l'Immigration et ci-devant socialiste, Eric Besson, a cru bon de mettre en cause le film et son réalisateur qui aurait comparé le sort de ces « clandestins » et celui des Juifs pendant la guerre. L'accusation est grave mais fausse.
Lioret a évoqué lors d'une interview les sentiments de ceux qui aident des immigrés en difficulté et sont menacés comme ont pu l'être ceux qui cachaient des Juifs.
Nous sommes particulièrement vigilants à propos des assimilations abusives concernant la Shoah et n'hésitons pas à critiquer de telles dérives (voir dans notre article précédent: Europe: contre l'enfermement des étrangers:« Nous soutenons donc les initiatives du collectif européen des associations et du réseau éducation sans frontières (RESF) Nous tenons néanmoins à marquer notre désaccord avec une des formules de l'appel qui parle de "logique concentrationnaire". Ce terme est déplacé et hors de propos. La" logique concentrationnaire" a acquis une signification précise, en rapport avec des génocides dont la Shoah. Il n'y a aucune justification à cet écarts de langage et nous le faisons savoir aux organisateurs qui ont rédigé le texte... »)
Mais il est par contre légitime d'alerter à propos de la criminalisation croissante de ceux qui viennent en aide bénévolement à des sans-papiers (voir notre article Sans papiers: soutien criminalisé ? ). Toute la presse a rapporté le cas de la personne de Béthune placée en garde à vue et menacée pour avoir rechargé les téléphones portables de ceux qui n'ont pas de prise à leur disposition. Il est aussi légitime et nécessaire d'évoquer les « rafles » actuelles, correspondant aux objectifs chiffrés de sans-papiers à arrêter et expulser. Il est légitime et nécessaire de décrire la « chasse au faciès » qui contribue à ces arrestations.
Le zèle courtisan de Besson s'explique sans doute par le caractère emblématique pour la Sarkozie de la situation à Calais. En 2002, alors qu'il était ministre de l'Intérieur, Sarkozy avait érigé en symbole de sa « poigne » la fermeture du centre tout proche de la Croix-Rouge à Sangatte. La conséquence en est que les sans-papiers n'ont plus aucun abri, dorment dehors ou dans des abris de fortune et survivent grâce à l'aide de militants associatifs.
Mais puisque Besson se mobilise contre les comparaisons abusives, il devrait commencer par mettre en cause Monsieur et Madame Sarkozy.
C'est N. Sarkozy lui-même qui, pour défendre la « dépénalisation du droit des affaires », recourrait le 30 août 2007 devant l'Université d'été du Medef à la formule suivante, très applaudie par l'assitance patronale(voir notre article Sarkozy: nouveau dérapage sur Vichy) :
« A quoi sert-il d'expliquer à nos enfants que Vichy, la collaboration, c'est une page sombre de notre histoire, et de tolérer des contrôles fiscaux sur une dénonciation anonyme, ou des enquêtes sur une dénonciation anonyme ?... »
Mais gageons que le titulaire du ministère de l'Identité Nationale, dont la dénomination même fût imaginée par Patrick Buisson, conseiller d'extrême-droite de Sarkozy, pour attirer l'électorat de Le Pen(voir notre article France-Tunisie: la manipulation sarkozyste décryptée ), ne se permettra pas une telle insolence.
MEMORIAL 98