Sarkozy-Le Pen : révélations et pas de deux.
Le livre de Yasmina Reza sur la campagne de Sarkozy intitulé « L’aube le soir ou la nuit » apporte un éclairage supplémentaire sur cette période. Cet ouvrage, plutôt complaisant à l’égard du candidat UMP, confirme si besoin était que le président actuel a orienté sa campagne vers les électeurs du Front national
Citation du livre:
Réunion avec son entourage, Nicolas Sarkozy parle (non daté):
«
Je vous dis une chose. Si on n'avait pas l'identité nationale, on serait derrière Ségolène. On est sur le premier tour, mes amis. Si je suis à 30%, c'est qu'on a les électeurs de Le Pen. Si les électeurs de Le Pen me quittent, on plonge»
Il ne s’agit pas ici du cynisme habituel d’un candidat et de ses conseillers en communication. Il ne s’agit pas non plus de « pédagogie » pour ramener des électeurs vers la droite classique (voir notre article précédent Sarkozy et le Front National: une liaison dangereuse)
L’enjeu stratégique de Sarkozy est l’unification de la droite autour du thème de la défense de l’ « identité nationale » menacée, thème récurrent et éternel de la droite nationaliste dans notre pays.
Le Pen lui-même reconnaît d’ailleurs le succès de la campagne de Sarkozy et s’adapte à la nouvelle situation.
Dans ses déclarations du mois d’août 2007 pour la presse et la radio, il rend hommage à Sarkozy, en estimant qu’il tient "un certain nombre de ses promesses électorales ».
Il déclare ainsi :
"Il fait une chose, qui est moralement positif, c'est qu'il tient, semble-t-il au moins, un certain nombre de ses promesses électorales, bien sûr pas toujours dans la dimension et la profondeur que pourraient attendre ceux qui ont voté pour lui, mais tout de même, il va dans cette direction-là",
Le président du Front national a aussi précisé avoir été reçu deux fois par le nouveau président, notamment pour évoquer la réforme des institutions.
Au-delà de ce coup de chapeau, le propos clé du dirigeant s’extrême droite est le suivant;
"Il (Sarkozy) tient à donner l'image d'un rassembleur et d'un homme qui n'est pas tenu par des obligations, quelles qu'elles soient. Il reçoit qui il veut, quand il veut, où il veut", a-t-il dit. Or Le Pen et le journal catholique intégriste Présent ont souvent accusé Chirac et d’autres hommes politiques d’être « inféodés à un lobby » (juif) auprès duquel ils se seraient engagés à ne pas avoir de contacts avec lui-même et son parti.
Le Pen insiste :
"Il ne met pas les pieds dans les pas de Jacques Chirac qui procédait d'une détestation à l'égard du Front national, tout à fait injuste et injustifiée"
Ce pas de deux n’empêche pas la compétition acharnée et féroce entre la droite dure et l’extrême droite, mais le cadre est changé, une barrière a été levée, un ministère de l’Identité nationale est en place.
MEMORIAL 98