Dans le cadre de l'immense scandale de corruption qui secoue le monde du football professionnel, un des principaux mis en cause, Jack Warner, accusait dès 2011, les "sionistes", terme à peine codé pour désigner les Juifs, comme responsables de sa chute. Aujourd'hui Poutine défend la direction corrompue de la Fédération internationale de football (FIFA) et met en cause la justice américaine. L'antisémitisme peut servir à couvrir toutes les turpitudes. On peut être certain que cette "information" sur les "sionistes" et l'implication de la situation au Moyen-Orient se retrouvera très rapidement sur tous les sites complotistes et antisémites de la planète. Elle repoussera aussi au second plan l'autre scandale de la FIFA qui concerne les conditions désastreuses de travail et de vie des ouvriers immigrés qui préparent la Coupe du Monde 2022 au Qatar.
C'est l'occasion de rappeler que les instances internationales du sport olympique ont beaucoup pactisé avec le nazisme et les dictatures. C'est le cas aussi pour les fédérations de course automobile, qui ont été longtemps dirigées par des fascistes avérés. Quant au football, on connait la fréquence des incidents antisémites et racistes provoqués par des supporters. Certains clubs européens se distinguent d'ailleurs par la virulence antisémite et néo-nazie de leurs "ultras: Lazio de Rome, Legia Varsovie, West Ham (GB), Chelsea (GB), Kaiserlautern (Allemagne), FC Lucerne en Suisse avec un incident grave récent, PSG en son temps...
Au plan international, le symbole historique de la complaisance envers le nazisme trouve une expression particulière lors des Jeux Olympiques d’hiver de 1936, qui eurent lieu du 6 au 16 février, dans la ville allemande de Garmisch-Partenkirchen.
Ces Jeux, désirés par Hitler, arrivé au pouvoir trois ans auparavant (1933), furent organisés afin de lui servir de vitrine par Goebbels, Ministre de la Propagande du Troisième Reich. C'est le belge Henri de Baillet-Latour, antisémite notoire, qui était alors le président, depuis 1925, du Comité international olympique (CIO).
Un célèbre cliché photographique le montre entouré, lors de la cérémonie d’ouverture de ces Jeux d’hiver de 1936, de Adolf Hitler et de Rudolf Hess, dauphin du Führer. Lorsque Baillet-Latour mourut en 1942, Hitler lui fit envoyer, portées par une garde d’honneur composée de soldats allemands, plusieurs couronnes de fleurs, dont une en son nom personnel et une aux couleurs du Troisième Reich, le tout assorti de rubans à croix gammées.
Et puis il y eut à Berlin 1936, du 1er au 16 août les "Jeux de la honte".
Le fondateur de l'olympisme moderne président d’honneur à vie du CIO, Pierre de Coubertin, qui admirait « intensément » Hitler, fut plus dithyrambique encore à leur égard : « Que le peuple allemand et son chef soient remerciés pour ce qu’ils viennent d’accomplir. (…). Cette glorification du régime nazi a été le choc émotionnel qui a permis le développement qu’elles (les Olympiades) ont connu ! » Hitler, qui n’en demandait pas tant pour vanter son régime aux yeux du monde, le proposa, pour le remercier, comme lauréat du prix Nobel de la paix, ce que à quoi l’Académie d’Oslo se refusa d’acquiescer.
Il existe aussi, à ce sujet, une photo, tout aussi compromettante, reproduite ci-dessus, de la cérémonie d’ouverture des JO de Berlin en 1936, où l’on voit Adolf Hitler, arborant la croix gammée, saluer le drapeau olympique en faisant le salut nazi.
Ainsi est-ce en 1936 que les premières persécutions antisémites apparaîtront, en Allemagne, au grand jour. Pas moins de 114 lois anti-juives y seront édictées pendant le seule période s’étalant entre les Jeux Olympiques d’hiver, à Garmisch-Partenkirchen, et ceux d’été, à Berlin, tandis que tous les athlètes juifs de l’équipe nationale allemande en seront exclus. Le 16 juillet 1936, deux semaines avant l’ouverture de ces JO d’été, 800 Tziganes et Roms résidant à Berlin furent arrêtés lors d’une rafle orchestrée par la police allemande, puis internés dans un camp sous la garde des SS de Himmler. Ce fut là le premier camp de concentration de l’histoire nazie spécialement aménagé à cet effet, celui de Marzahn, quartier situé dans l’est de Berlin. La plupart de ces prisonniers-là, dont beaucoup y furent exécutés sommairement, n’en sortiront jamais plus.
Sur ce premier crime de guerre commis par le Troisième Reich, en plein Jeux Olympiques, ni le président du CIO, Henri de Baillet-Latour, ni son président d’honneur, Pierre de Coubertin, ne pipèrent mot, le couvrant ainsi du haut de leur prestige international
Pire encore, le président du Comité National Olympique Américain d’alors, Avery Brundage, antisémite chevronné, nazi convaincu et membre actif de deux associations ultra racistes outre-Atlantique, relativement secrètes et toutes deux proches du « Ku Klux Klan », convainquit les États-Unis d’Amérique de ne pas boycotter ces Jeux de Berlin, sous prétexte que « les Juifs étaient bien traités par le Reich »,
Brundage, disciple d’Hitler et que Göring recevait régulièrement en grande pompe, fut nommé, en 1952, président du CIO, puis, en 1972, « président d’honneur à vie » lui aussi.
Il existe là encore une photo de l’entrée triomphale d’Adolf Hitler, entouré des principaux membres du CIO, lors de la cérémonie d’ouverture des JO de Berlin.
Une autre date marquante est le 18 novembre 1936, à peine trois mois après la clôture des Jeux de Berlin.
C’est ce jour-là, en effet, qu’eut lieu le départ des aviateurs allemands de la légion « Condor », unité de la « Luftwaffe » alors placée sous les ordres de Göring, pour aller combattre en Espagne, contre les républicains, aux côtés des fascistes de Franco. Au premier rang de ceux-ci émergeait alors, un certain Juan Antonio Samaranch, qui militait déjà, en ce temps-là, dans les rangs des pro-hitlériennes « Phalange Espagnole Traditionnaliste » (FET) et autres « Juntes Offensives National-Syndicalistes (JONS). Après avoir été nommé par Franco lui-même, en 1967, « Secrétaire aux Sports » dans le gouvernement espagnol (lequel favorisa de grands criminels nazis), deviendra de 1980 à 2001, le nouvel et inamovible président du CIO.
Le CIO n'a à ce jour pas présenté d'excuses pour la tenue de ces Jeux de 1936, malgré les nombreuses demandes dans ce sens. Il reste donc marqué par sa collaboration avec le régime nazi.
Dans le "sport" automobile, autre énorme machine à profits, 2 dirigeants marqués par le nazisme, dont un fut le premier SS français, se sont succédé à la tête de la Fédération internationale du sport automobile (FISA) pendant 30 ans, de 1978 à 2009. Il s'agit de Jean-Marie Ballestre (France, de 1978 à 1991) et Max Mosley (Grande-Bretagne, de 1991 à 2009) .
Ballestre adhère dès 1940 aux organisations d'extrême droite « Jeunes du Maréchal » puis « Jeune Front ». Il y fait la rencontre de Robert Hersant, futur magnat de la presse française, qui en est l'un des dirigeants. Dès l'été 1940, on le trouve impliqué dans des violences antisémites en compagnie de Robert Hersant.
Il s'engage en 1942 dans le NSKK, unité nazie des forces motorisées. Il lance en novembre 1942 le journal Jeune Force de France et collabore à Devenir, le journal des SS français. Il écrira à cette occasion : « Nous le pensons et nous l'affirmons : le salut ne nous viendra que du combat. L'heure des hommes virils a sonné. Il faut choisir entre le national-socialisme et la juiverie ». Le 17 mai 1943, il entre en fonction à l'Erstaztcommando de la SS française avec le grade de deuxième classe à Paris. Il est ainsi le premier français admis dans les SS. Tombé aux mains de l'armée américaine en avril 1945, il revient en France est dénoncé comme ancien SS par les membres de la communauté juive. Mais un non-lieu est rendu le 16 mai 1947 et Ballestre fait carrière dans les instances automobiles nationales puis internationales.
Son successeur Max Mosley est le fils du fondateur du mouvement fasciste en Grande-Bretagne, Oswald Mosley, ami et allié de Mussolini, Hitler et Franco. Max Mosley lui-même a été très longtemps fort actif dans ce mouvement. En 1961, alors secrétaire de l'Oxford union society, une association de débats sur la société Mosley y fait campagne sous le slogan « liberté d'expression pour les fascistes ». Parallèlement, il milite au sein de l'Union Movement, le parti créé par leur père après la Seconde Guerre mondiale. Puis il devient pilote de course et dirigeant de ce secteur, sans que son engagement fasciste ne constitue une quelconque entrave. En 2008 une vidéo fait scandale. On y voit Mosley en compagnie de cinq jeunes femmes, dont certaines apparaissent vêtues d'un uniforme rayé de prisonnier des camps nazis. Selon le "Times" , qui parle d'une «orgie nazie», Mosley s'exprime en allemand et joue tour à tour le rôle d'un détenu et d'un gardien de camp de concentration. Ces révélations ne l'empêchent pas de poursuivre sa présidence jusqu'en 2009.
On constate à quel point les structures de direction du sport-spectacle et du sport-business s’accommodent de la présence à leur tête de fascistes et de racistes connus et de la collaboration avec les pires régimes. Le sport, transformé en exaltation du nationalisme et source de profit, devient ainsi un rouage de la barbarie.
MEMORIAL 98